Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

22 novembre 2022

"BOUQUINAGE" - 65

 

"Tout est perversité, confusion, désordre et colère."

 

cover.jpg

21 novembre 2022

"BOUQUINAGE" - 64

"Si notre quotidien nous prive du merveilleux et de la magie d'antan, l'écrivain ressuscite l'univers fantasmagorique des mythes et des légendes, le renouvelle ou le rajeunit.

(...)

Faisant écho aux préoccupations de son siècle, la créature fantastique se régénère sans cesse — tandis que tapie au fin fond de notre inconscient collectif, demeure active une forme de pensée magique. Elle se plaît à tenter notre esprit, et notre penchant pour l'étrange transparaît chez la plupart d'entre nous dans nos petites manies irraisonnées."

 

 

df.jpg

20 novembre 2022

"BOUQUINAGE" - 63

"Pour bien faire sentir aux domestiques sur quel pied j'entendais maintenant être traitée, j'avais décrété que mes repas avec le garçon seraient servis dans la salle à manger des “grands”, comme nous disions ; de sorte que je l'avais attendu dans cette pièce pompeuse où, par un dimanche de frayeur, Mrs Grose m'avait vue dehors par la fenêtre, et m'avait ensuite fourni quelques éléments de ce qu'on ne pourrait guère appeler une lumière. À présent, je sentais de nouveau –car je n'avais cessé de le sentir– à quel point mon équilibre dépendait de la réussite de ma volonté rigide, volonté de fermer les yeux aussi fortement que possible sur le fait que ce que j'avais à affronter était révoltant et contre-nature. Je ne pouvais continuer qu'en faisant confiance “à la nature”, en considérant que ma monstrueuse épreuve était certes une incursion dans une direction inhabituelle et déplaisante, mais exigeait seulement, après tout, pour y faire front, de donner un tour d'écrou supplémentaire aux vertus humaines. Toutefois, aucune tentative ne requérait davantage de tact que celle de faire intervenir toute la nature. Et comment pourrais-je en faire intervenir ne serait-ce qu'une toute petite dose si je m'interdisais de parler de ce qui s'était passé ? D'un autre côté, comment pourrais-je en parler sans plonger de nouveau dans de hideuses ténèbres ?"

 

 

tour d'écrou.jpg

19 novembre 2022

"BOUQUINAGE" - 62

"Je traçais de vagues dessins dans le sable de l'allée avec le bout de mon parapluie, en cherchant mes mots pour amener la conversation sur la mort de mon frère, mais ce fut elle qui parla la première.

“Arthur, je voudrais vous demander quelque chose.

— Je vous écoute, Anne.

— Savez-vous si les mouches vivent longtemps ?”

Je la regardai, stupéfait, et j'étais sur le point de lui dire que son fils m'avait posé la même question, quelques heures plus tôt, quand je crus entrevoir la possibilité de frapper enfin un grand coup dans ses défenses conscientes et subconscientes. Elle semblait attendre calmement ma réponse, pensant sans doute que j'essayais de rassembler mes souvenirs d'école, sur la longévité des mouches.

Sans la quitter des yeux, je répondis :

“Je ne sais pas au juste, Anne, mais la mouche que vous recherchiez était ce matin dans mon bureau.”

Le coup avait certainement porté. Elle tourna brusquement la tête vers moi. Elle ouvrit la bouche comme si elle allait crier, mais seuls ses yeux immenses semblaient hurler de terreur."

 

 

la mouche.jpg

18 novembre 2022

"BOUQUINAGE" - 61

 

"Sorti de l'ombre, l'étrange personnage parla :

— Vous, me dit-il d'un ton amical, vous n'y comprenez rien, n'est-ce pas ?

— Rien je l'avoue.

— Ne vous frappez pas. Vous avez rencontré seulement quelques-uns de mes amis. Ils sont déconcertants pour qui ne les connaît pas.

— Vous les connaissez donc ?

— Depuis longtemps. C'est aujourd'hui la réunion annuelle des fantômes du quartier.

— Vous m'en contez !

— Ai-je l'air de plaisanter ? fit le clochard en rendant invisible, à l'instant même, tout le bas de son corps. (Curieuse impression que ce buste flottant dans l'air à mon côté !)

— Ainsi donc la petite fille ? Le policier?

— Des fantômes... Vous trouvez étrange leur tenue, comme la mienne ? Pourquoi donc ? Le spectre de blanc vêtu n'a jamais existé que dans les livres. Il ne faut point y croire. Les chaînes, les gémissements ? Théâtre d'outre-Manche ! Moi qui vous parle, j'ai étudié sérieusement la question. Depuis que j'ai rejoint nos amis, il y a dix ans exactement, j'ai eu l'occasion d'écouter et d'observer. Pourquoi les fantômes se ridiculiseraient-ils en portant l'uniforme de leur état ? Les assassins ont-ils un costume d'assassin? Les escrocs ont-ils un costume d'escroc? Tenez monsieur, vous me croirez si vous voulez, mais j'en connais des nôtres qui continuent à exercer une profession parmi vous, les vivants. C'est surprenant peut-être mais rigoureusement exact. Un médecin aliéniste notamment, et un chauffeur de taxi. Et ils s'en donnent à cœur joie, je vous l'assure !

— Mais vous ?

— Oh ! moi, je suis un modeste.  Je suis celui qui frappe aux murs les nuits d'insomnie, qui fais battre les volets, grincer les girouettes, vibrer les rampes d'escalier, craquer les meubles. Parfois, je tousse dans l'oreille des gens, ou je leur souffle dans le cou... Vous avez dû remarquer déjà ces petits phénomènes. Beaucoup des nôtres font cela. C'est l'enfance de l'art.

— Et votre réunion de cette nuit ?

— J'y cours à l'instant. Je ne me suis que trop attardé. Mais j'ai eu pitié de votre désarroi, parce que vous aviez eu une pensée attendrie pour moi, tout à l'heure. Le cadavre anonyme, il y a dix ans... c'était moi."

 

 

owen.jpg

17 novembre 2022

"BOUQUINAGE" - 60

"Douce finit par dire :
 
- Ma vue baisse. Même au temps de ma jeunesse je n'aurais pas pu lire comme c'est écrit. Mais on dirait que le mur n'est plus tout à fait le même. Benjamin, les Sept Commandements sont-ils toujours comme autrefois ?
 
Benjamin, pour une fois consentant à rompre avec ses principes, lui lut ce qui était écrit sur le mur. Il n'y avait plus maintenant qu'un seul Commandement. Il énonçait :
 
TOUS LES ANIMAUX SONT ÉGAUX MAIS CERTAINS SONT PLUS ÉGAUX QUE D'AUTRES."
 
 

animl.jpg

16 novembre 2022

"BOUQUINAGE" - 59

"Il faudra bien qu'un jour on se rallie à l'évidence, qu'on finisse par reconnaître que le fantastique est une des démarches les plus riches et les plus exaltantes de la création littéraire. Un art spécifique, un genre littéraire, ne serait-ce que le plus bigarré, n'existe réellement qu'en fonction des mythes qu'il porte en lui, qu'il achemine d'une époque à l'autre, qu'il ne se lasse pas d'alimenter et autour desquels il vient rôder sans cesse. C'est parce qu'il est générateur de mythes —de mythes profonds— que le fantastique a sa place dans l'histoire des cultures occidentales —et c'est peut-être aujourd'hui qu'on s'en aperçoit le plus, alors que durant de longues décennies on s'en était à peine rendu compte, si ce n'est pour en dénoncer les formes prétendument puériles et les invraisemblances."

 

 

baronian.jpg

14 novembre 2022

"BOUQUINAGE" - 57

"— Vois-tu, Scout, il se présente au moins une fois dans la vie d'un avocat une affaire qui le touche personnellement. Je crois que mon tour vient d'arriver. Tu entendras peut-être de vilaines remarques dessus, à l'école, mais je te demande une faveur : garde la tête haute et ne te sers pas de tes poings. Quoi que l'on dise, ne te laisse pas emporter. Pour une fois, tâche de te battre avec ta tête ... elle est bonne, même si elle est un peu dure.
— On va gagner, Atticus ?
— Non, ma chérie.
— Alors pourquoi...
— Ce n'est pas parce qu'on est battu d'avance qu'il ne faut pas essayer de gagner."
 
 
 

lee.jpg