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06 septembre 2025

POLARS EN BARRE [41]

 

                                                                                 

" — La littérature policière, c'est quoi pour vous ?
— Dorothy Belle Hughes : de la littérature."


Polar, Printemps 1983

                                                                                 

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Tardi pistolet.jpg"Assurément, la révolte individuelle effraie bien moins que la révolte collective, mais elle n’en rend pas moins compte à sa façon des malaises d’une époque qui accumule les trahisons des promesses républicaines — ce que perçoit aussi une partie de la bourgeoisie… C’est en ces temps où se répète, comme indéfiniment, la mise à mort des espérances de justice sociale que s’affirment le roman policier et ses lecteurs. Si Edgar Allan Poe fut l’inventeur du genre avec Double Assassinat dans la rue Morgue, en 1841, Les Mystères de Paris, d’Eugène Sue (1842-1843), enquête dans les bas-fonds, ont incomparablement plus d’écho. Ces ouvrages dessinent les deux grandes voies que prendra le genre : roman noué sur une énigme, roman à imaginaire politico-social — qu’on appellera plus tard le « polar ». Ambiances radicalement différentes, pourtant l’énigme n’est que la version plus ou moins aseptisée, intemporelle et dépolitisée, de ce qui anime le polar : le désir d’accéder à la vérité cachée, de faire tomber le mensonge et advenir la justice, voilà toujours ce qui fait vibrer le détective. Mais, dans le polar, les crimes ne relèvent plus de la (seule) psychologie. Ils sont ancrés dans un monde où les crapules et les manipulateurs sont au pouvoir. Pas de grand justicier qui nettoie définitivement le « mal ». Le coupable est pluriel, le mal n’est pas individuel, mais politique, social, institutionnel. Au mieux, on en démonte quelques rouages, on rend visible sa violence, souvent métaphoriquement : avec les durs à cuire (abrités par la « Série noire »), avec la constellation du « néo-polar » (Jean-Patrick Manchette, etc.), avec les évocateurs de meurtres quasiment effacés par le récit officiel (Didier Daeninckx, Dominique Manotti)…"

 

Évelyne Pieiller

 

 

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