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05 février 2014

Syndicalisme et politique : les liaisons dangereuses ?

claude rolin.jpg

La décision prise par Claude Rolin de rejoindre le CDH pour les élections européennes a été accueillie froidement par de nombreux militants et cadres de la CSC.

C’est positif !

Toutefois, l’argumentation mobilisée pour étayer la critique est parfois discutable.

L’ « indépendance syndicale »,  un principe fondamental, est brandie comme argument d’autorité par les tenants d’une stricte séparation entre le « social » et le « politique ».  Mais peut-on séparer arbitrairement ce qui relèverait des seules compétences du mouvement syndical et ce qui relèverait des seules prérogatives du monde politique ? A l’évidence, non. Les organisations syndicales interviennent en permanence sur le terrain politique, et les politiques s’occupent des « matières sociales »,  pas toujours de manière positive faut-il le préciser ! Emploi, fiscalité, pouvoir d’achat sont ainsi des priorités  affirmées pour les uns et pour les autres.

Certes, l’autonomie syndicale ne peut être remise en cause, car les syndicats organisent de manière plurielle la majorité des salariés, et ils ne peuvent être réduits à un relais privilégié d’une formation politique en particulier. Pour autant, cette indépendance n’est pas synonyme d’apolitisme ou de désintérêt obligé pour la sphère institutionnelle. Il convient de rappeler, pour les distraits, que les travailleurs et les syndicalistes sont également des citoyens. Ils ont parfaitement le droit  -pour ne pas dire le devoir !-  de s’engager aussi dans des partis ou sur des listes électorales. A cet égard, il n’y a rien à redire à Claude Rolin !

Ce qui interpelle ici, c’est évidement la préférence  de l’ancien secrétaire général du premier syndicat du pays.  La famille politique qu’il intègre (CDH-PPE) est située à droite et considère qu’il n’y a pas d’autre réponse à la crise du capitalisme que la mise en oeuvre de politiques d’austérité ! Comment peut-on en tant que syndicaliste contester ces choix, et puis rejoindre ceux qui les portent ?

C’est d’ailleurs l’occasion de souligner qu’il n’est pas pertinent de dénoncer uniformément  tous les partis qui accueillent des syndicalistes en leur sein, comme s’il s’agissait d’une faute partagée. Assimiler des formations politiques responsables de la régression sociale, et celles qui la combattent, relève de la confuse thématique du « tous les mêmes ».  Le poujadisme n’est jamais loin de cette vision unilatérale !

Or, dans les faits, il y a des partis qui, au cours des trente dernières années, ont planifié des sauts d’index, manipulé celui-ci à plusieurs reprises, bloqué les salaires, privatisé les entreprises publiques, allongé les carrières, organisé la chasse aux chômeurs (à défaut de la chasse au chômage !), ou ratifié les traités européens (qui sanctuarisent l’austérité). Et il y a des partis qui ont été de tous les combats contre ces politiques austéritaires et mortifères pour la population, en premier lieu les luttes impulsées par les syndicats.

L’engagement politique et l’engagement syndical ne sont nullement contradictoires,  mais il n’est évidemment pas interdit de faire preuve de cohérence dans les choix posés…

3482978_3_056e_angela-merkel-le-23-septembre-a-berlin-lors_217d5aa78a85a0865741e856035844e7.jpgPour en revenir à Claude Rolin, l’adhésion  au CDH et,  par voie de conséquence, au PPE (qui réunit, par exemple, les partis d’Angela Merkel, Nicolas Sarkozy ou Silvio Berlusconi !),  ne relève certainement pas d’une étourderie. L’intéressé a lui-même évoqué le « cœur » et la « raison » pour le justifier ! Il s’agit d’un choix politique assumé, qui est peut-être le révélateur (tardif) d’une trajectoire ou d’orientations politiques, qui ont souvent enfermé le mouvement syndical dans une certaine inertie face à des gouvernements qui s’en prennent durement aux travailleurs et aux allocataires sociaux, au nom des intérêts et des tabous du capital.

Indéniablement, de ce point de vue, la réorientation soudaine ( ?) de la carrière du désormais ex-dirigeant de la CSC  est assurément un mauvais signal. Elle alimentera encore un peu plus les soupçons de collusion et les délires paranoïaques propagés par les  détracteurs patentés  du syndicalisme. Le lecture de nombre de commentaires sur les réseaux sociaux et les forums illustre déjà de manière édifiante cette crainte.

Fort heureusement, beaucoup d’autres militants, du terrain notamment, sont plus conséquents dans leurs engagements et leurs actes. Eux ne défendent pas des convictions à géométrie variable, mais gardent un même cap , quel que soit le champ investi !

Engagement syndical et engagement politique ne constituent donc pas un dangereux défi à la raison, et ils peuvent au contraire être parfaitement complémentaires.

Après tout, pour bien marcher, il faut savoir utiliser ses deux jambes !

 

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03 février 2014

Rude campagne en perspective !

teletubbies_02.jpgNous ne vivons pas dans le monde enchanté des Télétubbies, mais dans une société capitaliste en crise, où les politiques menées par les libéraux de droite et de « gauche » s'enfoncent dans une impasse.

Indubitablement, dans un tel contexte, la campagne électorale sera extrêmement âpre. Les petites phrases assassines, les rumeurs, les anathèmes, les peaux de banane, les coups bas risquent d’éclipser les débats politiques de fond, qui devraient notamment porter sur les bilans, les programmes ou les enjeux du 25 mai prochain.

Pour la plupart, il ne s’agira pas tant de convaincre que de dénigrer les adversaires, afin de les disqualifier ! Une cible privilégiée semble d’ores et déjà désignée : la liste PTB-GO.

Sans surprise aucune, naturellement.

La gauche de gauche, marginale pendant longtemps, a souvent été confrontée à la condescendance amusée des partis installés. Mais cette fois, elle pourrait obtenir des élus, qui ne manqueraient pas de battre en brèche les consensus mous de la paresseuse bien-pensance rétro-libérale, ce qui perturberait la quiétude des assemblées parlementaires et des inamovibles députés qui y siègent. Les sourires goguenards se transforment maintenant en rictus un peu moins sympathiques. Haro donc sur ces impertinents qui s’invitent sur un terrain où ils n’étaient pas attendus par les tenants du désordre établi !

Les premiers indices de l’offensive qui va se déployer dans les prochaines semaines ont montré le bout de leur nez. L’accusation de « populisme » est déjà sur beaucoup de lèvres des conservateurs de tous les horizons, inquiets devant la perspective de l’émergence possible d’une force politique résolument située à leur gauche. Et leurs relais complaisants sont rapidement entrés en action.

Ainsi, il y a quelques mois, la RTBF était montée au créneau en programmant une émission consacrée au « populisme », où étaient pêle-mêle amalgamés Syriza et Aube Dorée (Grèce), le Front de Gauche, le NPA et le FN  (France), le Parti Populaire et… le PTB, chez nous (voir à ce sujet, mon billet paru sur ce blog : http://rouge-ecarlate.hautetfort.com/archive/2013/12/04/t... ).

Sur "les antennes" de cette même RTBF, était invité récemment (le jeudi 30 janvier) le porte-parole du PTB pour un face-à-face avec des représentants de la rédaction du JT. A cette occasion, les deux journalistes de service ont fait preuve d’une agressivité rarement manifestée lors de la venue de représentants des partis institutionnels. Lors de ce vigoureux interrogatoire, Raoul Hedebouw s’est même vu  sommé de dévoiler l’état des finances de son parti ! On imagine déjà la tête de Paul Magnette ou de Charles Michel, lorsqu’ils seront confrontés à un questionnement identique.  Ou plutôt, on ne l’imagine pas du tout, car l’audace de la presse vis-à-vis de ces « importants » a ses limites. Entre gens de bonne compagnie, il faut rester raisonnables, chers téléspectateurs !

Autre « anecdote » révélatrice : ce jour , La Libre Belgique donne la parole à un distingué politologue de l’ULB (accessoirement militant du PS), Pascal Delwit, qui évoque l’échec des tentatives d’émancipation du… XXème siècle, et qui épingle la « centralité » récurrente de Lénine dans les rangs de la « gauche radicale » !  Soit.

Mais rien de bien significatif, évidemment, sur la situation présente et les défis de l’heure, si ce n’est une formule traditionnelle (et lapidaire)  sur le caractère protestataire de partis qui ne proposeraient rien de concret ! Un peu bref pour un universitaire réputé, qui court les plateaux des télévisions pour commenter l’actualité politique. Mais lorsque « l’expertise » est au service des pouvoirs en place, le « libre examen » et la « rigueur scientifique » peuvent parfaitement s’accommoder de quelques entorses à la réalité…

A l’évidence,  cette malveillance « anti-anticapitalistes » de piliers du « journalisme de révérence » ou d’ « intellectuels organiques » du libéralisme et du social-libéralisme, n’est pas propre à la Belgique. En France, durant la campagne des présidentielles, le Front de Gauche et son candidat ont essuyé un feu nourri  des uns et des autres visant à les discréditer, de même Syriza en Grèce, lors des dernières élections législatives, en pleine déstabilisation de ce pays par la Troïka.

C’est dire si les puissants, qui étalent en permanence  leur arrogance et leurs certitudes, sont peut-être moins rassurés, aujourd’hui,  qu’ils ne l’affirment. C’est dire aussi que les combats à mener pour "transformer le monde et changer la vie"  ne sauraient faire l’économie de la confrontation idéologique.

La lutte pour rompre avec le capitalisme et proposer une solution de rechange passe aussi par la conquête de  l’hégémonie culturelle...

Tout, sauf une mince affaire !

 

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29 janvier 2014

Lettre à Paul Magnette, président ff du PS

paul magnette.jpgCher Paul Magnette,

Vous n’êtes pas seulement le bourgmestre de la ville de Charleroi, vous remplacez également à la tête du PS,  Elio Di Rupo, « empêché » pour les raisons que nous savons.

Après d’autres partis, le vôtre sacrifiera aussi à la tradition et organisera dans quelques minutes, au Botanique, un événement mondain où vous aurez l’occasion de présenter vos bons vœux.

Mais le contenu de votre discours  ne sera  peut-être plus une surprise, maintenant que vous avez accordé un entretien à La Libre Belgique (édition de ce matin), où vous livrez généreusement ce qui semble être la « substantifique moelle »  de votre message des temps présents.

Cette sortie médiatique a au moins le mérite de la clarté : comme Edith Piaf, vous ne regrettez rien !

Lorsque vous parlez du bilan du gouvernement dirigé par votre prédécesseur, vous semblez même euphorique. Fier en tout cas d’avoir effectué, je reprends votre formule, elle est forte,  le « dirty work » (le sale boulot) !

Je suis persuadé que les travailleurs et les allocataires sociaux qui subissent, depuis tant d’années,  le poids de la crise et son cortège de mesures d’austérité, apprécieront votre approche virile de la communication.

Ainsi, vous estimez que le PS a « pris ses responsabilités » et a « tenu ses engagements », d’où sans doute votre audace assumée. Pour vous, la politique menée n’était  pas une politique « de centre droit » mais une politique "centriste". Je ne vais pas discutailler sur le vocabulaire, mais ce qui est évident, et là nous sommes sur la même longueur d’ondes, ce n’était pas une politique de gauche !

Vous concédez, sur le bout des lèvres toutefois, que « certaines réformes » n’ont pas été réalisées de « gaité de cœur », comme par exemple la « limitation des allocations de chômage ». Démontrant par là votre sens certain de l'euphémisme...

Pour le reste tout va bien : le pays est « stabilisé », les finances publiques ont « tenu », il y a eu une « réforme bancaire », et la Wallonie dispose de son « Plan Marshall ». Pas un mot sur le niveau de pauvreté qui n’a jamais été aussi élevé et qui touche 15 % de la population, pas un mot sur les inégalités croissantes, pas un mot sur le véritable bilan anti-social de cette coalition gouvernementale dirigée par votre patron.

Mais vous avez beau asséner que les « politiques d’austérité de la commission européenne » ont été rejetées, les faits sont têtus. Les deux dernières années ont été douloureuses pour nos concitoyens, très douloureuses : plus de 22 milliards €  « d’économies » !  Une ardoise payée essentiellement par vos supposés électeurs, à la pleine satisfaction des grands groupes financiers, des grandes entreprises et des nantis. Car ceux-ci, en effet,  ne paient toujours quasiment aucun impôt, car les intérêts notionnels ont été préservés, car la Belgique reste un paradis fiscal pour les riches. Gérard Depardieu, l’ami de votre sympathique bourgmestre d’Estaimpuis, peut le confirmer avec un sourire carnassier. Tout ce beau monde a même bénéficié au cours de cette législature de nouvelles réductions de cotisations, c'est-à-dire en fait d’une baisse supplémentaire  du « salaire solidarisé » des travailleurs.

Lesquels doivent se contenter d’une indigeste soupe à la grimace : les salaires sont bloqués et les syndicats n’ont plus de marge pour négocier des conventions collectives fructueuses. L’index, lui, a été soldé. Il est vrai qu’il n’est plus à une manipulation près ! Et que dire des chômeurs, sinon qu’ils sont emportés par la tourmente de l’austérité : la dégressivité de leurs maigres allocations est renforcée et, dans moins d’un an,  55.000 d’entre eux iront frapper à la porte des CPAS, ce qui inquiète jusqu’à vos proches de la direction de la FGTB !

Cerise sur ce gâteau particulièrement épicé : vous avez ratifié, sans état d’âme particulier, le « Traité budgétaire européen » (TSCG),  véritable Cheval de Troie de l’ultra-libérale UE actuelle,  qui représente une nouvelle déclaration de guerre aux peuples, condamnés à  subir pendant de nombreuses années encore une politique « austéritaire » très dure,  destinée à sauvegarder les intérêts des banques, la rentabilité de la finance, les profits de la bourgeoisie…

Enfin, selon vos dires, vous aimeriez voir émerger, au lendemain du scrutin, un « Olivier » (coalition PS-CDH-Ecolo) au niveau fédéral. Vous restez néanmoins prudent, et pour cause. Ce positionnement électoraliste et taquin ne bluffe plus les observateurs attentifs. Car votre partenaire privilégié est, en réalité, le MR,  avec qui le PS est associé aux affaires depuis longtemps.

Ce n’est pas le « premier citoyen » de la plus grande ville de Wallonie qui me contredira, vous qui êtes « marié », pour le meilleur et pour le pire, avec les amis d’Olivier Chastel.

Cher Paul Magnette,

Il y a un siècle, « l’Internationale socialiste » sombrait. Ses différentes composantes se regroupaient en rangs serrés derrière leur propre classe dominante pour envoyer les travailleurs à la guerre. De chair à profits le prolétariat devenait aussi de la chair à canons !

Aujourd’hui, cent ans plus tard, les mêmes partis de cette même « Internationale » ont capitulé partout devant la crise du capitalisme, et ils endossent ,« fièrement » à vous entendre, des politiques de destruction de l’Etat social et de démantèlement des plus belles conquêtes du mouvement ouvrier !

Je pense que vous pourrez aisément comprendre que la coupe est pleine. Et vous n’êtes pas sans savoir que beaucoup veulent se détourner d’une formation politique qui les mène en bateau depuis trop longtemps déjà. Des citoyens(ennes),  des travailleurs(euses), des militant(e)s du mouvement syndical.

Certes, face à la montée d’une « gauche de gauche » qui se rassemble, , vous allez nous interpréter vos vieux tubes, en premier lieu celui du « vote utile ». Mais le disque commence à être rayé, et de plus en plus de personnes comprennent que le « moindre mal » que vous prétendez incarner est souvent le plus court chemin vers le pire. Ce qui se passe en France, avec votre camarade François Hollande, illustre tristement cette réalité, dans un pays où le PS au pouvoir n’a même pas l’alibi de devoir composer avec des gouvernements de coalition !

En cette période finissante de vœux, je ne vous souhaiterai donc rien de particulier.

Je voudrais simplement vous dire ma conviction de renforcer la gauche en votant… vraiment à gauche !

Ce qui ne passe pas par un appui au PS, mais par un soutien à une gauche qui est restée fidèle à la défense des intérêts populaires fondamentaux, une gauche qui n’est pas au service des puissants, une gauche qui assume les alternatives indispensables  face aux recettes de ce néo-libéralisme, qui bénéficie tant de votre indulgence active.

Il ne faudra pas manquer le rendez-vous du 25 mai, nous sommes d’accord.

Mais ce sera celui-fixé par la liste PTB-GO !

 

Cordialement,

 

Alain Van Praet

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