07 février 2023
"BOUQUINAGE" - 142
"Je restai là un bon moment, à scruter la nuit et le silence, attendant confusément un signe de ma Dame. Plusieurs fois j'entendis la sonnerie des quarts d'heure, imperturbable. Lorsque je crus déceler enfin une ombre blanche dans un recoin de la vieille muraille, mon cœur se mit à battre la chamade et je ne fis plus un geste. Bientôt, un autre reflet m'indiqua que la Dame au Linceul était à nouveau là. J'aurais voulu courir vers elle, mais au risque de la faire fuir. Je retournai donc dans la chambre pour l'observer. Elle monta furtivement l'escalier de marbre, puis se tint timidement devant la porte, en essayant de regarder à l'intérieur. J'entendis un murmure aussi doux que le son d'une harpe éolienne demander :
“Êtes-vous là ? Puis-je entrer ? Répondez-moi ! Je suis seule et j'ai peur !” En guise de réponse, je sortis du repli où je me trouvais, ce qui la fit sursauter. Je devinai, à sa respiration haletante, qu'elle s'efforçait –avec succès heureusement– de réprimer un cri."
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06 février 2023
"BOUQUINAGE" - 141
"Le grand maître se taisait, atterré. Quoi ? N'était-il donc qu'un instrument docile obéissant au Baphomet ? La propagation de la vraie foi, qu'il considérait comme son seul objectif, n'était en fait qu'une couverture masquant une vaste entreprise de conquête dont le seul bénéficiaire était cet extra-terrestre ! Incroyable... Pourtant, ce Thibétain paraissait connaître les secrets les mieux cachés... Allons ! Il fallait affronter la réalité, si horrible soit-elle."
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05 février 2023
"BOUQUINAGE" - 140
" — Mon cher, fit le marquis avec une philosophie dédaigneuse, persuade-toi bien de ceci : c'est que, de tous les maux les plus incurables, le pire c'est la misère. On n'en guérit que difficilement. Tu as eu le bonheur la première fois, et tu t'es arraché des griffes de tes créanciers avec une certaine adresse ; crois-moi, ne tente plus le hasard, le hasard est comme les femmes, il tourne à tout vent.
— Que veux-tu donc que je fasse ?
— Que tu te maries, pardieu !
— Et avec qui ? et comment ? murmura le baron avec un découragement profond dans la voix.
— Mon cher, reprit le marquis, il y a trois sortes de mariages pour les gentilshommes comme nous : le premier est le mariage de convenance, c'est-à-dire un assortiment assez respectable et fort ennuyeux de rang, de naissance et de fortune. Celui-là nous est interdit quand nous sommes un peu ruinés, comme tu l'étais, comme je le suis. Le second est la mésalliance intéressée. Pour redorer son écusson et donner le foin à ses chevaux, on épouse la fille d'un croquant qui vous apporte le Pérou dans un pan de sa chemise, dont le père vous appelle Monseigneur mon gendre et vous déteste cordialement, en songeant qu'il est obligé de payer bien cher l'honneur de vous avoir dans sa famille. Le troisième est le mariage d'inclination ; celui-là est ad libitum : on prend sa femme dans une gentilhommière qui branle au vent, dans les coulisses de l'Opéra ou sur la route des Porcherons, peu importe ! nul n'y regarde et n'y trouve à redire. Or, le premier t'était interdit pour une foule de raisons ; tu as fait le second, et ce dernier te fournit les moyens de contracter le troisième. Tu es assez riche pour que ta femme ait le droit d'être pauvre.
— Sans doute ! murmura le baron d'un air qui signifiait : “que m'importe tout ce que tu me dis !”
— Mais, reprit le marquis de Simiane, il faut te hâter cher, dans six mois, si tu n'as pris femme, tu seras le plus pauvre gentilhomme de France et de Navarre."
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04 février 2023
"BOUQUINAGE" - 139
"Je me sens si seule, je ne comprends pas pourquoi je me sens si seule alors que j'ai aimé tant de gens. J'ai aimé des filles de l'orphelinat, mes sœurs, mes seules amies. Mais je les ai toutes perdues. Ma mère semble à peine me reconnaître. Mon père m'écrit mais garde ses distances. Est-ce que je suis une lépreuse ? Un monstre ? Une malédiction ? Les hommes disent m'aimer mais qui aiment-ils ? “Marilyn”. Moi, j'aime les animaux, surtout les chevaux. J'aide les gens de Reno à lancer une souscription pour sauver les mustangs sauvages du Sud-Ouest. J'aimerais qu'aucun animal n'ait jamais à mourir. Sauf de mort naturelle !"
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03 février 2023
"BOUQUINAGE" - 138
"Nous sommes bien misérables, car le malheur ce n’est pas seulement d’avoir faim et soif, le malheur, c’est de savoir qu’il y a des gens qui veulent que tu meures de faim."
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02 février 2023
"BOUQUINAGE" - 137
"Dans la voiture électrique, Pépère, son petit cartable sur les genoux et les yeux droits devant, songe au mensonge... Pas seulement à ceux de ses gosses. Le mensonge en général. Le mensonge intime et sociétal. Le mensonge comme moyen de communication, comme modèle de gouvernement, comme stratégie et comme force de gestion. Ce qu'on peut faire avaler à l'électeur, quand même, au citoyen, au client, à l'employé, au riverain... La mairesse, avec ses plages. On aura beau dire, ils sont forts. On peut toujours s'aligner, nous autres, avec nos petits moyens... Le mensonge, lui, Pépère, jamais. Ses gars, il ne leur a jamais fait prendre des vessies pour des lanternes. Il les a éduqués à la vérité cash. Le monde tel qu'ils est. Sans sauce. On ne ment pas. Ou si on ment c'est à la police et c'est servir la vérité. Sinon, on meurt."
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01 février 2023
"BOUQUINAGE" - 136
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31 janvier 2023
"BOUQUINAGE" - 135
"La SF ne vise pas à nous couper de notre réalité pour nous plonger, désarmés, dans le grand et terrifiant inconnu. Tout à l'inverse, elle nous parle de nous et encore de nous, ne serait-ce que parce que les humaines capacités des auteurs les contraignent à se débattre dans les limites étroites de leur propre nature. La science-fiction, en somme, n'est jamais qu'un détour. Son pari est qu'il est possible d'en apprendre davantage sur nous-mêmes en élargissant le champ de l'espace, intérieur ou extérieur, et celui du temps, vers le passé ou le futur. Tenter de décrire une race extraterrestre revient forcément à nous interroger sur ce que nous sommes on ne sommes pas. Imaginer le futur ou un passé alternatif (uchronie) conduit à juger le présent. Dans la SF comme dans toute autre littérature, qu'on le veuille ou non, l'homme, et même l'homme contemporain, demeure la seule véritable référence, l'étalon de toute construction imaginaire. Le lointain, l'ailleurs, l'autre se définissent à ce qu'ils sont ou pas semblables à nous par des différences et des ressemblances. Il n'en est pas moins exact que nous interroger sur ce que nous sommes est rarement réjouissant, et que nous demander où cela nous conduit ne l'est pas davantage."
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