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19 décembre 2020

IMAGINAIRE(S) [119]

 

tardi.jpg"Certain soir, à l’heure où l’hiver commençait à noyer les rues dans les ténèbres, je vis une ombre s’aventurer prudemment le long des murs, à l’abri des bornes cavalières. L’homme portait un haut de forme et une redingote. Je crus reconnaître le dandy que nous avions croisé dans l’escalier de Chardon.

– Holmes !

Dans la minute qui suivit, il se trouvait près de moi, le visage tendu dans cette expression de chien de chasse qu’il prenait en ces circonstances. En bas, l’homme, comme prévu, avait pénétré dans la maison de l’emballeur.

– C’est lui, dit Holmes.

Il endossa sa jaquette, mais tandis qu’il enfilait ses bottes je remarquai de subtils mouvements de l’obscurité, dans la rue : des ombres se déplaçaient de porte en porte.

– Il y a des gens Holmes.

– Je descends. Vous attendez là.

– Mais Holmes.

– Vous attendez. Si j’ai besoin de vous, je vous appellerai, vous le savez !"

 

[René Reouven, Le détective volé, 1988]

18 décembre 2020

IMAGINAIRE(S) [118]

tardi.jpg"Je comprends votre réaction, Watson. J’ai éprouvé la même chose que vous. Mais ce n’est pas possible. Comment pourrions-nous arrêter Moriarty? Quelles charges avons-nous contre lui ? Au vu de quelles preuves pourrions-nous l’inculper? Mes soupçons, dans le fond, ne reposent que sur des déductions et des suppositions, et si je devais en faire part à Lestrade, il me rirait au nez. Moriarty, lui, ne rirait pas. Il ferait intervenir ses conseillers juridiques qui obtiendraient sa libération sans condition, après quoi sa vengeance serait terrible. Non, nous pouvons déjà nous estimer heureux de connaître le monstre que nous devons combattre, et de savoir qu’il accepte ce duel contre moi. Observons les règles de l’honneur, et poursuivons notre avantage. Croyez-moi, Watson  –c’est là que se trouve notre seul espoir d’écraser la tyrannie de cet homme."

 

[Michael Dibdin, L’ultime défi de Sherlock Holmes, 1978]

 

 

17 décembre 2020

IMAGINAIRE(S) [117]

 

tardi.jpg"Le Dr Freud fit lentement le tour de son bureau et posa une main petite et douce sur l’épaule de mon ami.

– Je peux mettre fin à cette contrainte  -du moins pour un moment. Asseyez-vous, je vous prie.

Il indiqua le fauteuil que Holmes venait de quitter et s’assit sur le bord du bureau. Holmes obéit sans dire un mot et attendit, l’air infiniment malheureux et désespéré.

– Connaissez-vous quoi que ce soit à la pratique de l’hypnotisme ? demanda Freud.

– J’en ai quelques notions, répondit Holmes d’un ton las. Avez-vous l’intention de me faire aboyer comme un chien ou marcher à quatre pattes ?

– Si vous acceptez de coopérer, dit Freud, si vous voulez bien me faire confiance, je peux atténuer cet irrésistible besoin pendant un certain temps. La prochaine fois qu’il se fera sentir, je vous hypnotiserai à nouveau. De cette façon, nous réduirons artificiellement votre toxicomanie jusqu’à ce que la chimie de votre organisme parachève l’opération.

Il parlait lentement, en s’efforçant d’atteindre et d’apaiser la vague de panique qui montait en Holmes.

Celui-ci l’observa un long moment lorsqu’il eut fini de parler puis, haussant brusquement ses épaules voûtées, il acquiesça, tout en feignant l’indifférence.

Le Dr Freud, me sembla-t-il, réprima un soupir, puis il s’approcha de la fenêtre en saillie et ferma les rideaux, plongeant ainsi la pièce dans la pénombre. Il se retourna alors vers Holmes qui n’avait pas sourcillé, et déclara, en attirant une chaise et en s’asseyant en face de lui :

– Maintenant je veux que vous vous redressiez et que vous ne quittiez pas ceci des yeux.

– Tout en parlant, il avait sorti de la poche de son gilet la chaîne de montre que j’avais aperçue plus tôt, et il se mit à la balancer lentement d’avant en arrière."

 

[Nicholas Meyer, La solution à 7 %, 1975]