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31 octobre 2025

POLARS EN BARRE [96]

"Enfin, elle prit une chemise en carton beige et, traçant les lettres avec le plus grand soin, inscrivit ″CLARISSA LISLE″ sur le recto. Elle avait souvent pensé que c’était là la partie la plus satisfaisante d’une nouvelle enquête : un moment d’espoir pimenté d’excitation, le dossier vierge et les caractères bien nets symbolisant en eux-mêmes un nouveau commencement. Elle feuilleta son carnet avant de l’ajouter à la chemise. A part Sir George et son épouse brièvement entrevue, ses futurs compagnons dans l’île n’étaient encore que des noms, une liste de suspects possibles : Simon Lessing, Roma Lisle, Rose Tolgarth, Ambrose Gorringe, Ivo Whittingham ― de simples sons transcrits sur du papier, qui contenaient une promesse de mystère, de défi, étant donné la fascinante variété de la personnalité humaine. Et tous, le beau-fils, la cousine, l’habilleuse, l’hôte et l’ami, évoluaient comme des planètes autour d’un astre : la figure centrale de Clarissa Lisle."

 

Phyllis Dorothy James

 

 

 

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30 octobre 2025

POLARS EN BARRE [95]

"Si la littérature policière connaît une popularité dans le monde entier, c’est qu’elle possède une multitude de ramifications et réunit tous les éléments susceptibles de fasciner : l’énigme, le suspens, les émotions exerçant un attrait sur le lecteur qui prend plaisir à faire fonctionner ses matières grises, qui aspire à la justice, en même temps qu’il s’abandonne aux frissons qui le parcourent ; si elle connaît un tel succès, c’est qu’elle apporte une foule d’informations concrètes, permet d’explorer des régions inconnues et intéressantes, pose des problèmes qui, loin de peser sur le lecteur, lui apportent une distraction recherchée et méritée. L’évolution de la science n’a pas seulement eu pour effet de transformer la vie politique et sociale, elle a fait se développer également la littérature divertissante et plus particulièrement la policière. Cette évolution confirme la thèse de Bertolt Brecht selon laquelle le roman policier répond aux exigences de l’homme vivant à l’ère scientifique."

 

Waltraud Woeller

 

 

 

 

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29 octobre 2025

POLARS EN BARRE [94]

 

"Le traitement répétitif, sophistiqué, d’un univers de fiction où prédomine la pulsion de mort n’aura jeté le doute que dans les esprits étriqués, incapables de comprendre que Shakespeare demeure le scribe inspiré des plus belles pièces policières du répertoire.

Le revival incessant des grands mythes ― Sherlock Holmes, Philip Marlowe, Arsène Lupin, etc. ― a ancré dans notre imaginaire collectif les faits les plus marquants de l’histoire du genre. Mais cette mythologie voyante ― je songe à James Bond ― a souvent dérobé au regard du plus grand nombre la véritable vie de la « famille policière », la solidité de ses rites, la pérennité de sa forme jamais entamée par de fréquentes querelles de clochers. Le vieux débat instauré dès l’apparition du roman noir américain, entre celui-ci et le roman d’énigme, ressemble moins à une lutte intestine qu’à une parade nécessaire à la santé du genre.

Mais pourquoi chercher toujours à se justifier ?

(…)

L’émotion esthétique si souvent ressentie devant les chefs-d’œuvre d’une forme littéraire indéniable fait partie de la connivence. La littérature de mystère restera longtemps encore ― je l’espère ― un mystère de la littérature."

 

François Rivière

 

 

 

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28 octobre 2025

POLARS EN BARRE [93]

"Le sourire que j’avais en prenant congé de Harry me quitta dès que je fus dans ma voiture. D’ailleurs, dès le début mon sourire avait manqué de sincérité et je doutais qu’il fût très réussi. Parce que j’avais vraiment peur.

Les réflexions de Daisy commençaient à me sembler logiques. Je me souvenais de toutes ces énigmes jamais résolues, de ces meurtres et de ces suicides mystérieux, de ces morts soudaines. Quiconque est en rapport avec le monde du cinéma a entendu parler de ces histoires : il y en a des douzaines. Je comprenais aussi pourquoi. Si vous êtes intéressé à une affaire qui porte sur des millions de dollars et que le succès ou la faillite dépendent de la publicité, il est normal que vous fassiez tout votre possible pour que cette publicité soit bonne. Vous n’hésiterez pas à employer les grands moyens afin de protéger votre renom ou celui de votre produit."

 

Robert Bloch

 

 

 

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27 octobre 2025

POLARS EN BARRE [92]

"Je pénétrai dans un salon rempli de rébarbatifs grossiums en uniforme. Ils avaient entamé le breakfast autour d’une énorme table ronde, entourée d’un ballet de serviteurs en blanc chargé de plateaux.

Uniformes de l’armée, de la marine, de la RAF. Des bleus, des verts, des blancs, le tout impeccable et raide d’amidon. Des mains manucurées découpaient avec précaution des tranches de melon. Des visages tannés s’emplissaient de toasts et d’œufs. Des voix précises, habituées à commander, chuchotaient, bourdonnaient, sans un mot plus haut que l’autre. L’argenterie cliquetait sur les assiettes. Les serveurs silencieux observaient, surveillés par un maître d’hôtel survolté qui claquait des doigts, gesticulait en fronçant les sourcils pour garder son équipe sur le qui-vive. Tout bruit, tout mouvement cessèrent quand j’apparus avec Redlin. Les uniformes cessant de parler et de mastiquer ; les serveurs, telles des chauve-souris adaptées aux ultra-sons, interrompirent le service.

Redlin leva les bras comme un maître de cérémonie :

— Messieurs, puis-je avoir le plaisir de vous présenter M. Jack Le Vine, extraordinaire détective privé."

 

Andrew Bergman

 

 

 

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26 octobre 2025

POLARS EN BARRE [91]

"Chacun dans son coin, lui comme les autres dans un coin encore plus isolé que les autres, en face d’un autre coin où il regardait vivre les Koline comme s’il avait regardé des poissons dans un aquarium !

Seulement, dans son coin à lui, quelqu’un glissait insidieusement de l’arsenic, quelqu’un qui vivait quelque part dans la ville, qui marchait, qui respirait, qui entrait dans la maison, et qui avait décidé qu’il mourrait dans un temps déterminé.

Au fait, quel délai lui avait-on, accordé ? Car c’était dosé ! La personne à l’arsenic savait de lui quelque chose qu’il ignorait, la chose la plus mystérieuse qui soit : la date de sa mort !"

 

Georges Simenon

 

 

 

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25 octobre 2025

POLARS EN BARRE [90]

"Je tiens Simenon pour un grand romancier : le plus grand, peut être, et le plus vraiment romanesque que nous ayons eu en littérature française aujourd'hui."

André Gide (1939)

 

♦♦♦♦♦

 

"Je n'écris pas 'il pleuvait à verse', j'écris 'Maigret était trempé'."

Georges Simenon

 

♦♦♦♦♦

 

 

"Maigret s’était rarement senti aussi dépaysé, comme en dehors de la vie normale, avec un malaise semblable à celui qui nous prend quand, dans un rêve, le sol se dérobe sous nos pieds.

Dans les rues enneigées, les rares passants marchaient en s’efforçant de garder l’équilibre, les voitures, les taxis, les autobus roulaient au ralenti tandis qu’un peu partout des camions de sable ou de sel longeaient au pas les trottoirs.

Derrière presque toutes les fenêtres brûlaient des lampes électriques et la neige tombait toujours d’un ciel gris ardoise.

Il aurait presque pu dire ce qui se passait dans chacune de ces petites cases où les humains respiraient. Depuis plus de trente ans, il avait appris à connaître Paris quartier par quartier, rue par rue, et pourtant, ici, il se sentait plongé dans un monde différent, où les réactions des êtres étaient imprévisibles.

Comment vivait Félix Nahour, quelques heures plus tôt encore ? Quelles étaient ses relations exactes avec ce secrétaire qui n’en était pas un, avec sa femme et ses deux enfants ? Pourquoi ceux-ci étaient-ils sur la Côte d’Azur et pourquoi…

Il y avait tant de pourquoi qu’il ne pouvait que les aborder un à un. Rien n’était clair. Rien n’était net. Rien ne se passait comme dans d’autres familles, d’autres foyers."

 

Georges Simenon

 

 

 

 

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24 octobre 2025

POLARS EN BARRE [89]

"Elle finissait de payer le chauffeur. Puis elle avait surgi de l'obscurité du taxi. Elle s'était avancée dans la lumière éblouissante de la marquise. Dusty avait cillé. Son cœur avait fait un bond jusqu'au fond de sa gorge puis était retombé au creux de l'estomac. Il avait failli en lâcher les bagages !"

 

Jim Thompson

 

 

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