08 juin 2017
Périlleuse croisée des chemins
Lassitude et résignation semblent être les termes les plus appropriés pour caractériser la bataille des élections législatives en France.
Lassitude, car avec l'élection présidentielle, les citoyens français sont confrontés à une campagne électorale ininterrompue qui s'étale sur plusieurs mois.
Résignation, car Emmanuel Macron a été élu le 7 mai, et le matraquage médiatique en faveur du jeune monarque a atteint des sommets rarement atteints dans l'histoire de la Vème République. Tout est orchestré par la caste oligarchique pour que le nouveau président obtienne une confortable majorité à l'Assemblée nationale, afin qu'il puisse «légitimement mettre en oeuvre sa politique». Dans le même temps, ses adversaires sont quotidiennement dénigrés, en particulier -qui s'en étonnera encore- la France insoumise et son porte-parole Jean-Luc Mélenchon, confrontés à un bashing de tous les instants !
Cette configuration malsaine risque de favoriser une abstention massive.
Ainsi, selon certaines «études d'opinion», près d'un électeur sur deux pourrait éviter de se déplacer au premier tour, ce 11 juin ! Une situation totalement inédite pour un scrutin de ce type, dans l'Hexagone [1].
«La République En Marche» (LREM) paraît en état de conquérir une majorité parlementaire, d'autant que de nombreuses personnalités, de «gauche» comme de «droite», se bousculent pour en être ! Dans certaines circonscriptions, il y a parfois 3 candidats qui clament leur soutien (futur) au nouveau président installé ! Dans cette bousculade opportuniste, les projets et les enjeux sont largement relégués au second plan. Et la presse, totalement acquise à la «cause macronniste», se garde bien d'élever le niveau des débats.
Seuls les Insoumis, présents dans pratiquement toutes les circonscriptions, s'efforcent de mener une campagne de fond, autour d'un même programme politique, celui de «l'Avenir en commun». Mais dans le concert dithyrambique en faveur du pouvoir «jupitérien» aujourd'hui en place, et dans un climat d'hostilité envers les opposants soigneusement entretenu, il n'est guère facile de faire entendre une musique originale.
Pourtant, l'heure est grave. Macron et son gouvernement veulent réaliser ce qui avait été annoncé en son temps par Fillon : mener une blitzkrieg contre le monde du travail. Ils veulent mettre à profit la période estivale pour gouverner par «ordonnances» et imposer une casse sans précédent du code du travail, c'est-à-dire des droits sociaux des salariés.
Cette méthode, inspirée d'une Thatcher (modèle revendiqué du monarque), a naturellement pour but d'infliger une lourde défaite au mouvement syndical et de briser toute résistance, afin d'avoir les coudées franches pendant le quinquennat pour pérenniser une politique virile de droite, conforme aux souhaits des instances dirigeantes de l'UE !
Ce qui ne fera qu'accroître la désespérance populaire ambiante et pourrait s'avérer, à terme, une aubaine pour le parti de la haine, le FN ! Et à ce moment, il deviendra difficile de construire un «barrage» supplémentaire pour l'empêcher de conquérir le pouvoir !
C'est donc peu dire que les prochains jours seront décisifs. Il s'agit clairement d'empêcher un tsunami de LREM (et de ses innombrables alliés de circonstance) ; ce qui nécessite l'envoi à l'Assemblée nationale d'un maximum de députés déterminés à s'opposer aux intérêts du capital et qui ne reculeront pas devant une confrontation avec l'oligarchie ; des députés bien décidés à défendre les «biens communs» et à matérialiser une alternative authentique, contre vents et marées.
Un défi de taille pour la France insoumise. Et un combat qui va devoir s'inscrire dans la durée tant la difficulté de la tâche s'annonce titanesque...
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[1] Les «Français de l'étranger» ont déjà eu l'occasion de se rendre aux urnes dimanche dernier, dans leurs 11 circonscriptions, avec un taux de participation de... 19,1 % ! Du jamais vu, même si dans le passé, cet électorat en exil volontaire ne s'est jamais beaucoup impliqué dans des élections organisées dans son pays d'origine...
Quelle Unité ?
La question d'un «rassemblement de gauche» est à nouveau revenu sur le devant de la scène durant cette campagne électorale. Une discussion portée notamment par le PCF, un parti qui dispose d'élus et qui est toujours soucieux de les sauvegarder, au prix d'accommodements parfois discutables.
On se souvient encore de 2012, et des alliances «à géométrie variable» (avec des partenaires différents, d'une circonscription à l'autre) qui ont notamment contribué à rendre « illisible» la stratégie du «Front de gauche», dans les législatives comme dans d'autres élections ultérieures.
Certains champions de «l'unité» ont évidemment saisi l'occasion pour pointer du doigt le «sectarisme» de la France Insoumise et de Jean-Luc Mélenchon.
Une polémique contre-productive destinée à occulter les faits :
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La ligne de conduite insoumise avait été annoncée de longue date. Une seule campagne avec un seul programme, pour la présidentielle comme pour les législatives, afin de garantir crédibilité et cohérence ! Par conséquent, personne ne pouvait être surpris par la confirmation de cette orientation...
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Dès le début, la France Insoumise a voulu s'émanciper de la tutelle des partis et a constitué un «mouvement», ouvert. Tout le monde pouvait donc la rejoindre et ainsi se «regrouper», en ce y compris les différentes formations politiques (des communistes, des socialistes, des écologistes et beaucoup d'autres n'ont d'ailleurs pas hésité à franchir ce pas). Et il n'était aucunement exigé de celles-ci un renoncement à leur indépendance ou à leur identité politique ! Seuls un accord programmatique était logiquement demandé ainsi qu'un engagement des futurs parlementaires à respecter ce pour quoi ils sont élus...
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En ces temps de confusion politique, à un moment où le concept même de «gauche» est démonétisé -un discrédit consolidé par le désastreux quinquennat du «socialiste» François Hollande- le but n'est plus de rassembler des étiquettes et des logos, mais de «fédérer le peuple» autour d'objectifs programmatiques précis, tels que définis par exemple dans «l'Avenir En Commun». Le temps des «tambouilles politiciennes» est révolu, et les progressistes qui ne veulent pas y renoncer commettent une erreur qui ouvre toujours plus un boulevard à Le Pen et à ses troupes.
Quel que soit le résultat obtenu ces 11 et 18 juin, et après des ajustements qui seront définis suite au bilan qui sera tiré, les Insoumis sont déterminés à poursuivre le travail entamé pour construire une force politique d'un type nouveau, seule à même de relever les défis d'un monde dangereux, enfermé dans une trajectoire mortifère...
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