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14 janvier 2017

L'audace ou l'enlisement

front commun.jpgLe « plan d’actions syndicales » est devenu le « Monstre du Loch Ness » de la politique en Belgique. Plus on en parle, moins on l’aperçoit.

Pourtant, d’exercice budgétaire en exercice budgétaire, la coalition NVA-MR ajoute les mauvais coups aux mauvais coups.  Jour après jour, mois après mois, année après année.

Rarement un gouvernement aura frappé aussi durement la population : salariés, malades, chômeurs, pensionnés, citoyens, … tous doivent subir  des sacrifices à répétition.

Il faut remonter à la triste époque de l’équipe Martens-Gol, début des années 80,  pour retrouver une telle rage destructrice des droites contre la Sécu, les services publics, les salaires ou la « démocratie sociale » !

Même si, depuis cette époque, d’autres gouvernements  -à participation socialiste !- n’ont guère lésiné sur les mesures d’austérité frappant le plus grand nombre.

Il n’est donc pas étonnant que beaucoup s’interrogent sur l’atonie de l’actuelle riposte syndicale. Et la responsabilité des dirigeants syndicaux et des « bureaucraties », enfermés dans la stratégie stérile de la « concertation sociale », est souvent stigmatisée par les observateurs et acteurs les plus radicaux.

Une concertation sociale qui vient d’accoucher un projet d’accord interprofessionnel famélique,  prévoyant notamment une augmentation salariale de 1,1 %  maximum, pour les deux prochaines années !

Il est donc logique, dans cette configuration illusoire des « relations sociales », que certains militants évoquent  régulièrement une « trahison » systématique des intérêts du monde du travail.

Je ne vais évidemment pas minimiser  l’inertie et l’absence de perspectives des sommets de la CSC et de la FGTB.

Mais si les dirigeants syndicaux sont là où ils se trouvent, si les dirigeants syndicaux mènent la politique qu’ils mènent, c’est bien parce que la majorité de leurs affiliés s’en accommode !

Aujourd’hui,  beaucoup de travailleurs ne se situent pas sur des positions fermement ancrées à  « gauche » et encore moins « révolutionnaires ».  Et ils sont bien loin de mettre une pression insoutenable sur leurs « représentants syndicaux » !

Il faut donc éviter de sombrer dans la caricature de la vie syndicale, en ne tenant pas compte de la conjoncture et de faits préoccupants…

Il est sans doute commode de pointer du doigt une poignée de dirigeants qui bureaucratie.pngauraient pour vocation de trahir mais la réalité est plus complexe.

Si celle-ci était aussi simple, il y a longtemps que des solutions auraient été trouvées !

Il existe une vision binaire du syndicalisme dans certains milieux : d’un côté la direction syndicale, l’appareil et ses apparatchiks, bref une bureaucratie forcément parasitaire ; de l’autre,  la masse des affiliés, force vive du changement.

La première tromperait systématiquement la seconde en refusant toute mobilisation pour des revendications fortes, à même de contrer la politique gouvernementale.

La base serait, elle, sur le pied de guerre, en parfait ordre de marche, demandeuse d’un affrontement avec le patronat et la réaction, n’attendant finalement que les bons mots d’ordre des états-majors syndicaux.

Dès lors, nous serions confrontés à un face-à-face entre deux blocs : un bloc restreint par le nombre mais robuste par le pouvoir qu’il détient et les moyens matériels qui sont à sa disposition ; un grand bloc, par le nombre, mais dépourvu de leviers lui permettant de peser sur les décisions que la situation exige.

Un tel point de vue est pour le moins réducteur. Il n’existe évidemment pas des camps homogènes, en permanente opposition.

Certes, les 3 millions d’affiliés de la CSC et de la FGTB constituent potentiellement une force considérable. Sauf que cet ensemble est extrêmement hétéroclite.

Non seulement coexistent au sein du mouvement syndical des travailleurs aux activités et aux statuts les plus divers, mais surtout coexistent des travailleurs aux niveaux de conscience différents et de toutes opinions politiques : des individus en quête de solidarité et des individualistes ; des humanistes et des racistes ; des féministes et des sexistes ; des combatifs et des passifs ; des passionnés de la « chose publique » et des indifférents ;  des partisans de la gauche et des partisans de la droite…

La « bureaucratie syndicale » n’est guère plus uniforme et est traversée  par les mêmes tensions et contradictions. Certaines de ses composantes se situent parfois plus « à gauche » qu’une majorité de syndiqués peu soucieuse d’en découdre avec un gouvernement intransigeant, et encore moins disposée à engager un combat politique pour une « alternative au capitalisme » !

La réalité sociale, politique et idéologique du mouvement syndical est à l’image d’une société en crise(s), éclatée, déboussolée, minée par l’inquiétude quotidienne et la peur de sombres lendemains.

On ne peut d’ailleurs ignorer que les syndicalistes sont également des citoyens qui, aux dernières élections, ont voté largement à droite en Flandre et à Bruxelles. Ce qui a favorisé la constitution d’une coalition conservatrice musclée, disposant au niveau fédéral d’une majorité parlementaire indiscutable !

poissons.jpgIl y a donc un vaste chantier devant nous  -qui dépasse le seul cadre syndical-  pour fédérer la population dans son ensemble autour d’un projet politique de rupture. Rupture avec la régression libérale ; rupture avec l’Union Européenne et ses traités ; rupture avec les dérives anti-démocratiques ; rupture avec un productivisme destructeur de notre écosystème ; rupture avec les roulements de tambour bellicistes…

Une action militante qui s’inscrit dans la durée, car des alternatives radicales ne pourront être concrétisées que par la combinaison des luttes et de l’existence d’un débouché politique capable de servir de relais à la mobilisation populaire.

Il nous appartient maintenant de rendre possible ce qui est nécessaire !

 

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