18 mars 2021
LA COMMUNE DE PARIS - 1871 [XVI]
HIER ET AUJOURD'HUI
Il y a 150 ans, le peuple parisien –artisans, ouvriers, fonctionnaires, petits commerçants, sans travail…– s’insurgea puissamment :
• Contre une guerre et ses conséquences, la France occupée par la Prusse et les armées de Bismarck aux portes de Paris.
• Contre les souffrances et la misère générées par le siège de la capitale.
• Contre les menaces pesant sur la République renaissante après l’effondrement du second Empire consécutif à la lourde défaite de Sedan.
• Contre l’arrogance d’une élite conservatrice et monarchiste, désireuse de mater définitivement une ville aux traditions révolutionnaires vivaces et toujours susceptible de se rebeller à la moindre étincelle.
La population de Paris bouillonnait en sens divers depuis plusieurs mois, lorsque le 18 mars, elle répondit à une provocation du gouvernement de monsieur Thiers et créa l’événement, en chassant une autorité devenue indésirable et en montant à l’assaut du ciel du pouvoir politique.
Certes, cet ébranlement fut de courte durée et limité d’un point de vue spatial. Car le caractère éphémère des tentatives "communalistes" dans d’autres grandes cités françaises, comme Lyon ou Marseille, renforça l’isolement de Paris !
Certes, en 72 jours, il était impossible de déployer pleinement un programme de rupture radical, de surcroit dans un contexte de guerre civile qui mobilisait d’importantes ressources financières.
Par ailleurs, dans sa majorité, la Commune n’était pas "socialiste" comme l’écrivit Marx [1]. Et puis, difficile d’imaginer l’édification d’un "socialisme dans une seule ville" !
Néanmoins de réelles avancées sociales, démocratiques et sociétales purent être initiées dans ce court laps de temps, esquissant ainsi le visage d’une "République sociale, démocratique, laïque et universelle".
Liberté, égalité, fraternité. Un même fil conducteur, en 1871 comme en 1789 ou 1848 !
Surtout, la mobilisation populaire parisienne démontra une fois encore qu’un soulèvement contre l’injustice, l’oppression, la domination d’une classe bourgeoise étaient possibles, que "ceux d’en bas" pouvaient prendre en mains la conduite "de la Cité" en développant des formes de démocratie directe combinées au suffrage universel [2].
C’est là un enseignement majeur de cette séquence historique qui ne peut être gommé par l’épilogue d’une cruelle défaite.
Certes, le 21ème siècle n’est pas le 19ème siècle !
Certes, il serait vain de tenter d’imiter mécaniquement un épisode majeur de l'histoire des révolutions. Mais la mémoire subsiste et peut contribuer à féconder utilement le présent...
Finalement, le meilleur hommage à la Commune revient à s’inspirer de son audace créative pour dégager aujourd’hui une voie originale émancipatrice, en tenant compte des défis concrets de notre époque, en matière démocratique et sociale, mais aussi des enjeux posés par une crise écologique globale lourde de menaces pour l’avenir de l’humanité.
L’héritage de la Commune est ce que ses héritiers en feront, et c’est à travers les luttes actuelles et à venir qu’elle demeurera vivante.
[1] "Mais abstraction faite de ce qu’il s’agissait d’un simple soulèvement d’une ville dans des conditions exceptionnelles, la majorité de la Commune n’était pas socialiste, et ne pouvait pas l’être. Avec une faible dose de bon sens, elle aurait pu néanmoins obtenir avec Versailles un compromis utile à toute la masse du peuple, seule chose qu’il était possible d’atteindre à ce moment-là. En mettant simplement la main sur la Banque de France, elle aurait pu effrayer les Versaillais et mettre fin à leurs fanfaronnades".
Karl Marx, lettre à F.Domela Nieuwenhuis, 22 février 1881, in Karl Marx & Friedrich Engels, Inventer l’inconnu, textes et correspondance autour de la Commune, La Fabrique, Paris, 2008, page 289.
[2] Qui excluait les femmes !
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