01 décembre 2022
"BOUQUINAGE" - 74
"On peut -je peux- formuler un programme politique. Mais un tel programme ne vaudra rien si la grande majorité de la population n'est pas prête, non pas à voter pour ce programme, mais à participer activement non seulement à sa réalisation, mais à son déploiement, son développement et, le cas échéant, à son altération. Un tel programme ne pourrait être aujourd'hui que le projet d'une société autogouvernée à tous les échelons -et il est tautologiquement clair qu'un tel projet n'a aucun sens si les gens n'ont pas le désir et la volonté de s'autogouverner et ne font pas ce qu'il faut pour cela. Or, ce n'est pas ce que nous constatons aujourd'hui. Cela veut-il dire qu'il faut tirer un trait ? Je ne le pense pas. Il ne peut y avoir de prédiction sérieuse en politique et en histoire. A la veille de Mai 68, Viansson-Ponté écrivait son célèbre article "La France s'ennuie". En effet, elle s'ennuyait tellement qu'elle a explosé quelques semaines plus tard. Je ne veux certes pas dire qu'on est à la veille d'un nouveau Mai 68. Mais simplement qu'aucun sondage et qu'aucune induction empirique ne peuvent prévoir le comportement d'une population à courte échéance, encore moins à moyen et à long terme."
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16 novembre 2022
"BOUQUINAGE" - 59
"Il faudra bien qu'un jour on se rallie à l'évidence, qu'on finisse par reconnaître que le fantastique est une des démarches les plus riches et les plus exaltantes de la création littéraire. Un art spécifique, un genre littéraire, ne serait-ce que le plus bigarré, n'existe réellement qu'en fonction des mythes qu'il porte en lui, qu'il achemine d'une époque à l'autre, qu'il ne se lasse pas d'alimenter et autour desquels il vient rôder sans cesse. C'est parce qu'il est générateur de mythes —de mythes profonds— que le fantastique a sa place dans l'histoire des cultures occidentales —et c'est peut-être aujourd'hui qu'on s'en aperçoit le plus, alors que durant de longues décennies on s'en était à peine rendu compte, si ce n'est pour en dénoncer les formes prétendument puériles et les invraisemblances."
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15 novembre 2022
"BOUQUINAGE" - 58
"Utopie et SF occupent les orientations opposées de l'éventail qui les réunit et que L'Utopie de Moore et La Nouvelle Atlantide de Bacon ont d'emblée illustrées. Entre les deux extrêmes de cet éventail, il y a place pour un nombre indéfini d’œuvres dosant diversement politique et technique. Lorsque que l'utopie (ou la dystopie) décrit un projet de société ou une autre société qui reposent essentiellement voire exclusivement sur l'organisation de nouveaux rapports sociaux, de nouvelles institutions juridiques et politiques, c'est-à-dire essentiellement ou exclusivement sur une nouvelle structuration des relations humaines médiatisées par le langage (et le symbolique en général) et fixées sous forme d'institutions, de lois, de règles et de coutumes, alors on a peu –ou pas– affaire à de la SF.
Lorsque la SF projette un futur où les descriptions sociales et politiques sont absentes ou très marginales au profit des technosciences, on n'a pas ou peu affaire à l'utopie. La SF est caractérisée par la prépondérance de la technoscience ; l'utopie pas celle du politique. Cela est vrai aussi pour les dystopies ainsi qu'en témoigne la distinction entre deux autres œuvres classiques et exemplaires : le Meilleur des Mondes d'Huxley est considéré comme relevant de la SF ; 1984 d'Orwell de l'(anti-)utopie. Ces qualifications ne sont jamais “pures” : le politique n'est pas absent du Meilleur des Mondes, science et technique ont un rôle dans 1984."
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