26 juillet 2014
Périls
1. La Belgique est un Etat fédéral. Chaque entité fédérée dispose ou disposera prochainement de son propre gouvernement. Les majorités respectives des communautés et régions seront asymétriques. Mais il existe (objectivement) une convergence : la mise en œuvre de politiques d’austérité, qui seront douloureuses pour la population et qui frapperont durement les salariés, les chômeurs, les malades ou les services publics.
2. Les « jeux » politiciens post-électoraux ne doivent pas occulter une réalité : les pires « ennemis » aujourd’hui étaient les meilleurs « amis » hier. Socialistes et libéraux s’épient maintenant comme chiens et chats, mais ils gouvernaient ensemble il y a peu. Ils sont d’ailleurs encore associés à différents niveaux de pouvoir, comme les provinces ou les communes ! Et il est évidemment loin d’être exclu qu’ils se retrouvent à l’avenir !
3. Pour autant, il faut éviter de sombrer dans les analyses caricaturales. Un gouvernement NVA-MR n’est pas un gouvernement PS-CDH. La manière d’imposer des mesures austéritaires et l’ampleur de celles-ci ne seront pas identiques. L’histoire de ces partis, les liens qu’ils entretiennent avec le mouvement syndical ou le tissu associatif, ne sont pas les mêmes. Ainsi, la position des uns et des autres vis-à-vis de la concertation sociale, et du « modèle belge » qui en découle, varie. Lorsque l’accord gouvernemental de la coalition kamikaze sera connu, nous pourrons mesurer ce qui les distingue. Il serait donc inopportun de banaliser ce qui se joue actuellement.
4. Il va sans dire qu’un gouvernement orienté à «droite toute » répond aux attentes d’un patronat demandeur de politiques ultra-libérales. Même si les dominants auraient préféré y associer également le CDH, afin d'élargir l’assise de la future équipe gouvernementale au cœur d’une Wallonie frondeuse. Mais il était assurément trop compliqué de marier le parti francophone le plus attaché à la Belgique avec un parti nationaliste qui milite pour la disparition de celle-ci ! D’autant que le PS a habilement manœuvré en faveur de la constitution rapide d’exécutifs à Bruxelles et en Région wallonne, histoire de contrarier les manigances de Michel, Reynders et consorts...
5. La question nationale risque de connaitre un regain d’explosivité. Croire qu’un gouvernement avec une forte présence de la NVA (hégémonique en Flandre), mais ultra-minoritaire au sud du pays, va garantir la paix institutionnelle pendant 5 ans, est une vue de l’esprit. La mise en œuvre de la sixième réforme de l’Etat, les contradictions qu’elle génère, les nouvelles exigences qui en découleront, les liens étroits entre l’économique et le communautaire, les traditionnels impondérables irrationnels de ce royaume, seront autant de sources d’instabilité.
6. Et puis, il y aura l’épreuve de la lutte des classes. Face à la nouvelle déferlante d’austérité (au minimum, 17 milliards € d’économies supplémentaires à l’horizon 2019), la résistance sociale présentera probablement un visage et une vigueur différents en Wallonie et en Flandre. D’autant que dans le sud, les responsables syndicaux devront moins ménager leurs « amis » soudainement relégués dans l’opposition au niveau fédéral. On se souvient que cet écart de détermination combative, déjà constaté dans le passé, par exemple lors de la « Question royale » ou de la grève générale de 60-61, avait alimenté la revendication du « fédéralisme et des réformes de structure anticapitalistes ». Qu’en sera-t-il demain ? Une accentuation de la marche vers le confédéralisme, mais cette fois sans la moindre perspective transformatrice de la société ? A l’évidence la responsabilité de la gauche, en terme de débouché et de mots d’ordre, sera grande. Et l’inquiétude est de mise, car entre le Charybde d’une social-démocratie totalement reconvertie au social-libéralisme et d’ une FGTB où le « Renardisme » est un lointain souvenir, et le Scylla d’une « gauche de gauche » dominée par un PTB anachroniquement « belgicain », la voie est ténue. Il faudra pourtant bien plus qu’un discours général sur l’unité, dans les mois à venir. Encore faut-il comprendre que la prise en considération d’un principe démocratique essentiel comme le « droit des peuples à l’auto-détermination » n’est pas nécessairement un obstacle pour la solidarité des travailleurs…
7. La prochaine période, à ne pas douter, sera déconcertante et animée. A la gauche -digne de ce nom- de contester pied à pied les politiques socialement régressives qui seront déployées à tous les étages de l’Etat Belgique. Les coups les plus durs et les plus frontaux viendront assurément de la rue de la loi, à laquelle il faudra indubitablement opposer la loi de la rue. Mais la complexité de la conjoncture à venir exigera également des solutions adaptées à nos caractéristiques « nationales » . Il n’y aura finalement pas d’autres réponses pertinentes que celles résultant d’une analyse permanente et concrète des situations concrètes…
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18 juin 2014
Brasil : (beaucoup) de jeux, (peu) de pain
Jouons le jeu.
Parlons football.
Sans soulever les aspects pernicieux d’un business pour le moins fructueux. Sans brocarder les salaires indécents des stars du ballon rond. Sans évoquer la maffia des paris et les matchs truqués. Sans ergoter sur le phénomène de la corruption. Sans pointer les problèmes de dopage. Sans chicaner sur la surenchère nationaliste et les délires cocardiers. Sans ricaner au sujet de la famille royale qui est "à fond" derrière "notre équipe".
En ignorant la violence dans et autour des stades. En ne dissertant pas sur le sport professionnel comme arme idéologique pour les dominants. En laissant de côté toute éthique. Et en passant sur les investissements hallucinants de ce « Mundial », alors que le peuple brésilien vit majoritairement dans le plus grand dénuement !
Donc, la Belgique a battu l’Algérie dans son match d’ouverture.
2-1 !
Après avoir été mené suite a un penalty justement sifflé.
Ce fut dur, très dur. Les supporters ont eu chaud, très chaud. Plus que les joueurs qui ont pourtant évolué sous un soleil de plomb.
Tout le monde est maintenant soulagé. Le sélectionneur national affiche avec aplomb une belle sérénité. Les "Diables" titularisés pour cette première rencontre sont heureux. Les sponsors boivent du petit lait, ou plutôt de la Jupiler (car ils savent "pourquoi" !).
Heu-reux, on vous le répète en boucle dans tous les flashs d’information… Qu'on se le dise.
Pourtant, les observateurs « neutres » sont unanimes : ils n’ont pas très bien joué.
Il sera donc impératif de s’améliorer pour la suite de la compétition.
Car dès dimanche prochain ce sera la Russie. Ensuite la Corée et, en huitième de finale, -si huitième de finale il y a !- il faudra plus que probablement faire face au Portugal ou à l’Allemagne, l’une des (habituelles) grandes favorites des coupes du monde.
Pour le reste, les premières confrontations de ce grand raout footballistique planétaire ont plutôt été plaisantes. Avec des buts, du spectacle, mais aussi… des décisions arbitrales parfois curieuses.
Histoire d’éviter toute surprise et de garantir aux grandes « nations » (et aux grands marchés) un long parcours ?
Allez, je sors, parce que je sens que je vais à nouveau persifler.
Chassez le naturel (critique), il revient au galop.
Rendez-vous pour le Tour de France…
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11 juin 2014
La fête ? Oui, mais...
Enfin ! Enfin, tout va changer...
Terminées les considérations oiseuses sur une météo perturbée. Terminés les colloques cathodiques entre Pascal Vrebos et Albert le deuxième. Terminées les visites hebdomadaires de Bart De Wever chez le roi. Terminées les polémiques concernant la formation des majorités politiques régionales. Terminés les inquiétants rapports de la Banque nationale. Terminés les bavardages sur l’actualité tumultueuse.
Place à la coupe du monde de football, la seule et l’unique, celle qui se déroulera au Brésil, pays du ballon rond par excellence.
Bientôt les Diables Rouges entreront en piste, pour leur marche triomphale vers le titre suprême.
D’accord, c’est une anticipation audacieuse, mais la RTBF y croit. Elle qui a mobilisé les (maigres) moyens financiers dévolus au service public pour suivre cette épopée.
RTL-TVI ne sera d’ailleurs pas en reste et assurera également une couverture quotidienne de l’événement, tout comme nos amis français ne rateront pas un épisode des aventures trépidantes des tricolores, en quête d’un deuxième couronnement.
64 matchs -pas un de plus pas un de moins !- , en un mois ! Overdose annoncée, nirvana footballistique assuré. Les Jupilers (« les supporters savent pourquoi ! ») sont déjà au frais dans les réfrigérateurs. Les klaxons des automobiles sont prêts à être actionnés. Les discussions acharnées vont pouvoir démarrer.
L’orgie festive frappe à nos portes. Que les grincheux passent leur chemin, ruminent leurs griefs dans leur cabanon et, surtout -surtout !-, évitent de venir perturber la joie collective.
Oubliés les tracas de la vie quotidienne et les affres de la politique, l’euphorie est maintenant exigée de chacun et de chacune.
Soit.
Attention. Voilà que l’on me glisse à l’instant une information de dernière minute : ah, il s’agit d’une nouvelle restructuration d’entreprise, celle du groupe Delhaize. 14 magasins seraient menacés de fermeture, 2500 emplois pourraient être supprimés., des efforts supplémentaires du personnel seraient requis.
La terre continue donc à tourner autour du soleil et le rouleau compresseur du capitalisme à écraser les travailleurs ?
Bon sang, la réalité ne va quand même pas venir gâcher une fête programmée de si longue date !
Déjà que le peuple brésilien semble peu enclin à se réjouir des dépenses fastueuses engagées au détriment de son bien-être social !
Il y a décidément peu de place pour l’insouciance sur cette planète. Du moins, tant que nous vivrons dans des sociétés de classes…
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