13 mars 2023
"BOUQUINAGE" - 176
"Les masses se rendent compte du caractère réactionnaire du régime bolchévique : son régime de terreur et de persécution des non-communistes est condamné. La torture, dans les prisons politiques de la dictature et dans les camps de concentration du Grand Nord et de Sibérie, réveille les consciences des progressistes du monde entier. Dans presque tous les pays, des associations de défense et d'aide aux prisonniers politiques de Russie se sont constituées, pour demander leur libération et le rétablissement de la liberté d'opinion et d'expression."
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12 mars 2023
"BOUQUINAGE" - 175
"La guerre civile n’était pas seulement une guerre mais aussi une révolution. (…) Depuis lors, et surtout depuis décembre de l’année dernière, le véritable combat du gouvernement espagnol a été d’écraser la révolution et de tout remettre dans l’état où il était auparavant. Ils ont plus ou moins réussi à le faire et ont maintenant installé un terrible règne de terreur dirigé contre quiconque est soupçonné de réelles sympathies révolutionnaires.
(...)
J’ai eu la chance de pouvoir sortir d’Espagne mais beaucoup de mes amis et connaissances sont toujours en prison et je crains fort que certains d’entre eux risquent d’être abattus, non pour une infraction quelconque mais pour s’être opposé au parti communiste (…) Ce que j’ai vu là-bas m’a tellement secoué que j’écris et que j’en parle à tout le monde. Naturellement, je suis en train d’écrire un livre sur ce sujet.
(...)
Lorsque la révolution a éclaté, les travailleurs, dans beaucoup de régions d’Espagne, ont établi les prémices d’un gouvernement du peuple : ils ont saisi des terres et des usines, ont mis en place des comités locaux, etc. Le gouvernement, qui est en grande partie contrôlé par le parti communiste, a réussi à défaire une grande partie de tout ça, d’abord en demandant aux travailleurs de ne pas compromettre la guerre et, plus tard, quand il s’est senti plus fort, par la force."
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11 mars 2023
"BOUQUINAGE" - 174
"Cela fait près de neuf mois maintenant que je suis arrêté. J'ai déjà connu Kolodège et ses cachots, les tortures physiques et psychiques insupportables, les colères de Smola et le carrousel de Kohoutek. Et pourtant, si l'on m'avait dit, lorsque Kohoutek rentra de ses vacances, que pendant douze autres mois, les interrogatoires se poursuivraient journellement et qu'il me faudrait vivre un nombre incalculable de fois la retranscription des procès-verbaux administratifs, cela m'aurait semblé incroyable.
Je devine maintenant certaines des clés de cette tactique. L'arrestation de Slansky, en novembre, celle de Geminder et d'autres, leurs interrogatoires, leurs “aveux” ne pouvaient ne pas entraîner des formulations nouvelles dans les procès-verbaux administratifs de ceux qui, comme moi, devaient être inclus dans le procès. Mais moi, du moment que j'étais interrogé sur eux, et de la façon dont Kohoutek me les dépeignait, traîtres au Parti depuis toujours, je les croyais arrêtés depuis longtemps déjà. Je pense qu'aucun homme normal n'aurait pu imaginer que des dirigeants du Parti puissent laisser s'amonceler de telles accusations contre d'autres dirigeants, à l'insu de ces derniers, laissés en liberté, à leurs postes, des semaines et des mois durant.
Slansky ne passa qu'en septembre du Secrétariat général du Parti, à une vice-présidence du Conseil, une disgrâce certes, mais tout de même dorée. En effet, ce qui se passait avec nous illustre de façon aveuglante le procédé de fabrication de tels procès. On fabrique les accusations, les crimes, le cadre du procès et ensuite, seulement, on arrête les victimes, les coupables désignés."
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09 mars 2023
"BOUQUINAGE" - 172
"Les coups de téléphone de Staline ! Une fois ou deux par an, des rumeurs couraient dans Moscou : Staline avait appelé le metteur en scène Dovjenko, Staline avait téléphoné à l’écrivain Ehrenbourg.
Point lui était besoin d’ordonner : donnez un prix à un tel, ou un appartement, construisez-lui un institut scientifique ! Il était trop grand pour parler de ces choses. Ses subordonnés s’en occupaient, essayant de deviner ses désirs à l’expression de ses yeux, aux intonations de sa voix. Il lui suffisait d’adresser à un homme un petit rire bienveillant pour que son destin s’en trouve changé : il quittait les ténèbres, l’anonymat, pour un déluge de gloire, d’honneurs, de puissance. Des dizaines de personne haut placées saluaient alors l’heureux élu : Staline lui avait souri, avait plaisanté avec lui, lui avait parlé au téléphone.
Les gens se répétaient les détails de ces conversations, chaque parole prononcée par Staline leur semblait étonnante. Plus les mots employés étaient banals, plus ils les stupéfiaient. Staline, à les en croire, ne pouvait user de mots courants.
On racontait qu’il avait appelé un sculpteur célèbre et lui avait dit, en riant :
— Bonjour, vieil ivrogne.
Il avait appelé une autre célébrité, un homme honnête, et lui avait parlé d’un de ses camarades qu’on avait arrêté. L’autre, désemparé, avait bafouillé une réponse et Staline lui avait dit :
— Vous défendez bien mal vos amis.
On racontait qu’il avait téléphoné à la rédaction d’un journal pour les jeunes, et que le rédacteur adjoint avait répondu :
— Boubekine à l’appareil.
Staline avait alors demandé :
— Et qui est Boubekine ?
Et Boubekine de répondre :
— N’avez qu’à le savoir ! Et il avait brutalement raccroché.
Staline l’avait alors rappelé :
— Camarade Boubekine, ici Staline. Soyez gentil de m’expliquer qui vous êtes.
On racontait que Boubekine avait ensuite passé deux semaines à l’hôpital, pour se remettre du choc nerveux.
Une seule de ses paroles pouvait anéantir des milliers, des dizaines de milliers de personnes. Un maréchal, un commissaire du peuple, un membre du Comité central, un secrétaire d’obkom, tous ces gens qui, hier encore, commandaient une armée, un groupe d’armées, régnaient sur des régions, des républiques, d’énormes usines, pouvaient aujourd’hui, sur un simple mot de colère de Staline, n’être plus que grains de poussière dans un camp, où ils attendraient leur rata, dans un tintement de gamelles."
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06 mars 2023
"BOUQUINAGE" - 169
"Avélii et Varvara descendirent le lendemain dans un monde souterrain qu'ils connaissaient déjà, où l'on vivait d'une vie larvaire et doucement délirante... Aux fenêtres — car ces caves affleuraient au sol — garnies de fil de fer barbelés, manquaient la moitié des carreaux : et toute la poussière noircie des années recouvrait ce qui restait de vitre. Douze femmes ici, dix-sept hommes là-bas baignaient dans la même chaleur animale, respiraient les mêmes relents de défécation, tuant le temps avec les mêmes récits d'infortune. Les femmes s'allongeaient à tour de rôle pour dormir sur des planches qui puaient la punaise. Son tour venu, Varvara avait pour voisine une maigre femme de pêcheur aux pommettes aiguës, inculpée de spéculation, et une vieille à bandeau noir, inculpée de sorcellerie et propos contre-révolutionnaires."
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28 février 2023
"BOUQUINAGE" - 163
"La Patrouille, rassemblement d’hommes de toutes les époques, dont les derniers dirigeants vivaient à quelques millions d’années de là, existait pour garder, guider et aider le trafic à travers le temps. Mais elle était destinée avant tout à la préservation de l’histoire établie."
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27 février 2023
"BOUQUINAGE" - 162
"Toutes les entreprises de pompes funèbres avaient fermé leurs portes. La loi ne souffrait pas d’exception : les morts devaient être transportés, immédiatement après le décès, aux fosses crématoires. C’était le seul moyen de détruire les bactéries responsables de l’épidémie."
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26 février 2023
"BOUQUINAGE" - 161
"De jour en jour, et par les deux côtés de mon intelligence, le moral et l'intellectuel, je me rapprochai donc peu à peu de cette vérité, dont la découverte partielle a entraîné pour moi un si terrible naufrage : à savoir, que l'homme n'est en réalité pas un, mais deux."
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