01 décembre 2020
IMAGINAIRE(S) [101]
"Il resta étendu là jusqu’à ce qu’il fût certain que la cour fût vide. Il pensa à l’amour de sa vie et imagina qu’elle était avec lui, la tête reposant sur sa poitrine, lui disant combien elle aimait les sonnets qu’il composait pour elle.
Il se remit enfin debout. C’était dur de marcher ; chaque pas lui déchirait de douleur les entrailles jusqu’à la poitrine. Il se tâta le visage ; ce dernier était couvert de quelque chose de sec qui ne pouvait être que du sang. De la manche, il se frotta le visage avec furie jusqu’à ce que le sang frais coulât des écorchures sur une peau douce. Il se sentit mieux du coup, et le fait qu’il n’ait pas pleuré le fit se sentir encore mieux."
[James Ellroy, Lune sanglante, 1984]
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30 novembre 2020
IMAGINAIRE(S) [100]
"− Siggie Reuhr est probablement capable de bien des choses, mais d’un meurtre, ça, non. Comment a-t-il été descendu, le type ?
− A coup de hache.
− Alors, il y a eu du sang ?
− Je pense bien !
− Alors vous pouvez rayer Siggie de votre liste. Le poison, je ne dis pas. Mais une hache ! Du sang ! C’est tout juste si Siggie ne tournait pas de l’œil s’il lui arrivait de se couper le doigt sur la tranche d’un grand livre. La vue du sang le rendait malade. Non, inspecteur, si votre type s’est fait descendre à coup de hache, croyez-moi, ce n’est pas du côté de Siggie qu’il faut chercher."
[Ed McBain, La hache, 1964]
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29 novembre 2020
IMAGINAIRE(S) [99]
"Fossoyeur et Ed Cercueil étaient installés en bras de chemise à la table la plus éloignée du fourneau, leur veston accroché au dossier de leur chaise. Les pardessus, surmontés de leurs vieux feutres noirs déformés, étaient accrochés à un clou, près de la porte. La sueur perlait sur leur crâne laineux aux cheveux coupés court et ruisselait sur leur visage noir. Les cheveux d’Ed Cercueil étaient poivrés et gris. Partant de l’oreille droite, une cicatrice en forme de croissant barrait le crâne de Fossoyeur, souvenir du coup de crosse qu’Ed Cercueil, aveuglé par du vitriol, lui avait assené. Plus de trois ans s’étaient écoulés depuis cette sombre histoire. Les médecins avaient pratiqué sur le visage brûlé à l’acide d’Ed Cercueil de nombreuses greffes de peau prélevées sur ses cuisses. Mais cette peau, d’un ton plus clair que celle de son visage ayant été greffée par pièces et morceaux, Ed Cercueil semblait avoir passé entre les mains d’un maquilleur d’Hollywood qui lui aurait fait la tête de Frankenstein. Quant à la face bossuée de Fossoyeur, rien ne la distinguait de celles des innombrables bagarreurs de Harlem."
[Chester Himes, Imbroglio negro, 1959]
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