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27 décembre 2022

"BOUQUINAGE" - 100

"Tel que nous le définissons plus précisément, le romantisme est une critique culturelle, ou une révolte, contre la modernité capitaliste-industrielle au nom de valeurs passées, prémodernes ou précapitalistes. En tant que vision du monde, il est présent dans toute une série de créations culturelles: littérature et art, religion et philosophie, théorie politique, historiographie, anthropologie, et même économie politique. Il perçoit dans l'avènement de la société bourgeoise moderne une perte décisive de valeurs humaines, sociales et spirituelles qui existaient dans un passé réel ou imaginaire - le Moyen Âge, la Grèce homérique, le communisme primitif, et autres.

La contestation romantique s'inspire toujours de valeurs précapitalistes -sociales, culturelles ou religieuses- et se caractérise par la nostalgie d'un paradis perdu, d'un âge d'or du passé. Mais cela ne signifie pas qu'elle soit toujours réactionnaire et rétrograde. Le romantisme peut prendre des formes régressives, rêvant d'un retour imaginaire au passé, mais aussi des formes révolutionnaires qui aspirent à une utopie future faisant un détour par le passé.

(...)

La perspective romantique est donc en contradiction directe avec ce que l'on a appelé “le régime moderne d'historicité”, fondé sur la croyance que le “Progrès” est inévitable et sur le rejet du passé prémoderne comme “archaïque”.

(...)

Comme nous l'avons déjà suggéré, le romantisme ne conteste pas toujours le système capitaliste dans son ensemble, mais réagit souvent à un certain nombre de traits de la modernité qu'il trouve particulièrement odieux et insupportables. Voici quelques exemples marquants -dans une liste qui est loin d'être exhaustive- de composantes caractéristiques et interdépendantes de la civilisation moderne fréquemment déplorées ou dénoncées dans les œuvres romantiques :

1) Le désenchantement du monde. (...)

2) La quantification du monde. (...)

3) La mécanisation du monde. (...)

4) La dissolution des liens sociaux. (...)

 

À cette liste de thèmes romantiques prédominants, il convient d'ajouter celui qui est au centre de cette étude : la destruction de la nature. Le gaspillage, la dévastation et la désolation infligées à l'environnement naturel par la civilisation industrielle sont souvent un motif profond de tristesse et de colère romantique. Elle est intimement liée aux quatre objets précédents de la protestation romantique. Nostalgiques de l'harmonie perdue entre l'homme et la nature, consacrant parfois la nature comme l'objet d'un culte mystique, de nombreux romantiques ont observé avec mélancolie et désespoir les progrès de la mécanisation et de l'industrialisation, la conquête moderne de l'environnement qui a conduit à la disparition des espaces sauvages et à la défiguration de beaux paysages. L'empoisonnement de la vie sociale par l'argent et l'empoisonnement de l'air par la fumée industrielle sont compris par certains romantiques comme des phénomènes parallèles, issus de la même racine perverse - la domination impitoyable de l'utilitarisme et du mercantilisme, le pouvoir dissolvant du calcul quantitatif. Dans le monde capitaliste désenchanté, la nature cesse d'être un royaume magique et spirituel, une création divine ou la splendeur sacrée de la beauté. Les forêts, les rivières et les paysages sont réduits à l'état de matières premières, exploitées jusqu'à épuisement."

 

 

 

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26 décembre 2022

SFFF - 24 images par seconde [XCIII]

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1990

Ghost

Film de Jerry Zucker

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"BOUQUINAGE" - 99

 

"Hari Seldon n’avait rien d’impressionnant à l’époque. Comme l’empereur Cléon Ier, il avait trente-deux ans, mais ne mesurait qu’un mètre soixante-treize. Le visage lisse, les traits avenants, il avait les cheveux bruns, presque noirs, et ses habits trahissaient une touche de provincialisme.

Pour quiconque, dans les siècles futurs, connaîtrait Hari Seldon uniquement comme un demi-dieu de légende, il semblerait quasiment sacrilège de ne pas le voir assis dans un fauteuil roulant, arborer des cheveux blancs, un visage âgé et ridé, un calme sourire irradiant la sagesse. Cependant, même à cet âge fort avancé, son regard resterait chaleureux. Cela au moins ne changerait pas.

Et son regard était particulièrement chaleureux, pour l’heure, car son article venait d’être présenté au Congrès décennal. Il y avait même soulevé un certain intérêt et le vieil Osterfith lui avait dit, en hochant la tête: ‘’Ingénieux, jeune homme ; fort ingénieux.’’ Ce qui, venant d’Osterfith, pouvait être considéré comme satisfaisant. Fort satisfaisant.

Mais voilà que survenait un développement nouveau –autant qu’inattendu– et Seldon se demandait s’il était ou non de nature à renforcer son allégresse et accroître sa satisfaction.

Il fixait le jeune homme en uniforme – l’emblème au Soleil et à l’Astronef bien en évidence sur le côté gauche de sa tunique.

‘’Lieutenant Alban Wellis, dit l’officier de la garde impériale avant de ranger sa carte. Voulez-vous bien me suivre, monsieur ?’’

Wellis était armé, bien sûr. Et deux autres gardes attendaient devant sa porte. Seldon savait qu’il n’avait pas le choix, nonobstant les circonlocutions polies de l’autre, mais rien ne lui interdisait de chercher à en savoir plus : ‘’Pour voir l’Empereur ?

— Pour être conduit au Palais, monsieur. Tels sont les ordres que j’ai reçus.

— Mais pourquoi ?

— On ne me l’a pas dit. Et mes ordres sont stricts : vous devez me suivre… d’une manière ou de l’autre.

— Mais cela ressemble fort à une arrestation. Je n’ai pourtant rien commis de répréhensible.

— Disons plutôt, monsieur, que l’on vous fournit une garde d’honneur, si vous ne tardez pas davantage.‘’

Seldon ne tarda pas plus. Il pinça les lèvres, comme pour retenir de nouvelles questions, hocha la tête, avança d’un pas. Même si c’était pour être présenté à l’Empereur et recevoir ses félicitations, il n’y trouvait aucun plaisir. Il était pour l’Empire –enfin, pour la paix et l’unité des mondes formant l’humanité–, mais il n’était pas pour l’Empereur.

Le lieutenant le précéda, les deux autres fermant la marche. Seldon sourit aux passants qu’il croisait, essayant de prendre un air dégagé. Une fois sortis de l’hôtel, ils montèrent dans un véhicule terrestre officiel (Seldon caressa de la main les garnitures intérieures : jamais il n’avait vu quelque chose d’aussi ouvragé).

Ils se trouvaient dans un des secteurs les plus opulents de Trantor : ici, le dôme était assez haut pour vous donner l’impression d’être à l’air libre et l’on aurait pu jurer –même quelqu’un comme Hari Seldon qui était né et avait grandi dans un monde ouvert– qu’on était à la lumière naturelle. Certes, il n’y avait ni ombre ni soleil, mais l’air était léger et parfumé.

Et puis l’impression se dissipa, la courbure du dôme s’accentua, les parois se rétrécirent et bientôt ils s’enfonçaient dans un tunnel confiné, balisé à intervalles réguliers par l’emblème au Soleil et à l’Astronef et donc réservé (de l’avis de Seldon) aux véhicules officiels.

Une porte s’ouvrit et le véhicule s’y engouffra. Lorsqu’elle se referma derrière eux, ils se retrouvèrent à l’extérieur, pour de bon. Il n’y avait en tout et pour tout que deux cent cinquante kilomètres carrés de terres à l’air libre sur Trantor, et sur ces terres se dressait le Palais impérial. Seldon aurait aimé avoir l’occasion de parcourir ce domaine – moins parce qu’il abritait le Palais que parce qu’il hébergeait l’Université et, détail plus intrigant encore, la Bibliothèque Galactique. Et pourtant, en passant du monde clos de Trantor à cette enclave à l’air libre, envahie par les bois et les forêts, il était passé dans un monde où les nuages obscurcissaient le ciel et où un vent frais s’engouffrait dans sa chemise. Il pressa le contact qui refermait la vitre du véhicule.

A l’extérieur, le temps était maussade."

 

 

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25 décembre 2022

SFFF - 24 images par seconde [XCII]

 

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1976

L'homme qui venait d'ailleurs

[The Man Who Fell to Earth]

Film de Nicolas Roeg

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"BOUQUINAGE" - 98

 

"Le matin de Noël était nuageux, sec et sans caractère. J’étais devant ma fenêtre à regarder le parc, irrésistiblement envahi, comme chaque année en cette circonstance, par le souvenir des Noëls blancs de mon enfance, lorsque la maison était surchargée de décorations faites par ma mère, que mon père passait des heures à quatre pattes pour essayer de localiser l’ampoule fautive qui empêchait notre arbre de s’illuminer, que nous ne bougions pas du tout l’après-midi, à guetter par la fenêtre l’arrivée de mes grands-parents qui venaient passer la veillée avec nous, pour rester jusqu’au Nouvel An. (C’est-à-dire les parents de ma mère, car nous n’avions rien à faire avec ceux de mon père ; en fait, je n’avais jamais entendu parler d’eux, aussi loin que remonte ma mémoire.) Durant ces quelques jours, l’atmosphère de notre maison, d’habitude si tranquille et contemplative, devenait vivante, turbulente même, et c’est peut-être à cause de ce souvenir -et du souvenir de la blancheur fabuleuse qu’on était certain, à cette époque, de voir recouvrir notre pelouse- qu’il y avait un air d’irréalité dans la grisaille silencieuse des Noëls auxquels j’avais dû tristement me résigner depuis quelques années.
 
Mais ce jour-là il y avait autre chose. Ni Fiona ni moi ne pouvions supporter la perspective des huit heures de programmes de Noël de la télévision, et, au milieu de la matinée, voilà que nous roulions dans une voiture louée en direction de la côte sud. Je n’avais pas conduit depuis une éternité. Par bonheur, il n’y avait pratiquement pas de circulation dans le sud de Londres, et, à part une Ford Sierra rouge évitée de justesse, et quelques éraflures après un choc bruyant avec la borne d’un rond-point à la sortie de Surbiton, nous parvînmes à la campagne sans incident grave. Fiona avait proposé de conduire, mais je n’avais pas voulu en entendre parler. C’était peut-être stupide de ma part, parce qu’elle se sentait (et paraissait) beaucoup mieux qu’elle n’avait été depuis des semaines, et je pense en outre que j’avais été beaucoup plus qu’elle perturbé par l’absurde malentendu concernant le résultat de ses analyses à l’hôpital, où elle s’était présentée pour apprendre que son rendez-vous avait été annulé, que quelqu’un avait dû lui téléphoner pour l’en prévenir, que le spécialiste qui était censé s’occuper d’elle était parti manifester contre la décision de l’administration de fermer quatre services chirurgicaux juste après Noël, et qu’on la priait de revenir la semaine prochaine quand tout serait rentré dans l’ordre."
 

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DAMNED

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24 décembre 2022

SFFF - 24 images par seconde [XCI]

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1988

Fantômes en fête

[Scrooged]

Film de Richard Donner

00:10 Publié dans Film | Lien permanent | Commentaires (0) |  Facebook | |

"BOUQUINAGE" - 97

"Le fou, le prophète, Karl Glogauer, le voyageur temporel, le psychiatre névrosé manqué, qui voulait que les choses aient un sens, le masochiste, l'homme au désir de mort et au complexe messianique, l'anachronisme, se frayait un chemin à travers la place du marché, haletant.

Il avait vu l'homme qu'il cherchait. Il avait vu Jésus, le fils de Marie et de Joseph.

Il avait vu un homme en qui il reconnaissait, sans le moindre doute, un idiot congénital."

 

 

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