12 février 2015
Mobilisation sociale canada dry
Les tambours raisonnent, les trompettes sonnent, le front commun syndical vient d’annoncer la reprise de son plan d’actions : des « assemblées d’information », quelques initiatives « ciblées » et… une « concentration de militants à Bruxelles », le 11 mars prochain.
Cela s’appelle avoir le sens du crescendo !
On a envie d’ironiser, mais c’est plutôt la soupe à la grimace.
En novembre-décembre 2014, une manifestation nationale, des grèves générales provinciales et une grève générale nationale n’ont pas réussi à faire dévier Charles Michel Ier de sa trajectoire austéritaire.
Et maintenant, certains voudraient nous faire croire que ce qui est annoncé (discrètement) va ébranler la coalition des droites, après que celle-ci ait engrangé un accord interprofessionnel qui réjouit le patronat (et pour cause !) ?
« Faut-il en rire, faut-il en pleurer, je n’ai pas le cœur à le dire », comme le disait le poète.
La perplexité est franchement de mise.
Attention nous dit-on, ceci n’est qu’une « étape ». Ensuite viendront « si nécessaire » ( !) d’autres actions plus dures, peut-être même « des grèves » !
Mais pourquoi diable attendre et tirer ainsi inutilement la « mobilisation » en longueur ? Dans l’espoir que l’Exécutif fédéral fasse un geste ?
C’est plutôt illusoire au vu des déclarations répétées des excellences ministérielles, en ce y compris Kris Peeters du CD&V, qui a réaffirmé aujourd’hui encore que le saut d’index était inéluctable et qui, menaçant, répète que « les actions syndicales ne pourront pas être des grèves » !
De même que l’on juge un arbre à ses fruits, on évalue une stratégie syndicale à ses résultats.
Car il ne s’agit pas seulement de témoigner pour la postérité. Sauf à n’avoir rien compris aux enjeux, il s’agit de mettre en échec le gouvernement NVA-MR et sa politique de destruction du social.
Le but des actions n’est donc pas seulement de sensibiliser le plus grand nombre ou d’attirer l’attention médiatique. L’objectif des luttes est d’aboutir au retrait du saut d’index, au maintien de l’âge légal de la retraite à 65 ans, au blocage des tentatives de mise en cause des libertés syndicales, à la sauvegarde des services publics, à la préservation de notre système de sécurité sociale, au rejet des politiques fiscales injustes, à un renforcement de la protection des chômeurs, …
Il s’agit aussi de modifier les rapports de forces pour dégager une alternative basée sur une réduction généralisée du temps de travail pour favoriser l’emploi et sur des mesures destinées à aller chercher l’argent là où il se trouve, comme un impôt sur la fortune, une lutte efficiente contre la fuite des capitaux et la fraude fiscale, l’arrêt des cadeaux plantureux au capital (intérêts notionnels).
Il est évident que ce n’est pas simple. Car 40 années de crise, de politiques socialement régressives mises en œuvre par les différents gouvernements, d’échecs successifs et de combats avortés, pèsent sur les consciences et ont affaibli la crédibilité syndicale. D’où un certain désenchantement, le repli de la sphère publique vers la sphère privée, la recherche d’un hédonisme consumériste, la remise en cause des solidarités, …
Mais il n’existe pas d’autre choix que de lutter, et lutter jusqu’au bout pour obtenir gain de cause et changer ainsi la donne.
On peut gagner des batailles que l’on mène mais on perd toujours celles que l’on ne mène pas !
Il n’est pas trop tard pour se ressaisir mais il devient temps.
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11 février 2015
Quelles actions pour quels buts ?
Il y aura donc à nouveau des actions syndicales dans les prochaines semaines !
C’est positif.
Naturellement, il eût été plus cohérent et plus efficace de ne pas casser la dynamique enclenchée fin 2014 !
Mais soit. Inutile ici de ré-écrire l’histoire, même récente.
Toutefois, cette annonce d’une relance des luttes interpelle.
Des actions, oui ; mais lesquelles et pour quels objectifs ?
Car il s’agit d’obliger le gouvernement à battre en retraite et il est douteux qu’il retire ses principales mesures d’austérité parce que le front commun syndical l’exige.
Des actions pour gagner sont donc indispensables, et pas simplement des actions pour canaliser une « base » mécontente ou pour se donner « une bonne conscience du devoir accompli » !
La lucidité commande de dire franchement que quelques manifestations dans les rues de grandes villes belges ou devant des cabinets ministériels, voire une grève générale limitée à 24 heures et proche des vacances d’été, ne suffiront pas pour ébranler cette vigoureuse coalition des droites !
D’autre part, le mouvement syndical doit également clarifier sa position concernant les alternatives qu’il défend face aux politiques néo-libérales.
Des zones d’ombre à lever rapidement sous peine de déconvenues nouvelles.
J’y reviendrai.
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07 février 2015
Difficultés
Il se dit que le front commun syndical est toujours en vie et que des actions pourraient être décrétées de concert dès la semaine prochaine !
Le débat porterait essentiellement sur l’opportunité de nouvelles grèves, une perspective contestée par des responsables de la CSC et de la FGTB.
Mais au-delà de cette discussion tacticienne, l’important est sans doute ailleurs.
Il faut cesser, à gauche, de s’émoustiller à la moindre annonce d’une reprise de la lutte contre Charles Michel Ier, et dire clairement ce qui est : ce gouvernement ne reculera pas devant des pétitions, des « minutes de silence », des manifestations ponctuelles ou des grèves éparpillées ! Pour obtenir le retrait de sa politique musclée de régression sociale, il devra… chuter ! Et cet objectif, qui trouble un sommet syndical soucieux de ne « pas faire de la politique », nécessitera une grève générale prolongée, un mode d’action qui ne sera jamais assumé par les Goblet, Leemans, Bodson, Ska et consorts !
Il n’est d’ailleurs pas certain qu’une telle visée recueille l’aval d’une majorité populaire, car le monde du travail est fortement affaibli par des décennies de crise, d’austérité, de défaites répétées et d’absence d’une perspective politique crédible.
En cas de crise gouvernementale et de retour aux urnes, il est en effet bien difficile de visualiser ce que pourrait être une solution de rechange. Il n’existe ni Syriza ni Podemos en Belgique, ni même en Wallonie. Le PTB, qui a pourtant progressé, dispose de 2 élus sur 150 à la Chambre ! Toute la « gauche », dans le sens vraiment large du terme, c’est-à-dire avec les « écologistes » et les « socialistes », peut actuellement compter sur 50 députés, soit juste 1/3 de la représentation parlementaire fédérale !
C'est dire que le triomphalisme n'est pas de mise.
Il n’est nullement défaitiste d’acter des faits et de prendre la mesure de la réalité des rapports de forces.
La lucidité commande, dès lors, de comprendre qu’il reste un long chemin à parcourir pour se dégager du capitalisme et de ses recettes néo-libérales.
Et une alternative, à la hauteur des enjeux de notre monde et de notre société, ne pourra prendre consistance -ici et maintenant- si la gauche de gauche persiste dans ses querelles et divisions, et si la gauche syndicale reste repliée sur elle-même et s’abstient de toute « audace politique ».
Reste à gérer la tension entre l’urgence d'un changement de direction et la lenteur des processus de recomposition politique.
Un difficile défi à relever pour celles et ceux qui ne renoncent pas à transformer radicalement la vie…
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