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11 janvier 2019

Emploi : 2019 commence sur une fausse note !

 

téléphone rouge.pngNouvelle vague de départs chez Proximus (ex-Belgacom) !

Ce n'est pas la première et l'on doute que ce soit la dernière !

Cette fois, 1.900 membres du personnel devraient perdre leur job dans les prochains mois, alors que le niveau de l'emploi n'a cessé de dégringoler depuis 3 décennies : fin des années 80, l'ancienne RTT employait près de 30.000 personnes ; aujourd'hui, il en reste un peu plus de 13.000 !

Cette tendance lourde, connue de tous, n'a toutefois pas empêché l'expression de réactions incrédules de nombreux «acteurs politiques» qui répètent en boucle, dans les médias, n'avoir «rien vu venir», alors que l'Etat est toujours l'actionnaire majoritaire de l'opérateur historique des télécommunications ! Bien entendu, la menace de «licenciements secs» dans une société anonyme «de droit public», en pleine année électorale, n'est vraiment pas un timing idéal pour les partis qui se sont succédé au pouvoir et qui portent une responsabilité dans la «libéralisation» du secteur et le processus de privatisation de l'entreprise !

Et dans la galaxie syndicale ? Pas mieux ! CSC-Transcom et CGSP-Telecoms ont d'abord affiché leur surprise, avant d'exiger des «éclaircissements» du top management de Proximus dans le cadre de l'ouverture d'une «concertation». Sous la pression de leurs affiliés mécontents, les «organisations syndicales représentatives» appellent finalement à la grève ce mardi 15 janvier, le jour même où ils devraient rencontrer la direction pour déterminer... un calendrier de négociations !

Du côté patronal, on a eu droit aux couplets traditionnels sur les «évolutions technologiques» (en l'occurrence ici, le «digital»), la «concurrence de plus en fibre.jpegplus rude», ou les contraintes économiques de la globalisation financière, toutes «réalités» qui rendraient indispensables une restructuration supplémentaire, rebaptisée pour la circonstance «transformation» ! La créativité des «communicants» n'a décidément pas de limites...

Bref, chaque intervenant connaît sa partition, et au delà d'une phase transitoire nécessaire à la gestion du choc social, surtout pour les principaux intéressés, tous espèrent sans doute engager une discussion afin de pouvoir adopter un «plan social» qui permettra de dégager sans trop de remous le personnel ciblé : les agents statutaires, âgés et qui n'ont pas les qualifications suffisantes pour affronter les métamorphoses du monde numérisé ! Gageons que l'accent sera mis sur le «volontariat», tant en matière de reconversions internes que de départs, sous une forme ou une autre : congé préalable à la retraite, pré-pension ou pension, voire réorientation vers d'autres entreprises ou administrations. Mais il n'est toutefois pas assuré que cet exercice suffise à éviter la distribution de C4. De toutes les façons, quelles que soient les modalités négociées, il y aura des pertes d'emplois !

Ce scénario-catastrophe s'inscrit sans surprise dans une triste continuité, que d'aucuns feignent d'ignorer ou d'oublier.

L'occasion de rafraîchir les éventuelles mémoires défaillantes.

  • 21 Mars 1991 : la «loi sur l’autonomie de gestion des entreprises publiques» est adoptée. Le ver de la libéralisation et de la privatisation entre alors dans le fruit des «entreprises publiques autonomes» ainsi créées. Elle répond aux directives d'une l'Union européenne désireuse de briser les «monopoles du secteur public». Les dirigeants syndicaux de l’époque réagissent de manière timorée, quand ils ne se réjouissent pas de cette modification législative qui, à leurs yeux, ne peut que renforcer ces entreprises qui seront confrontées à une concurrence impitoyable.

  • 1992-1994 : Belgacom voit officiellement le jour et les premiers changements internes importants ne tardent pas. Un système d’évaluation des agents est notamment introduit dans le cadre d’un statut administratif aménagé, qui favorise un processus «d’individualisation» pénalisant pour la solidarité entre membres du personnel. Cette «réforme» passe également comme une lettre à la poste, sans réelle opposition syndicale.

  • 1994-1995 : la fameuse opération de « consolidation stratégique », c'est-à-dire la demi-privatisation de Belgacom ! Les trois syndicats publient l’un ou l’autre communiqué de presse, leurs porte-parole livrent quelques commentaires dubitatifs aux journalistes, mais ils ne mobilisent pas contre ce coup de force. Cette attitude passéiste va laisser des traces : la brèche est désormais ouverte pour une privatisation plus vaste de l’entreprise. Les travailleurs ont subi un revers décisif, sans combattre.

  • 1996 : le plan «Turbo».  Belgacom est découpée en « business unit »  et en « centres de profit » ;  la « culture d’entreprise » privée devient hégémonique. Ce découpage, et la dispersion du personnel qui en découle, annoncent des restructurations majeures. Ici aussi le sommet des organisations syndicales ne réagit pas. Au contraire : il est confirmé, avec son accord tacite, l'arrêt du recrutement de travailleurs statutaires (il n’y a jamais eu la moindre action précise pour s’opposer à cette décision, même pas une pétition ou une «minute de silence»…) !

  • 1997 : le plan PTS (People, Teams and Skills – «des personnes, des équipes et des compétences» !)  est avalisé et se solde par 6.000 pertes d’emplois et 6.000 réaffectations internes des désormais «collaborateurs». Avec l’appui unanime du front commun syndical, alors que l’entreprise accumule de plantureux bénéfices et ne connaît aucune difficulté financière ! La mesure est décrétée «socialement acceptable», même si 6.000 suppressions de postes de travail représentent la disparition de 6.000 possibilités de trouver un débouché professionnel pour les nombreux chômeurs. La rhétorique syndicale sur la «priorité absolue à l’emploi»  perd beaucoup de sa crédibilité ! D'autant qu'accepter un recul massif du volume des effectifs revient à accepter la conception mortifère de l'emploi comme « variable d'ajustement » pour des entreprises exclusivement en quête de rentabilité financière !

  • 1999 : un nouveau statut syndical est ratifié par le SLFP et la CGSP, le syndicat majoritaire de l'époque. Pourtant, ce statut brade l’autonomie des syndicalistes, limite leur liberté d’action, et renforce les possibilités d’ingérence du management  de l’entreprise dans la vie des organisations syndicales. La CSC, pour sa part, ne cautionne pas. Mais, concrètement, elle n’entreprend rien pour mettre en échec la manœuvre.

  • 2001 : encore un nouveau plan, baptisé en toute simplicité… BeST.  Le couvert est remis et les syndicats acceptent 4.000 nouvelles pertes d’emplois et 3.000 reconversions forcées supplémentaires, lesquelles vont encore générer un peu plus de souffrance au travail, et beaucoup de désarroi parmi le personnel de l’entreprise. Une diminution des «coûts salariaux» qui dopera encore plus les résultats financiers de Belgacom.

  • 2004 : boum badaboum, voici l’entrée en Bourse de Belgacom, une opération qui bénéficie du plein soutien du gouvernement à participation socialiste. Les syndicats prennent acte, se limitant à critiquer certains aspects de cette décision, et en prenant soin de ne pas décréter la moindre action ! Les boursicoteurs, eux, se réjouissent sans retenue de cette décision (attendue de longue date !), censée renforcer la «bonne santé  financière» du Bel 20

  • 2005 : l’état-major du front commun syndical,  une nouvelle fois uni pour la circonstance, fréquente assidûment le cabinet du ministre des entreprises publiques, Johan Vanden Lanotte, pour négocier un … enième plan de départs ! Il est notamment prévu de mettre en «disponibilité structurelle» des agents statutaires, alors en difficulté, et de licencier purement et simplement leurs collègues contractuels placés en «réaffectation de longue durée». Seule la CSC  finira par s’y opposer, suite au veto massif de ses militants. Après plusieurs journées de grève, elle introduira une série de recours devant le Conseil d’Etat, et elle obtiendra tardivement gain de cause. Belgacom devra donc réintégrer le personnel statutaire banni, mais pas les contractuels qui auront bel et bien perdu leur emploi !

  • 2006-2010 : des conventions collectives, qui ne rencontrent pourtant pas les exigences  syndicales énumérées dans les différents cahiers revendicatifs, entre autre en matière d’augmentations salariales substantielles, sont néanmoins signées. Par ailleurs, la politique de dégagement de l’emploi se poursuit avec l’adoption de nouveaux «projets» :  le «tutorat»,  qui a pour ambition  «d’encourager»  3.000 salariés à mettre prématurément un point final à leur carrière (dès l’âge de 58 ans !) ; et la promotion tapageuse de la «mobilité fédérale» (départ définitif vers la fonction publique) destinée à séduire quelques centaines d’autres agents fatigués d’être en permanence malmenés. Toutes celles et tous ceux qui partent ne sont pas remplacés. Un principe admis sans difficulté par les trois syndicats qui, pour montrer leur bonne volonté, marquent par la suite leur accord sur un nouveau statut régressif pour l’activité syndicale !

  • 2011-2016 : de nouvelles CCT au rabais qui confirment le blocage de facto des salaires, accordent des « avantages» qui ne coûtent guère à l’entreprise, planifient de nouveaux reculs des droits syndicaux et, cerise sur le gâteau, en mars-avril 2016 la signature d'un nouveau «plan de départs», sans aucune exigence en terme de compensation des personnes optant pour un «congé préalable à la retraite».

On le constate, la déflagration de cette semaine s'inscrit dans une longue trajectoire socialement régressive. Laquelle n'a cessé d'affaiblir les travailleurs et leurs organisations tout au long de cette période.

Malgré un rapport de force dégradé, il n'existe cependant d'autre choix que de lutter, car un nouveau recul entraînerait immanquablement la préparation de nouvelles mesures d'économies sur les «coûts du travail» et, dès lors, sur le dos de travailleurs qui ne cessent pourtant d'être bousculés depuis un gros quart de siècle !

achille.pngQuelles devraient être les revendications prioritaires ?

Quelques suggestions :

  • L'emploi ne peut plus être une «variable d'ajustement» pour des actionnaires avides de dividendes élevés, en ce y compris l'actionnaire «Etat» ; il ne peut plus être sacrifié sur l'autel de la course au profit maximal et il doit maintenant être entièrement préservé.

  • Par conséquent, chaque départ «naturel» (pension, décès, ...), -ou, le cas échéant, dans le cadre de dispositions complémentaires pour un départ anticipé du personnel âgé-, doit être compensé par l'embauche d'un(e) chômeur(se).

  • Les gains de productivité, acquis notamment grâce aux avancées technologiques, doivent permettre une réduction généralisée du temps de travail, sans perte de revenu. La semaine de 32 heures pour toutes et tous !

  • Une formation continue et de qualité pour tous les membres du personnel, sans exception.

  • Pour contrer les risques de division entre salariés, il faut en revenir au recrutement d'agents statutaires et accorder à tous les contractuels ce statut plus protecteur. Il ne peut y avoir d'entreprises publiques sans personnel sous statut public !

  • Un meilleur partage de la richesse produite par les travailleurs, par le biais de conventions collectives axées -entre autre- sur une revalorisation salariale structurelle.



Mais naturellement, il appartient maintenant aux membres du personnel concerné -et à eux seuls- de prendre position et de définir une ligne de conduite pour l'avenir.

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27 décembre 2018

Pensées intempestives (XIV)

 

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« En quoi consiste la dualité de pouvoirs ? On ne peut manquer de s'arrêter sur cette question que nous n'avons pas trouvée élucidée dans les travaux d'histoire. Pourtant, la dualité de pouvoirs est un état particulier d'une crise sociale, caractéristique non point seulement de la Révolution russe de 1917, quoique marqué précisément le plus nettement en elle.

Des classes antagonistes existent toujours dans la société et la classe dépourvue de pouvoir s'efforce inévitablement de faire pencher à tel ou tel degré le cours de l'État de son côté. Cela ne signifie pourtant pas du tout que, dans la société, règne une dualité ou une pluralité de pouvoirs. Le caractère d'un régime politique est directement déterminé par le rapport des classes opprimées avec les classes dirigeantes. L'unité de pouvoir, condition absolue de la stabilité d'un régime, subsiste tant que la classe dominante réussit à imposer à toute la société ses formes économiques et politiques comme les seules possibles.

La domination simultanée des junkers et de la bourgeoisie — que ce soit d'après la formule des Hohenzollern ou de la République - ne constitue pas une dualité de pouvoirs, si violents que soient par moments les conflits entre les deux détenteurs du pouvoir : ils ont une commune base sociale, une scission dans l'appareil gouvernemental n'est point à redouter de leurs dissensions. Le régime d'un double pouvoir ne surgit que sur un conflit irréductible des classes, n'est possible, par conséquent, qu'à une époque révolutionnaire et constitue un des éléments essentiels de celle-ci.

Le mécanisme politique de la révolution consiste dans le passage du pouvoir d'une classe à une autre. L'insurrection violente en elle-même s'accomplit habituellement en un court délai. Mais aucune classe historiquement définie ne s'élève d'une situation subalterne à la domination subitement, en une nuit, quand bien même ce serait une nuit de révolution, Elle doit déjà, la veille, occuper une position extrêmement indépendante à l'égard de la classe officiellement dominante ; bien plus, elle doit concentrer en elle les espoirs des classes et couches intermédiaires mécontentes de ce qui existe, mais incapables d'un rôle indépendant. La préparation historique d'une insurrection conduit, en période prérévolutionnaire, à ceci que la classe destinée à réaliser le nouveau système social, sans être encore devenue maîtresse du pays, concentre effectivement dans ses mains une part importante du pouvoir de l'État, tandis que l'appareil officiel reste encore dans les mains des anciens possesseurs. C'est là le point de départ de la dualité de pouvoirs dans toute révolution.

Mais ce n'est pas son unique aspect. Si une nouvelle classe portée au pouvoir par une révolution dont elle ne voulait point est, en réalité, une classe déjà vieille, historiquement attardée ; si elle a eu le temps de s'user avant d'être couronnée officiellement ; si, arrivant au pouvoir, elle tombe sur un antagoniste déjà suffisamment mûr et qui cherche à mettre la main sur le gouvernail de l'État - l'équilibre instable du double pouvoir est remplacé, dans la révolution politique, par un autre équilibre, parfois encore moins stable. La victoire sur " l'anarchie " du double pouvoir constitue, à chaque nouvelle étape, la tâche de la révolution, ou bien de... la contre-révolution.

La dualité de pouvoirs non seulement ne suppose pas mais, généralement, exclut le partage de l'autorité à parties égales et, en somme, tout équilibre formel des autorités. C'est un fait non constitutionnel, mais révolutionnaire. Il prouve que la rupture de l'équilibre social a déjà démoli la superstructure de l'État. La dualité de pouvoirs se manifeste là où des classes ennemies s'appuient déjà sur des organisations d'État foncièrement incompatibles - l'une périmée, l'autre se formant - qui, à chaque pas, se repoussent entre elles dans le domaine de la direction du pays. La part de pouvoir obtenue dans ces conditions par chacune des classes en lutte est déterminée par le rapport des forces et par les phases de la bataille.

Par sa nature même, une telle situation ne peut être stable. La société a besoin d'une concentration du pouvoir et, soit dans la classe dominante, soit, pour le cas présent, dans les deux classes qui se partagent la puissance, cherche irrésistiblement cette concentration. Le morcellement du pouvoir n'annonce pas autre chose que la guerre civile. Avant, pourtant, que les classes et les partis en rivalité se décident à cette guerre, surtout s'ils redoutent l'intervention d'une tierce force, ils peuvent se trouver contraints assez longtemps de patienter et même de sanctionner en quelque sorte le système du double pouvoir. Néanmoins, ce dernier explose inévitablement. La guerre civile donne au double pouvoir son expression la plus démonstrative, précisément territoriale : chacun des pouvoirs, ayant créé sa place d'armes retranchée, lutte pour la conquête du reste du territoire, lequel, assez souvent, subit la dualité de pouvoirs sous la forme d'invasions alternatives des deux puissances belligérantes tant que l'une d'elles ne s'est pas définitivement affermie.

La révolution anglaise du XVIIe siècle, précisément parce que c'était une grande révolution qui bouleversa la nation de fond en comble, représente nettement les alternatives de dualité des pouvoirs avec les violents passages de l'un à l'autre, sous l'aspect de la guerre civile.

D'abord, au pouvoir royal, appuyé sur les classes privilégiées ou les sommets des classes, aristocrates et évêques, s'opposent la bourgeoisie et les couches proches d'elle des hobereaux. Le gouvernement de la bourgeoisie est le Parlement presbytérien qui s'appuie sur la City londonienne. La lutte prolongée de ces deux régimes se résout par une guerre civile ouverte. Deux centres gouvernementaux, Londres et Oxford, créent leurs armées, la dualité des pouvoirs prend forme territorialement, quoique, comme toujours dans une guerre civile, les limitations territoriales soient extrêmement instables. Le parlement l'emporte. Le roi, fait prisonnier, attend son sort.

Il semblerait que se constituent les conditions du pouvoir unique de la bourgeoisie presbytérienne. Mais, avant encore que soit brisé le pouvoir royal, l'armée du parlement se transforme en une force politique autonome. Elle rassemble dans ses rangs les indépendants, les petits bourgeois, artisans, agriculteurs, dévots et résolus. L'armée se mêle autoritairement à la vie sociale, non simplement en tant que force d'armée, non comme garde prétorienne, mais comme représentation politique d'une nouvelle classe opposée à la bourgeoisie aisée et riche. En conséquence, l'armée crée un nouvel organe d'État qui se dresse au-dessus des chefs militaires : un conseil de députés soldats et officiers ("agitateurs"). Vient alors une nouvelle période de double pouvoir : ici, le parlement presbytérien, là, l'armée indépendante. La dualité du pouvoir conduit au conflit déclaré. La bourgeoisie se trouve impuissante à dresser contre l'"armée modèle" de Cromwell - c'est-à-dire la plèbe en armes - ses propres troupes. Le conflit se termine par l'épuration du parlement presbytérien à l'aide du sabre de l'indépendance. Du parlement reste une séquelle, la dictature de Cromwell s'établit. Les couches inférieures de l'armée, sous la direction des "levellers" (niveleurs), aile extrême-gauche de la révolution, tentent d'opposer à la domination des hautes sphères militaires, des grands de l'armée, lotir propre régime, authentiquement plébéien. Mais le nouveau double pouvoir ne parvient pas à se développer : les "levellers", les basses couches de la petite bourgeoisie, n'ont pas encore et ne peuvent avoir de voie indépendante dans l'histoire, Cromwell a tôt fait de régler leur compte à ses adversaires. Un nouvel équilibre politique, d'ailleurs loin de la stabilité, s'instaure pour un certain nombre d'années.

Du temps de la grande Révolution française, l'Assemblée constituante, dont l'épine dorsale se composait de l'élite du Tiers-État, concentrait en ses mains le pouvoir sans supprimer, pourtant, en totalité, les prérogatives du roi. La période de l'Assemblée constituante est celle d'une critique dualité de pouvoirs qui s'achève par la fuite du roi jusqu'à Varennes et n'est formellement liquidée qu'avec la proclamation de la République.

La première Constitution française (1791), construite sur la fiction de l'absolue indépendance des pouvoirs législatifs et exécutifs vis-à-vis l'un de l'autre, dissimulait en fait, ou essayait de cacher au peuple une réelle dualité de pouvoirs: celui de la bourgeoisie, définitivement retranchée dans l'Assemblée nationale après la prise de la Bastille par le peuple, et celui de la vieille monarchie, encore étayée par la haute noblesse, le clergé, la bureaucratie et la caste militaire, sans parler d'espérances fondées sur une intervention étrangère. Dans les contradictions de ce régime se préparait son inévitable effondrement. Il n'y avait d'issue possible que dans l'anéantissement de la représentation bourgeoise par les forces de la réaction européenne, ou bien dans la guillotine pour le roi et la monarchie. Paris et Coblence devaient se mesurer.

Mais, avant encore qu'on en soit arrivé à la guerre et à la guillotine, entre en scène la Commune de Paris, qui s'appuie sur les couches inférieures du Tiers-État de la capitale, et qui, de plus en plus crânement, dispute le pouvoir aux représentants officiels de la nation bourgeoise. Une nouvelle dualité de pouvoirs s'institue, dont nous relevons les premières manifestations dès 1790, lorsque la bourgeoisie, grande et moyenne, est encore solidement installée dans l'administration et les municipalités. Quel frappant tableau - et odieusement calomnié - des efforts des couches plébéiennes pour monter d'en bas, des sous-sols sociaux et des catacombes, et pénétrer dans l'arène interdite où des gens, portant perruque et culotte, réglaient les destinées de la nation. Il semblait que les fondations mêmes, foulées par la bourgeoisie cultivée, se ranimassent et se missent en mouvement, que, de la masse compacte, surgissaient des têtes humaines, se tendaient des mains calleuses, retentissaient des voix rauques, mais viriles. Les districts de Paris, citadelles de la révolution, vécurent de leur propre vie. Ils furent reconnus - il était impossible de ne pas les reconnaître! - et se transformèrent en sections. Mais ils brisaient invariablement les cloisons de la légalité, et recueillaient un afflux de sang frais venu d'en bas, ouvrant, malgré la loi, leurs rangs aux parias, aux pauvres, aux sans-culotte. En même temps les municipalités rurales deviennent l'abri de l'insurrection paysanne contre la légalité bourgeoise qui protège la propriété féodale. Ainsi, sous une deuxième nation s'en lève une troisième.

Les sections parisiennes se dressèrent d'abord en opposition contre la Commune dont disposait encore l'honorable bourgeoisie. Par l'audacieux élan du 10 août 1792, les sections s'emparèrent de la Commune. Désormais, la Commune révolutionnaire s'opposa à l'Assemblée législative, puis à la Convention, lesquelles, toutes deux, retardaient sur la marche et les tâches de la révolution, enregistraient les événements mais ne les produisaient pas, car elles ne disposaient point de l'énergie, de la vaillance et de l'unanimité de cette nouvelle classe qui avait eu le temps de surgir du fond des districts parisiens et avait trouvé un appui dans les villages les plus arriérés. De même que les sections s'étaient emparées de la Commune, celle-ci, par une nouvelle insurrection, mit la main sur la Convention. Chacune de ces étapes était caractérisée par une dualité de pouvoirs nettement dessinée dont les deux ailes s'efforçaient d'établir une autorité unique et forte, la droite par la défensive, la gauche par l'offensive.

Un besoin de dictature si caractéristique pour les révolutions comme pour les contre-révolutions procède des intolérables contradictions d'un double pouvoir. Le passage d'une de ces formes à l'autre s'accomplit par la voie de la guerre civile. Les grandes étapes de la révolution, c'est-à-dire le transfert du pouvoir à de nouvelles classes ou couches sociales, ne coïncident d'ailleurs pas du tout avec les cycles des institutions parlementaires qui font suite à la dynamique de la révolution comme son ombre attardée. En fin de compte, la dictature révolutionnaire des sans-culottes fusionne, il est vrai, avec celle de la Convention, mais de quelle Convention ? - d'une assemblée débarrassée, par la terreur, des Girondins qui, la veille, y prédominaient encore, diminuée, adaptée à la prépondérance d'une nouvelle force sociale. Ainsi, par les degrés d'un double pouvoir, la Révolution française, durant quatre années, s'élève à son point culminant. A partir du 9 thermidor, de nouveau par les degrés d'un double pouvoir, elle commence à descendre. Et, encore une fois, la guerre civile précède chaque retombée, de même qu'elle avait accompagné chaque montée. De cette façon, la société nouvelle cherche un nouvel équilibre de forces.

La bourgeoisie russe, combattant la bureaucratie raspoutinienne et collaborant avec elle, avait, au cours de la guerre, extraordinairement fortifié ses positions politiques. Exploitant les défaites du tsarisme, elle concentra entre ses mains, au moyen des unions de zemstvos et de municipalités et des Comités des Industries de guerre, une grande puissance, elle disposait à son gré d'énormes fonds d'État et représentait en somme un gouvernement parallèle. Pendant la guerre, les ministres du tsar se plaignaient de voir le prince Lvov ravitailler l'armée, nourrir, soigner les soldats et même créer pour eux des installations de coiffeurs. "Il faut en finir ou bien lui remettre tout le pouvoir", disait, dès 1915, le ministre Krivochéine. Il n'imaginait pas que Lvov, dix-huit mois plus tard, obtiendrait "tout le pouvoir", non point des mains du tsar, mais de celles de Kérensky, de Tchkhéidzé et de Soukhanov. Pourtant, le lendemain même du jour où ceci s'accomplit, une nouvelle dualité de pouvoirs se manifesta : à côté du demi-gouvernement libéral de la veille, dès lors formellement légalisé, surgit un gouvernement libéral de la veille, dès lors formellement légalisé, surgit un gouvernement non officiel, mais d'autant plus effectif, celui des masses laborieuses, en l'espèce, des soviets. A partir de ce moment, la Révolution russe commence à s'élever à la hauteur d'un événement d'une signification historique mondiale.

En quoi, cependant, réside l'originalité de la dualité de pouvoirs de la Révolution de Février ? Dans les événements des XVIIe et XVIIIe siècles, la dualité des pouvoirs constitue chaque fois une étape naturelle de la lutte, imposée aux participants par un rapport temporaire de forces, et alors chacun des partis s'efforce de substituer à la dualité son pouvoir unique. Dans la Révolution de 1917, nous voyons comment la démocratie officielle, consciemment et avec préméditation, constitue un pouvoir double, se défendant de toutes ses forces d'accepter l'autorité pour elle seule. La dualité s'établit, à première vue, non par suite d'une lutte des classes pour le pouvoir mais en résultat d'une "concession" bénévole d'une classe à l'autre. Dans la mesure où la "démocratie" russe cherchait à se sortir de la dualité, elle ne voyait d'issue que dans son propre renoncement à l'autorité. C'est précisément ce que nous avons appelé le paradoxe de la Révolution de Février.

On pourrait peut-être trouver une certaine analogie dans la conduite de la bourgeoisie allemande, en 1848, à l'égard de la monarchie. Mais l'analogie n'est pas complète. La bourgeoisie allemande essayait, il est vrai, de partager coûte que coûte le pouvoir avec la monarchie sur les bases d'un accord. Mais la bourgeoisie n'avait pas la plénitude de l'autorité entre ses mains et ne voulait nullement la céder totalement à la monarchie. "La bourgeoisie prussienne possédait nominalement le pouvoir, pas une minute elle ne douta que les forces de l'ancien régime ne se missent sans arrière-pensée à sa disposition et ne se transformassent en partisans dévoués de sa propre toute-puissance." (Marx et Engels.) La démocratie russe de 1917, possédant dès le moment de l'insurrection le pouvoir entier, s'efforça non simplement de le partager avec la bourgeoisie, mais de céder à celle-ci intégralement les affaires publiques. Cela signifie peut-être bien que, dans le premier quart du XXe siècle, l'officielle démocratie russe était déjà arrivée à une décomposition politique plus grande que celle de la bourgeoisie libérale allemande au milieu du XIXe. C'est tout à fait dans l'ordre des choses, car c'est le revers de la montée effectuée en ces quelques lustres par le prolétariat qui avait pris la place des artisans de Cromwell et des sans-culottes de Robespierre.

Si l'on considère le fait plus profondément, le double pouvoir du gouvernement provisoire et du Comité exécutif avait un caractère net de reflet. Le prétendant au nouveau pouvoir ne pouvait être que le prolétariat. S'appuyant sans assurance sur les ouvriers et les soldats, les conciliateurs étaient forcés de maintenir la comptabilité en partie double des tsars et des prophètes. Le double pouvoir des libéraux et des démocrates reflétait seulement un partage d'autorité non encore apparent entre la bourgeoisie et le prolétariat. Lorsque les bolcheviks évinceront les conciliateurs à la tête des soviets - cela dans quelques mois - la dualité souterraine des pouvoirs se manifestera, et ce sera la veille de la Révolution d'Octobre. Jusqu'à ce moment, la révolution vivra dans un monde de réfractions politiques. Déviant à travers les ratiocinations des intellectuels socialistes, la dualité de pouvoirs, étape de la lutte de classe, se transforma en idée régulatrice. C'est précisément par là qu'elle se plaça au centre de la discussion théorique. Rien ne se perd. Le caractère de reflet du double pouvoir de Février nous a permis de mieux comprendre les étapes de l'histoire où cette dualité apparaît comme un épisode de pléthore dans la lutte de deux régimes. C'est ainsi qu'une faible clarté lunaire, comme reflet, permet d'établir d'importantes conclusions sur la lumière solaire.

Dans l'infiniment plus grande maturité du prolétariat russe, par comparaison avec les masses urbaines des anciennes révolutions, résidait l'essentielle particularité de la révolution russe, qui conduisit d'abord au paradoxe d'une dualité de pouvoirs à demi fantomatique, et ensuite empêcha la réelle dualité de se résoudre à l'avantage de la bourgeoisie. Car la question se posait ainsi : ou bien la bourgeoisie s'emparera effectivement du vieil appareil d'État, l'ayant remis à neuf pour servir ses desseins, et alors les soviets devront s'effacer ; ou bien les soviets constitueront la base du nouvel État, ayant liquidé non seulement l'ancien appareil, mais aussi la domination des classes qui s'en servaient. Les mencheviks et les socialistes-révolutionnaires s'orientaient vers la première solution. Les bolcheviks vers la seconde. Les classes opprimées qui, selon Marat, n'avaient pas eu, jadis, assez de connaissances, ni d'expérience, ni de direction pour mener leur œuvre jusqu'au bout, se trouvèrent, dans la révolution du XXe siècle, armées de ces trois manières. Les bolcheviks furent vainqueurs.

Un an après leur victoire, la même question, devant un autre rapport de forces, se posa de nouveau en Allemagne. La social-démocratie s'orientait vers l'établissement d'un pouvoir démocratique de la bourgeoisie et la liquidation des soviets. Rosa Luxembourg et Karl Liebknecht tenaient pour la dictature des soviets. Les social-démocrates l'emportèrent. Hilferding et Kautsky en Allemagne, Max Adler en Autriche proposaient de "combiner" la démocratie avec le système soviétique, en intégrant les soviets ouvriers dans la Constitution. C'eût été transformer la guerre civile, potentielle ou déclarée, en une composante du régime de l'État. On ne saurait imaginer plus curieuse utopie. son unique justification sur les territoires allemands serait peut-être dans une vieille tradition : les démocrates du Wurtemberg, en 1848, voulaient déjà une république présidée par le duc.

Le phénomène du double pouvoir, insuffisamment évalué jusqu'à présent, est-il en contradiction avec la théorie marxiste de l'État qui considère le gouvernement comme le comité exécutif de la classe dominante? Autant dire: l'oscillation des cours sous l'influence de la demande et de l'offre contredit-elle la théorie de la valeur basée sur le travail ? Le dévouement de la femelle qui défend son petit réfute-t-il la théorie de la lutte pour l'existence ? Non, dans ces phénomènes, nous trouvons seulement une combinaison plus complexe des mêmes lois. Si l'État est l'organisation d'une suprématie de classe et si la révolution est un remplacement de la classe dominante, le passage du pouvoir, des mains de l'une aux mains de l'autre, doit nécessairement créer des antagonismes dans la situation de l'État, avant tout sous forme d'un dualisme de pouvoirs. Le rapport des forces de classe n'est pas une grandeur mathématique qui se prête à un calcul a priori. Lorsque le vieux régime a perdu son équilibre, un nouveau rapport de forces ne peut s'établir qu'en résultat de leur vérification réciproque dans 1a lutte. Et c'est là la révolution.

Il peut sembler que cette digression théorique nous ait distraits des événements de 1917. En réalité, elle nous fait pénétrer au cœur du sujet. C'est précisément autour du problème de la dualité du pouvoir qu'évoluait la lutte dramatique des partis et des classes. C'est seulement du sommet de la théorie que l'on peut embrasser du regard cette lutte et la comprendre exactement.»

 

[Léon TROTSKY, Histoire de la révolution russe, Seuil, Paris, 1962, pages 204-212]

 

 

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20 décembre 2018

Instable instabilité politique !

 

La NVA a débranché la prise du gouvernement Michel 1 sur la problématique nva.png«migratoire», car elle ne voulait rien céder au Vlaams Belang, surtout depuis son recul au scrutin communal d'octobre 2018, principalement au profit de cette extrême-droite décomplexée...

 Néanmoins, il semblait plausible qu'elle soutienne le «gouvernement minoritaire» Michel 2 sur un plan «socio-économique», qui les avait soudés durant quatre ans ! Après les premières déclarations des uns et des autres, confirmant apparemment ce scénario, tout a très vite dégénéré.

Pourquoi ?

La NVA a manifestement voulu pousser son avantage jusqu'au bout. Elle a rapidement marchandé son soutien et elle a exigé le prix fort à son ancien allié. D'abord, en insistant sur la concrétisation de l'ensemble de son propre programme, elle indiquait qu'elle voulait encore durcir les choix gouvernementaux en matière «économique», «sociale» (!) et concernant la gestion de «l'immigration». Ensuite, en mettant sur la table la question de la liste des articles de la Constitution à réviser (éventuellement) lors de la prochaine législature, singulièrement l'article 195, elle a pris date pour la négociation d'une septième «réforme institutionnelle» majeure, dans une perspective assurément «confédéraliste», qui affole tout ce que le pays compte de «Belgicains» !

Le MR avait subi trop de camouflets de la part de son allié, depuis 2014, pour s'incliner une fois de plus ! A six mois d'élections multiples -et alors qu'il est au plus bas dans les sondages surveillés de près par les états-majors des partis, malgré leurs dénégations-, il ne pouvait céder devant ces nouveaux diktats. Dès lors, pour éviter la chute définitive de l'Exécutif fédéral et une totale paralysie, Charles Michel a voulu se tourner vers l'opposition pour lui demander du secours. Ce faisant, il a attisé de nouvelles contradictions au sein de son équipe de rescapés. L'Open-VLD, notamment, n'était pas disposé à la moindre concession au PS ou à Ecolo pour obtenir leur «soutien».

 

michel pinocchio.jpg

 

La retour du premier ministre sursitaire chez le monarque, pour remettre la démission claire et nette de son gouvernement bis, était donc devenu inévitable...

Aujourd'hui, alors que les «consultations royales» battent leur plein, la poursuite d'un «gouvernement en affaires courantes» paraît la solution la plus conforme, car des élections législatives anticipées de quelques mois seraient contre-productives et sans doute... impopulaires !

On s'oriente probablement vers un gouvernement qui pourrait juste tenter de négocier avec le «pouvoir législatif» le vote de certains projets, en misant sur des appuis «à la carte» de l'un ou l'autre groupe parlementaire... Mais ce jeu de dupes ne convaincra peut-être pas des partis d'ores et déjà en campagne (pré-)électorale et, par conséquent, sur le qui-vive politicien.

Face à ces édifiantes péripéties, quelle attitude des mouvements sociaux ?

GJ.jpgLes «Gilets jaunes» -dont l'absence de «structuration» classique est une caractéristique- trouvaient déjà difficilement un interlocuteur qui les écoute et prenne en considération leurs revendications foisonnantes. La crise politique risque naturellement de ne guère changer cette inertie. L'usure, s'ajoutant au vide ainsi créé par le crash politique, risque de provoquer un reflux (temporaire?) de cette vague, au demeurant moins puissante qu'en France.

Du côté du mouvement syndical, «corps constitué» de longue date et force potentielle réelle, la situation reste confuse, à l'image des errements de ces dernières années. Toujours aucun plan d'action digne de ce nom, toujours aucune stratégie lisible ; en lieu et place, le sommet galope après la fuyante «concertation sociale», et il est maintenant fortement préoccupé par la «négociation d'un accord interprofessionnel» avec le patronat ! En cas de succès (très hypothétique), on ne sait toutefois pas qui pourrait l'avaliser, compte tenu de l'embrouillamini actuel  !

A l'évidence, les prochains mois seront difficiles pour celles et ceux qui luttent pour un changement de cap politique radical. Car le gouvernement libéralo-nationaliste est tombé par «la droite» (radicalisation xénophobe explicite du principal pilier de la «Suédoise»), et non par «la gauche» (mobilisations victorieuses du mouvement social) !

Résultat : la droite extrême et l'extrême droite sont maintenant à l'offensive, comme l'a démontré la «manifestation anti-pacte de Marrakech» (sic) de dimanche dernier, qui a vu des milliers de fascistes déferler à Bruxelles !

A ne pas douter, la campagne électorale -surtout en Flandre !- pourrait être accaparée par des enjeux bien peu sociaux ou environnementaux, sans oublier un retour des «questions communautaires».

Les «gauches» pourront-elles relever ce défi et bloquer le curseur des priorités sur l'indispensable transition écologique, sur un renforcement des libertés démocratiques et sur de véritables choix économico-sociaux en faveur du plus grand nombre ?

La réponse ne devrait pas tarder, si l'on veut éviter de nouvelles et dangereuses déconvenues...

 

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