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28 mars 2021

LA COMMUNE DE PARIS - 1871 [XIX]

 

DITS ET ECRITS [5]

 

C’est aujourd’hui la fête nuptiale de l’idée et de la révolution.

Jules Vallès, 28 mars 1871

 

Ces abominables communeux ont brûlé solennellement la guillotine l’autre jour. Tu vois comme ils sont sanguinaires. Ils sont superbes d’entrain, de conviction tous ces bataillons. Quelle leçon pour Trochu ! S’il avait su se servir des forces dont il disposait ! Et pourtant il n’y a pas la même unanimité que lorsqu’il s’agissait de battre les Prussiens. Les amis de l’ordre ont une tendance irrésistible à franc-filer.

Alix Payen, 10 avril 1871

 

Comprend-on ce gouvernement qui s’obstine à considérer la révolution de Paris comme le fait d’une poignée de factieux. Une poignée de factieux qui tient en échec la plus belle armée que l’on ait jamais vue, et cela depuis six semaines et ils n’ont pas fini. Ils devraient comprendre qu’il y a quelque chose au fond, une idée qui vaut la peine d’être discutée, mais non, ils sont aveugles comme tout ce qui est vieux et tout ce qui est destiné à tomber. Pour moi je crois que c’est l’enfantement laborieux d’une ère nouvelle et non point l’agonie de la France.

 Louise Milliet, 4 mai 1871

 

Mais abstraction faite de ce qu’il s’agissait d’un simple soulèvement d’une ville dans des conditions exceptionnelles, la majorité de la Commune n’était pas socialiste, et ne pouvait pas l’être. Avec une faible dose de bon sens, elle aurait pu néanmoins obtenir avec Versailles un compromis utile à toute la masse du peuple, seule chose qu’il était possible d’atteindre à ce moment-là. En mettant simplement la main sur la Banque de France, elle aurait pu effrayer les Versaillais et mettre fin à leurs fanfaronnades.

Karl Marx, 22 février 1881

 

La Commune de Paris de 1871 a été le premier essai historique –faible encore– de domination de la classe ouvrière. Nous vénérons le souvenir de la Commune, en dépit de son expérience par trop restreinte, du manque de préparation de ses militants, de la confusion de son programme, de l’absence d’unité parmi ses dirigeants, de l’indécision de ses projets, du trouble excessif dans l’exécution et du désastre effroyable qui en résulta fatalement. Nous saluons dans la Commune –selon une expression de Lavrov– l’aube, quoique bien pâle, de la première République prolétarienne.

Léon Trotsky, 1920

 

La Commune de Paris ? Ce fut d’abord une immense, une grandiose fête, une fête que le peuple de Paris, essence et symbole du peuple français et du peuple en général, s’offrit à lui-même et offrit au monde. Fête du printemps dans la Cité, fête des déshérités et des prolétaires, fête révolutionnaire et fête de la révolution, fête totale, la plus grande des temps modernes, elle se déroule d’abord dans la magnificence et la joie (…) Mais dès le début, la Fête contenait le drame ; le drame reprenait son sens primordial, fête vécue par le peuple et pour le peuple, fête colossale accompagnée du sacrifice volontaire de l’acteur principal au cours de son échec, tragédie.

Henri Lefèbvre, 1965

 

La Commune, fondement de l’analyse marxiste des révolutions, fut une révolution qui se passa de l’analyse marxiste.

Henri Lefèbvre, 1965

 

La conscience ouvrière quitta, en somme, le sillage des révolutions bourgeoises ; elle n’avait plus besoin de s’alimenter uniquement du souvenir de celles de 1789 et de 1848, elle disposait désormais d’une ‘’révolution en habit d’ouvrier’’, comme dit Vallès.

Georges Haupt, 1971

 

L’histoire complexe de la Commune prête déjà en elle-même à la pluralité des interprétations divergentes. Sa complexité, c’est celle de tout phénomène révolutionnaire inachevé qui laisse la porte ouverte à toutes les promesses qu’il n’a pas su réaliser, donc aux ambiguïtés.

Georges Haupt, 1971

 

La Commune de Paris a ouvert l’ère historique des révolutions prolétariennes et socialistes. Elle nous offre le premier exemple historique d’une véritable dictature du prolétariat. Elle a permis à Marx et à Lénine de parfaire la théorie marxiste de l’Etat. (…) La Commune de Paris a inauguré l’ère de l’expropriation des expropriateurs (…) en y instaurant un régime d’autogestion ouvrière.

Ernest Mandel, 1971

 

La Commune est morte de son isolement.

Jacques Solé, 2008

 

La Commune est un événement politique complexe, où s’articulent et se nouent des temps et des espaces discordants, et autant de motivations politiques étroitement mêlées : un mouvement de révolte patriotique contre l’occupation étrangère, un soulèvement de l’opinion républicaine contre Versailles, un mouvement de rébellion contre l’Etat parasitaire, un mouvement révolutionnaire contre la bourgeoisie, le capital. Elle est un précipité de multiples contradictions, et elle est grosse d’autant de possibles.

Daniel Bensaid, août 2008

 

Les descendants des sans-culottes de 1792, les enfants des combattants de 1848, étaient à nouveau en armes.

Chris Harman, 2008

 

La Commune n’a jamais eu de chef.

Jacques Julliard, 2012

 

Au vrai, rien n’est clair dans les événements du printemps 1871.

Jacques Rougerie et Robert Tombs, 2012

 

L’insurrection a été le fait d’une population, d’un ‘’peuple’’ composite, dont on perçoit mal ce qui fait l’unité.

Jacques Rougerie et Robert Tombs, 2012

 

Le schéma d’explication d’inspiration ‘’marxiste’’, qui faisait de la Commune un moment exemplaire de la lutte des classes a été largement réfuté, et aucun lecteur sérieux de Marx ne le reproduit aujourd’hui. En 1871, Marx ne parlait d’ailleurs pas de lutte des classes, mais de ‘’guerre civile’’. La Commune a été bien davantage.

Jacques Rougerie et Robert Tombs, 2012

 

 

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Diégo Rivera

22 mars 2021

LA COMMUNE DE PARIS - 1871 [XVIII]

 

DITS ET ECRITS [4]

 

L'antithèse directe de l'Empire fut la Commune. Si le prolétariat de Paris avait fait la révolution de Février au cri de «Vive la République sociale», ce cri n'exprimait guère qu'une vague aspiration à une république qui ne devait pas seulement abolir la forme monarchique de la domination de classe, mais la domination de classe elle-même. La Commune fut la forme positive de cette république.

Paris, siège central de l'ancien pouvoir gouvernemental, et, en même temps, forteresse sociale de la classe ouvrière française, avait pris les armes contre la tentative faite par Thiers et ses ruraux pour restaurer et perpétuer cet ancien pouvoir gouvernemental que leur avait légué l'empire. Paris pouvait seulement résister parce que, du fait du siège, il s'était débarrassé de l'armée et l'avait remplacée par une garde nationale, dont la masse était constituée par des ouvriers. C'est cet état de fait qu'il s'agissait maintenant de transformer en une institution durable. Le premier décret de la Commune fut donc la suppression de l'armée permanente, et son remplacement par le peuple en armes.

La Commune fut composée des conseillers municipaux, élus au suffrage universel dans les divers arrondissements de la ville. Ils étaient responsables et révocables à tout moment. La majorité de ses membres était naturellement des ouvriers ou des représentants reconnus de la classe ouvrière. La Commune devait être non pas un organisme parlementaire, mais un corps agissant, exécutif et législatif à la fois. Au lieu de continuer d'être l'instrument du gouvernement central, la police fut immédiatement dépouillée de ses attributs politiques et transformée en un instrument de la Commune, responsable et à tout instant révocable. Il en fut de même pour les fonctionnaires de toutes les autres branches de l'administration. Depuis les membres de la Commune jusqu'au bas de l'échelle, la fonction publique devait être assurée pour un salaire d'ouvrier. Les bénéfices d'usage et les indemnités de représentation des hauts dignitaires de l'État disparurent avec ces hauts dignitaires eux-mêmes. Les services publics cessèrent d'être la propriété privée des créatures du gouvernement central. Non seulement l'administration municipale, mais toute l'initiative jusqu'alors exercée par l'État fut remise aux mains de la Commune.

Une fois abolies l'armée permanente et la police, instruments du pouvoir matériel de l'ancien gouvernement, la Commune se donna pour tâche de briser l'outil spirituel de l'oppression, le pouvoir des prêtres ; elle décréta la dissolution et l'expropriation de toutes les Églises dans la mesure où elles constituaient des corps possédants. Les prêtres furent renvoyés à la calme retraite de la vie privée, pour y vivre des aumônes des fidèles, à l'instar de leurs prédécesseurs, les apôtres. La totalité des établissements d'instruction furent ouverts au peuple gratuitement, et, en même temps, débarrassés de toute ingérence de l'Église et de l'État. Ainsi, non seulement l'instruction était rendue accessible à tous, mais la science elle-même était libérée des fers dont les préjugés de classe et le pouvoir gouvernemental l'avaient chargée.

Les fonctionnaires de la justice furent dépouillés de cette feinte indépendance qui n'avait servi qu'à masquer leur vile soumission à tous les gouvernements successifs auxquels, tour à tour, ils avaient prêté serment de fidélité, pour le violer ensuite. Comme le reste des fonctionnaires publics, magistrats et juges devaient être élus, responsables et révocables.

(…)

La multiplicité des interprétations auxquelles la Commune a été soumise, et la multiplicité des intérêts qu'elle a exprimés montrent que c'était une forme politique tout à fait susceptible d'expansion, tandis que toutes les formes antérieures de gouvernement avaient été essentiellement répressives. Son véritable secret, le voici : c'était essentiellement un gouvernement de la classe ouvrière, le résultat de la lutte de la classe des producteurs contre la classe des appropriateurs, la forme politique enfin trouvée qui permettait de réaliser l'émancipation économique du travail.

Sans cette dernière condition, la Constitution communale eût été une impossibilité et un leurre. La domination politique du producteur ne peut coexister avec la pérennisation de son esclavage social. La Commune devait donc servir de levier pour renverser les bases économiques sur lesquelles se fonde l'existence des classes, donc, la domination de classe. Une fois le travail émancipé, tout homme devient un travailleur, et le travail productif cesse d'être l'attribut d'une classe.

(…)

La classe ouvrière n'espérait pas des miracles de la Commune. Elle n'a pas d'utopies toutes faites à introduire par décret du peuple. Elle sait que pour réaliser sa propre émancipation, et avec elle cette forme de vie plus haute à laquelle tend irrésistiblement la société actuelle en vertu de son propre développement économique, elle aura à passer par de longues luttes, par toute une série de processus historiques, qui transformeront complètement les circonstances elles-mêmes. Elle n'a pas à réaliser d'idéal, mais seulement à libérer les éléments de la société nouvelle que porte dans ses flancs la vieille société bourgeoise qui s'effondre. Dans la pleine conscience de sa mission historique et avec la résolution héroïque d'être digne d'elle dans son action, la classe ouvrière peut se contenter de sourire des invectives grossières des laquais de presse et de la protection sentencieuse des doctrinaires bourgeois bien intentionnés qui débitent leurs platitudes d'ignorants et leurs marottes de sectaires, sur le ton d'oracle de l'infaillibilité scientifique.

Quand la Commune de Paris prit la direction de la révolution entre ses propres mains ; quand de simples ouvriers, pour la première fois, osèrent toucher au privilège gouvernemental de leurs « supérieurs naturels», les possédants, et, dans des circonstances d'une difficulté sans exemple, accomplirent leur oeuvre modestement, consciencieusement et efficacement (et l'accomplirent pour des salaires dont le plus élevé atteignait à peine le cinquième de ce qui, à en croire une haute autorité scientifique, le professeur Huxley, est le minimum requis pour un secrétaire du conseil de l'instruction publique de Londres), le vieux monde se tordit dans des convulsions de rage à la vue du drapeau rouge, symbole de la République du travail, flottant sur l'Hôtel de Ville.

Et pourtant, c'était la première révolution dans laquelle la classe ouvrière était ouvertement reconnue comme la seule qui fût encore capable d'initiative sociale, même par la grande masse de la classe moyenne de Paris - boutiquiers, commerçants, négociants - les riches capitalistes étant seuls exceptés. La Commune l'avait sauvée, en réglant sagement cette cause perpétuelle de différends à l'intérieur même de la classe moyenne : la question des créanciers et des débiteurs. Cette même partie de la classe moyenne avait participé à l'écrasement de l'insurrection ouvrière en juin 1848 ; et elle avait été sur l'heure sacrifiée sans cérémonie à ses créanciers par l'Assemblée constituante. Mais ce n'était pas là son seul motif pour se ranger aujourd'hui aux côtés de la classe ouvrière. Cette fraction de la classe moyenne sentait qu'il n'y avait plus qu'une alternative, la Commune ou l'empire, sous quelque nom qu'il pût reparaître. L'Empire l'avait ruinée économiquement par Bon gaspillage de la richesse publique, par l'escroquerie financière en grand, qu'il avait encouragée, par l'appui qu'il avait donné à la centralisation artificiellement accélérée du capital, et à l'expropriation corrélative d'une grande partie de cette classe. Il l'avait supprimée politiquement, il l'avait scandalisée moralement par ses orgies, il avait insulté à son voltairianisme en remettant l'éducation de ses enfants aux frères ignorantins, il avait révolté son sentiment national de Français en la précipitant tête baissée dans une guerre qui ne laissait qu'une seule compensation pour les ruines qu'elle avait faites : la disparition de l'Empire. En fait, après l'exode hors de Paris de toute la haute bohème bonapartiste et capitaliste, le vrai parti de l'ordre de la classe moyenne se montra sous la forme de l' « Union républicaine » qui s'enrôla sous les couleurs de la Commune et la défendit contre les falsifications préméditées de Thiers. La reconnaissance de cette grande masse de la classe moyenne résistera-t-elle à la sévère épreuve actuelle ? Le temps seul le montrera.

(…)

Si la Commune était donc la représentation véritable de tous les éléments sains de la société française, et par suite le véritable gouvernement national, elle était en même temps un gouvernement ouvrier, et, à ce titre, en sa qualité de champion audacieux de l'émancipation du travail, internationale au plein sens du terme. Sous les yeux de l'armée prussienne qui avait annexé à l'Allemagne deux provinces françaises, la Commune annexait à la France les travailleurs du monde entier.

(…)

 La Commune a admis tous les étrangers à l'honneur de mourir pour une cause immortelle. - Entre la guerre étrangère perdue par sa trahison, et la guerre civile fomentée par son complot avec l'envahisseur étranger, la bourgeoisie avait trouvé le temps d'afficher son patriotisme en organisant la chasse policière aux Allemands habitant en France. La Commune a fait d'un ouvrier allemand son ministre du Travail.

(…)

La Commune a fait aux fils héroïques de la Pologne l'honneur de les placer à la tête des défenseurs de Paris. Et pour marquer hautement la nouvelle ère de l'histoire qu'elle avait conscience d'inaugurer, sous les yeux des Prussiens vainqueurs d'un côté, et de l'armée de Bonaparte, conduite par des généraux bonapartistes de l'autre la Commune jeta bas ce colossal symbole de la gloire guerrière, la colonne Vendôme.

La grande mesure sociale de la Commune, ce fut sa propre existence et son action. Ses mesures particulières ne pouvaient qu'indiquer la tendance d'un gouvernement du peuple par le peuple. Telles furent l'abolition du travail de nuit pour les compagnons boulangers ; l'interdiction, sous peine d'amende, de la pratique en usage chez les employeurs, qui consistait à réduire les salaires en prélevant des amendes sur leurs ouvriers sous de multiples prétextes, procédé par lequel l'employeur combine dans sa propre personne les rôles du législateur, du juge et du bourreau, et empoche l'argent par-dessus le marché. Une autre mesure de cet ordre fut la remise aux associations d'ouvriers, sous réserve du paiement d'une indemnité, de tous les ateliers et fabriques qui avaient fermé, que les capitalistes intéressés aient disparu ou qu'ils aient préféré suspendre le travail.

Les mesures financières de la Commune, remarquables par leur sagacité et leur modération, ne pouvaient être que celles qui sont compatibles avec la situation d'une ville assiégée. Eu égard aux vols prodigieux commis aux dépens de la ville de Paris par les grandes compagnies financières et les entrepreneurs de travaux publics sous le régime d'Haussmann, la Commune aurait eu bien davantage le droit de confisquer leurs propriétés que Louis Napoléon ne l'avait de confisquer celles de la famille d'Orléans. Les Hohenzollern et les oligarques anglais, qui, les uns et les autres, ont tiré une bonne partie de leurs biens du pillage de l'Église, furent bien entendu, grandement scandalisés par la Commune qui, elle, ne tira que 8.000 francs de la sécularisation.

(…)

Mais, certes, la Commune ne prétendait pas à l'infaillibilité, ce que font sans exception tous les gouvernements du type ancien. Elle publiait tous ses actes et ses paroles, elle mettait le public au courant de, toutes ses imperfections.

Dans toute révolution, il se glisse, à côté de ses représentants véritables, des hommes d'une tout autre trempe ; quelques-uns sont des survivants des révolutions passées dont ils gardent le culte; ne comprenant pas le mouvement présent, ils possèdent encore une grande influence sur le peuple par leur honnêteté et leur courage reconnus, ou par la simple force de la tradition; d'autres sont de simples braillards, qui, à force de répéter depuis des années le même chapelet de déclamations stéréotypées contre le gouvernement du jour, se sont fait passer pour des révolutionnaires de la plus belle eau. Même après le 18 mars, on vit surgir quelques hommes de ce genre, et, dans quelques cas, ils parvinrent à jouer des rôles de premier plan. Dans la mesure de leur pouvoir, ils génèrent l'action réelle de la classe ouvrière, tout comme ils ont gêné le plein développement de toute révolution antérieure. Ils sont un mal inévitable ; avec le temps on s'en débarrasse ; mais, précisément, le temps n'en fut pas laissé à la Commune.

Karl Marx

 

 

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[Karl Marx, La guerre civile en France 1871, Editions Sociales (Classiques du marxisme), Paris, 1975, pages 62-74]

19 mars 2021

LA COMMUNE DE PARIS - 1871 [XVII]

 

DITS ET ECRITS [3]

 

L’exécution fut aussi folle que l’idée. 

Le 18 mars, à trois heures du matin, ces troupes de rencontre, sans vivres, sans leur sac, s’éparpillent dans toutes les directions, aux buttes Chaumont, à Belleville, au faubourg du Temple, à la Bastille, à l’Hôtel-de-Ville, place Saint-Michel, au Luxembourg, dans le XIIIe, aux Invalides. Le général Susbielle, qui marche sur Montmartre, commande à deux brigades, six mille hommes environ. Le quartier dort. La brigade Paturel occupe sans coup tirer le moulin de la Galette. La brigade Lecomte gagne la tour de Solférino et ne rencontre qu’un factionnaire : Turpin. Il croise la baïonnette : les gendarmes l’abattent, courent au poste de la rue des Rosiers, l’enlèvent et jettent les gardes dans les caves de la tour. Aux buttes Chaumont, à Belleville, les canons sont pareillement surpris. Le Gouvernement triomphe sur toute la ligne, d’Aurelles envoie aux journaux une proclamation de vainqueur ; elle parut dans quelques feuilles du soir.  

Il ne manquait que des chevaux et du temps pour déménager cette victoire. Vinoy l’avait à peu près oublié. A huit heures seulement, on commença d’atteler quelques pièces ; beaucoup étaient enchevêtrées, n’avaient pas d’avant-train. 

Pendant ce temps les faubourgs s’éveillent. Les boutiques matinales s’ouvrent. Autour des laitières, devant les marchands de vin, on parle à voix basse ; on se montre les soldats, les mitrailleuses braquées contre les voies populeuses, sur les murs une affiche toute humide signée Thiers et ses ministres. Ils parlent du commerce arrêté, des commandes suspendues, des capitaux effarouchés. «Habitants de Paris, dans votre intérêt, le Gouvernement est résolu d’agir. Que les bons citoyens se séparent des mauvais ; qu’ils aident la force publique. Ils rendront service à la République elle-même», disent MM. Pouyer-Quertier, de Larcy, Dufaure et autres républicains. La fin est une phrase de décembre 51 : « Les coupables seront livrés à la justice. Il faut à tout prix que l’ordre renaisse, entier, immédiat, inaltérable…» On parlait d’ordre, le sang allait couler. 

Les femmes partirent les premières comme dans les journées de Révolution. Celles du 18 mars, bronzées par le siège — elles avaient eu double ration de misère — n’attendirent pas leurs hommes. Elles entourent les mitrailleuses, interpellent les chefs de pièce : «C’est indigne ! qu’est-ce que tu fais là ?» Les soldats se taisent. Quelquefois un sous-officier : «Allons, bonnes femmes, éloignez-vous !» La voix n’est pas rude ; elles restent. Tout à coup, le rappel bat. Des gardes nationaux ont découvert deux tambours au poste de la rue Doudeauville et ils parcourent le XVIIIe arrondissement. A huit heures, ils sont trois cents officiers et gardes qui remontent le boulevard Ornano. Un poste de soldats du 88e sort, on leur crie : Vive la République ! Ils suivent. Le poste de la rue Dejean les rallie et, crosse en l’air, soldats et gardes confondus gravissent la rue Muller qui mène aux buttes tenues de ce côté par les soldats du 88e. Ceux-ci, voyant leurs camarades mêlés aux gardes, font signe de venir, qu’ils livreront passage. Le général Lecomte saisit leur mouvement, les fait remplacer par des sergents de ville et jeter dans la tour Solférino, ajoutant : «Votre compte est bon !» Les remplaçants ont à peine le temps de lâcher quelques coups de feu. Gardes et lignards franchissent le parapet ; un grand nombre d’autres gardes, la crosse en l’air, des femmes et des enfants débouchent sur le flanc opposé, par la rue des Rosiers. Lecomte cerné commande trois fois le feu. Ses hommes restent l’arme au pied. La foule se joint, fraternise, arrête Lecomte et ses officiers. 

Les soldats qu’il vient d’enfermer dans la tour veulent le fusiller. Les gardes nationaux parviennent à le dégager et, à grand-peine — la foule le prend pour Vinoy — le conduisent avec ses officiers au Château-Rouge, quartier général des bataillons de Montmartre. Là, on lui demande de faire évacuer les buttes. Il signe l’ordre sans hésiter, comme fit en 48 le général Bréa. L’ordre est porté aux officiers et soldats qui occupent encore la rue des Rosiers. Les gendarmes rendent leurs chassepots et crient : «Vive la République !» Trois coups de canon tirés à blanc annoncent à Paris la reprise des buttes. 

À la gauche de Lecomte, le général Paturel a vainement essayé de faire descendre par la rue Lepic quelques-uns des canons du Moulin de la Galette. La foule a arrêté les chevaux, coupé les traits, pénétré les soldats et ramené à bras les canons sur les buttes ; les soldats qui gardent le bas de la rue, la place Blanche, ont levé la crosse en l’air. Place Pigalle, le général Susbielle ordonne de charger la foule amassée rue Houdon. Intimidés par les appels des femmes, les chasseurs poussent leurs chevaux à reculons et font rire. Un capitaine s’élance, sabre en main, blesse un garde et tombe criblé de balles. Les gendarmes qui ouvrent le feu derrière les baraquements du boulevard sont délogés. Le général Susbielle disparaît. Vinoy, posté place Clichy, tourne bride. Une soixantaine de gendarmes faits prisonniers sont conduits à la mairie de Montmartre.  

Aux buttes Chaumont, à Belleville, au Luxembourg, le peuple avait également arrêté, repris ses pièces. A la Bastille, où le général Leflô manque d’être pris, la garde nationale fraternise avec les soldats. Sur la place, un moment de grand silence. Derrière un cercueil qui vient de la gare d’Orléans, un vieillard tête nue que suit un long cortège : Victor Hugo mène au Père-Lachaise le corps de son fils Charles. Les fédérés présentent les armes et entrouvrent les barricades pour laisser passer la gloire et la mort.

 

Prosper-Olivier Lissagaray

 

 

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[LISSAGARAY Prosper-Olivier, Histoire de la Commune de 1871, Maspero, Paris, 1981, pages 109-111]

 

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18 mars 2021

LA COMMUNE DE PARIS - 1871 [XVI]

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HIER ET AUJOURD'HUI

 

Il y a 150 ans, le peuple parisien  –artisans, ouvriers, fonctionnaires, petits commerçants, sans travail…– s’insurgea puissamment :

Contre une guerre et ses conséquences, la France occupée par la Prusse et les armées de Bismarck aux portes de Paris.

• Contre les souffrances et la misère générées par le siège de la capitale.

• Contre les menaces pesant sur la République renaissante après l’effondrement du second Empire consécutif à la lourde défaite de Sedan.

• Contre l’arrogance d’une élite conservatrice et monarchiste, désireuse de mater définitivement une ville aux traditions révolutionnaires vivaces et toujours susceptible de se rebeller à la moindre étincelle.

La population de Paris bouillonnait en sens divers depuis plusieurs mois, lorsque le 18 mars, elle répondit à une provocation du gouvernement de monsieur Thiers et créa l’événement, en chassant une autorité devenue indésirable et en montant à l’assaut du ciel du pouvoir politique.

Certes, cet ébranlement fut de courte durée et limité d’un point de vue spatial. Car le caractère éphémère des tentatives "communalistes" dans d’autres grandes cités françaises, comme Lyon ou Marseille, renforça l’isolement de Paris !

Certes, en 72 jours, il était impossible de déployer pleinement un programme de rupture radical, de surcroit dans un contexte de guerre civile qui mobilisait d’importantes ressources financières.

Par ailleurs, dans sa majorité, la Commune n’était pas "socialiste" comme l’écrivit Marx [1]. Et puis, difficile d’imaginer l’édification d’un "socialisme dans une seule ville" !

Néanmoins de réelles avancées sociales, démocratiques et sociétales purent être initiées dans ce court laps de temps, esquissant ainsi le visage d’une "République sociale, démocratique, laïque et universelle".

Liberté, égalité, fraternité. Un même fil conducteur, en 1871 comme en 1789 ou 1848 !

Surtout, la mobilisation populaire parisienne démontra une fois encore qu’un soulèvement contre l’injustice, l’oppression, la domination d’une classe bourgeoise étaient possibles, que "ceux d’en bas" pouvaient prendre en mains la conduite "de la Cité" en développant des formes de démocratie directe combinées au suffrage universel [2].

C’est là un enseignement majeur de cette séquence historique qui ne peut être gommé par l’épilogue d’une cruelle défaite.

Certes, le 21ème siècle n’est pas le 19ème siècle !

Certes, il serait vain de tenter d’imiter mécaniquement un épisode majeur de l'histoire des révolutions. Mais la mémoire subsiste et peut contribuer à féconder utilement le présent...

Finalement, le meilleur hommage à la Commune revient à s’inspirer de son audace créative pour dégager aujourd’hui une voie originale émancipatrice, en tenant compte des défis concrets de notre époque, en matière démocratique et sociale, mais aussi des enjeux posés par une crise écologique globale lourde de menaces pour l’avenir de l’humanité.

L’héritage de la Commune est ce que ses héritiers en feront, et c’est à travers les luttes actuelles et à venir qu’elle demeurera vivante.

 

 

[1]  "Mais abstraction faite de ce qu’il s’agissait d’un simple soulèvement d’une ville dans des conditions exceptionnelles, la majorité de la Commune n’était pas socialiste, et ne pouvait pas l’être. Avec une faible dose de bon sens, elle aurait pu néanmoins obtenir avec Versailles un compromis utile à toute la masse du peuple, seule chose qu’il était possible d’atteindre à ce moment-là. En mettant simplement la main sur la Banque de France, elle aurait pu effrayer les Versaillais et mettre fin à leurs fanfaronnades".

Karl Marx, lettre à F.Domela Nieuwenhuis, 22 février 1881, in Karl Marx & Friedrich Engels, Inventer l’inconnu, textes et correspondance autour de la Commune, La Fabrique, Paris, 2008, page 289.

 

[2] Qui excluait les femmes !

 

♦♦♦

 

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17 mars 2021

LA COMMUNE DE PARIS - 1871 [XV]

 

DU 18 MARS AU 29 MAI 1871

LES FAITS

 

 

18 mars

Sur ordre de Thiers, chef du gouvernement, l’armée tente de s’emparer des canons de la Garde nationale, qui avaient été financés par la population de Paris.

Soulèvement des Parisiens de l’Est et du Centre, parmi lesquels de nombreuses femmes.

La troupe refuse d’ouvrir le feu et met la crosse en l’air.

Exécution des généraux Lecomte et Thomas.

Thiers quitte Paris pour Versailles.

Le Comité central de la Garde nationale s’installe à l’Hôtel de ville.

L’insurrection du peuple de Paris ouvre la voie à une révolution.

 

19 mars

Le Comité central de la Garde nationale annonce la tenue d’élections pour élire un Conseil de la Commune.

Le gouvernement confie l’administration de Paris aux maires et députés de la capitale.

 

20 mars

Les troupes versaillaises occupent le Mont Valérien.

 

21 mars

Manifestation des Amis de l’ordre

 

22 mars

Echec sanglant de la seconde manifestation des Amis de l’ordre.

Une partie de la population des quartiers chics quitte Paris.

 

23 mars

L’assemblée des maires désigne l’amiral Saisset comme commandant en chef de la Garde nationale, mais le Comité central refuse cette nomination.

 

19-24 mars

Les négociations pour éviter la guerre civile entre les maires d’arrondissement, les députés de Paris et le Comité central de la Garde nationale échouent.

Les maires de Paris sont accueillis par des huées à l’Assemblée nationale (Versailles).

 

26 mars

Elections pour le Conseil de la Commune de Paris.

Thiers ordonne aux préfets de commencer à recruter des volontaires contre Paris.

 

27 mars

Clémenceau démissionne de son mandat de député.

 

28 mars

Proclamation de la Commune de Paris sur la place de l’Hôtel de Ville, devant une foule en liesse. On parle de 100.000 personnes présentes !

 

29 mars

La Commune nomme 10 commissions.

La Commune ordonne la remise des 3 derniers termes (9 mois) des loyers et suspend la vente des objets déposés au mont-de-piété.

Abolition de la conscription et de l’armée de métier.

 

2 avril

Attaque des Versaillais sur Courbevoie. Repli des Communards sur Paris. Début de l’affrontement et premières exécutions sommaires de prisonniers.

La Commune décrète la séparation de l’Eglise et de l’Etat. Suppression du budget des cultes.

Le maximum du traitement des fonctionnaires est fixé à 6.000 francs/an.

 

3-4 avril

Echec de la sortie fédérée direction Versailles.

Duval et plusieurs prisonniers sont fusillés sans jugement.

Assassinat de Gustave Flourens à Rueil-Malmaison par un gendarme.

Cluseret nommé délégué à la guerre.

Création d’une Commission de consultation pour préparer les décrets de la Commune.

 

5 avril

Création de la Ligue républicaine des droits de Paris qui mènera les tentatives de conciliation avec Versailles.

 

6 avril

La Commune décrète le désarmement des gardes nationaux anti-Communards.

Le décret des otages est voté en riposte aux exécutions versaillaises.

Arrestation de Mgr Darboy.

Mac Mahon est nommé commandant en chef de l’armée de Versailles.

 

7 avril

Vaine tentative de conciliation menée à Versailles par l’Union nationale des chambres syndicales du commerce et de l’industrie.

 

8 avril

Début du bombardement de Paris par l’artillerie de Versailles.

La Commune versera une pension à tous les blessés.

Manifeste de la Franc-maçonnerie.

 

9 avril

La Commune réaffirme l’obligation de déclaration préalable pour les journaux.

 

11 avril

Début des opérations menées par l’armée de Versailles.

Constitution de l’Union des femmes pour la défense de Paris et les soins aux blessés.

Délégation de francs-maçons à Versailles.

 

12 avril

Suppression des poursuites judiciaires pour les échéances (loyers, effets de commerce).

L’archevêque de Paris, Georges Darboy, otage de la Commune proteste contre les exécutions sommaires et propose d’être échangé contre Auguste Blanqui, emprisonné à Morlaix sur ordre de Thiers.

 

14 avril

La Commune interdit les arrestations arbitraires.

Début du bombardement d’Asnières où sont stationnées des troupes de la Commune.

Gustave Courbet, délégué aux Beaux-arts, crée la Fédération des artistes de Paris.

 

16 avril

Elections complémentaires pour le Conseil communal, suite à certaines défections. Forte abstention.

Constitution de la Cour martiale sous la présidence de Rossel.

 

17 avril

Moratoire des effets de commerce.

 

19 avril

La Commune adopte et diffuse une programmatique Déclaration au peuple français.

Les troupes de Versailles s’emparent d’Asnière.

Restrictions à la liberté de la presse.

 

20 avril

Interdiction du travail de nuit des ouvriers boulangers.

 

21 avril

Les francs-maçons tentent une conciliation entre la Commune et le gouvernement Thiers.

 

22 avril

La Commune met en place des boucheries municipales.

Des francs-maçons réclament la fin des combats et une trêve pour évacuer les habitants des communes bombardées.

 

24 avril

Réquisition des logements vacants abandonnés depuis le 18 mars.

 

25 avril

Thiers consent à observer une trêve de 8 heures pour permettre l’évacuation de Neuilly.

 

26 avril

Les francs-maçons décident d’aller planter leurs bannières sur les remparts. Ils sont chaleureusement reçus à l’Hôtel de Ville par la Commune.

 

27 avril

Décret de la Commune interdisant les amendes et retenues sur les salaires et les appointements.

 

28 avril

Formation d’une commission pour organiser l’enseignement laïque, primaire et professionnel.

Publication de l’appel de Delescluze au ‘’peuple des campagnes’’.

 

30 avril

Démission de Cluseret, délégué à la guerre, remplacé par Rossel.

Les francs-maçons éconduits par Thiers rallient la Commune.

Victoire des Républicains aux élections municipales dans de nombreuses villes de province.

 

1er Mai

Création d’un Comité de salut public.

 

3 mai

La redoute du Moulin-Saquet tombe.

 

4 mai

Interdiction du cumul des traitements.

 

5 mai

Suppression de divers journaux.

 

6 mai

Organisation de l’enseignement professionnel.

 

7 mai

Dégagement gratuit, au mont-de-piété, des objets engagés pour une somme ne dépassant pas 20 francs.

 

8 mai

Fixation du prix du pain.

Thiers adresse un ultimatum aux Parisiens.

 

9 mai

Le fort d’Issy tombe aux mains des troupes versaillaises.

Delescluze remplace Rossel au poste de Délégué à la guerre.

 

10 mai

La paix franco-allemande est signée à Francfort.

Les biens parisiens de Thiers sont saisis.

 

11 mai

Décret ordonnant la démolition de la maison de Thiers, place Saint-Georges.

 

12 mai

Ouverture d’une école professionnelle d’art industriel pour jeunes filles.

Révision des marchés conclus par la Commune, priorité aux coopératives ouvrières et obligation de salaire minimum.

 

13 mai

Les troupes versaillaises occupent le fort de Vanves.

 

14 mai

Thiers refuse la proposition d’échange de 74 otages contre le seul Auguste Blanqui.

 

15 mai

Déclaration de la minorité du Comité de salut public qui refuse les dérives autoritaires et fait sécession. Les minoritaires publient un manifeste.

 

16 mai

Démolition de la colonne Vendôme.

Gratuité de tous les actes des officiers publics.

 

17 mai

Pensions égales pour les femmes et concubines des Fédérés morts au combat, ainsi que pour les enfants, légitimes ou non.

Explosion de la cartoucherie de l’avenue Rapp.

 

19 mai

Décret de laïcisation de l’enseignement.

 

21 mai

Dans l’après-midi, les Versaillais entrent dans Paris, alors que la population parisienne assiste à un concert aux Tuileries.

Delescluze lance un appel à la résistance populaire.

 

22 mai

Début de la semaine sanglante.

Massacre au cimetière d’Auteuil : une cinquantaine de Fédérés sont exécutés, alors que la résistance des Communards est encore faible.

Les troupes versaillaises contrôlent les Champs-Elysées.

 

23 mai

Début des incendies.

Massacre de 300 Fédérés à la Madeleine.

Les troupes versaillaises occupent Montmartre.

Dombrowski est mortellement blessé rue Myrha.

 

24 mai

Massacre de 700 Fédérés au Panthéon.

6 otages de la Commune sont exécutés à la prison de la Roquette, dont Darboy, à l’initiative des Blanquistes.

Les Versaillais contrôlent le Quartier Latin.

L’Hôtel de Ville et la préfecture de police sont incendiés.

 

25 mai

Mise en place par les Versaillais d’une justice expéditive au Théâtre du Châtelet. En 4 jours, près de 4.000 Communards sont fusillés.

La Commune tient sa dernière séance.

Delescluze tué sur une barricade.

 

26 mai

50 otages de la Commune (11 religieux, 35 gendarmes, 4 mouchards du second Empire) sont fusillés rue Haxo.

Le Faubourg Saint Antoine est contrôlé par les Versaillais.

 

27 mai

Combats au Père Lachaise.

Combats dans Belleville et aux buttes Chaumont.

Fusillades massives à la prison de la Roquette. Plus de 3.000 exécutions en 3 jours.

 

28 mai

147 fusillés au Père Lachaise. Le mur deviendra le lien symbolique le plus fort de la mémoire de la Commune.

Mort de Varlin fusillé à Montmartre.

 

29 mai

Le fort de Vincennes capitule, les officiers sont fusillés.

Fin de la Commune de Paris.

Procès, exécutions et déportations de prisonniers communards commencent.

 

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LA COMMUNE DE PARIS - 1871 [XIV]

 

DITS ET ECRITS [2]

 

Samedi 18 mars, vers 3 heures du matin. Quatre mille hommes de troupe se massent au pied de la butte Montmartre, entament sa difficile ascension : il s’agit de reprendre les canons de la Garde nationale qui y sont parqués sous une surveillance négligente.

(…) Le sommet de la butte est conquis vers 7 heures 30.

(…) A Belleville, aux Buttes-Chaumont, à la Villette, la même opération est conduite par six mille hommes. Pour protéger leurs arrières, des troupes occupent la Cité, centre administratif de la capitale, la place de l’Hôtel de Ville et celle de la Bastille, neutralisent le faubourg Saint-Antoine et le 11e arrondissement.

A Montmartre pendant ce temps, il s’agit de descendre les canons du haut de la butte, par les pentes difficiles des petites rues. L’opération prend un retard catastrophique. Le tocsin sonne, le rappel bat, le peuple se réveille. Une foule de femmes, d’enfants, de gardes nationaux afflue sur la butte, qui est reconquise à 10 h 30 : les soldats du 88e se sont débandés, d’autres ont mis la crosse en l’air. Le général Lecomte qui les commande est fait prisonnier.

(…) Vers 16 heures, Clément Thomas, qui avait été sous le siège un médiocre général de la Garde nationale, et qui avait participé à la répression de l’insurrection de juin 1848, reconnu par un vieux républicain, est arrêté boulevard de Clichy. On conduit les deux généraux à un petit poste de la garde, au 6 de la rue des Rosiers. Vers 17 heures, c’est le drame : ils sont exécutés sommairement par un peloton confus de gardes nationaux et de lignards mêlés. Colère de foule : ce sang fut le seul à couler ce jour-là, avec celui d’un garde national, Turpin, sur la butte, et d’un colonel de cavalerie, tué place Pigalle.

Dès 9 heures, les troupes avaient dû également abandonner la Villette. Le 11e arrondissement s’est couvert de barricades, rue de la Roquette, au faubourg Saint-Antoine. A Belleville, fortement barricadé aussi, les soldats se sont laissé désarmer. Partout la troupe a fraternisé, place de la Bastille, place du Château-d’Eau [actuelle place de la République], au Luxembourg.

(…) Il n’y avait eu en somme que riposte à ce que Paris pouvait, non sans raison, considérer comme une tentative de coup d’Etat, réédition du 2 Décembre, monarchiste cette fois.

(…) Thiers prend une prudente fuite vers 16 heures, gagne Versailles, laissant l’ordre d’évacuation générale pour 18 heures.

La ville s’ébranle alors vraiment. Des colonnes populaires, pourtant à peine organisées, hésitantes, s’emparent sans coup férir des principales casernes, de la préfecture de police, du quartier général de la Garde nationale, place Vendôme. Quelques bataillons épars paradent devant l’Hôtel de Ville, plutôt pacifiquement. A 20 heures, Vinoy n’en donne pas moins l’ordre de l’évacuer : Ferry ne le fera qu’à 22 heures. Le Comité central de la Garde nationale s’y installe à minuit. Il n’avait joué dans la journée à peu près aucun rôle. Le voici maître inattendu de la capitale.

Jacques Rougerie

 

 

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[ROUGERIE Jacques, Paris insurgé. La Commune de 1871, Découverte Gallimard, Paris, 2019, pages 23-29]

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16 mars 2021

LA COMMUNE DE PARIS - 1871 [XIII]

 

 

ORIENTATION BIBLIOGRAPHIQUE

 

 

Contexte historique général

 

ABENDROTH Wolfgang, Histoire du Mouvement Ouvrier en Europe, Maspero, Paris, 1978

BOURGIN Georges et Rimbert Pierre, Le socialisme, PUF (Que sais-je ?), Paris, 1950

DEFRASNE Jean, La gauche en France de 1789 à nos jours, PUF (Que sais-je ?), Paris, 1972

DOMMANGET Maurice, Histoire du Drapeau Rouge, Le Mot et le Reste, Marseille, 2006

DROZ Jacques (Dir.), Histoire générale du socialisme ; Tome 1. Des origines à 1875, PUF (Quadrige), Paris, 1977

DUCHET Claude (Coord.), Manuel d’histoire littéraire de France, Tome V, 1848-1917, Editions Sociales, Paris, 1977

FERRO Marc, La faucille et le drapeau, le XIXème siècle, Plon, Paris, 2011

GUILLEMIN Henri, Nationalistes et nationaux (1870-1940), Gallimard (Idées), Paris, 1974

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HARMAN Chris, Une histoire populaire de l’humanité, La Découverte, Paris, 2011

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KRIEGEL Annie, Les internationales ouvrières, PUF (Que sais-je ?), Paris, 1964

LÖWY Michael (Dir.), Révolutions, Hazan, Paris, 2000

PIGENET Michel et TARTAKOWSKY Danielle (Dir.), Histoire des mouvements sociaux en France de 1814 à nos jours, La Découverte, Paris, 2012

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Les contemporains, acteurs et témoins

 

ADAMOV Arthur, La Commune de Paris 18 mars – 28 mai 1871. Anthologie, Editions Sociales, Paris, 1959

ANDRIEU Jules, Notes pour servir à l’histoire de la Commune de Paris en 1871, Payot, Paris, 1971

BAKOUNINE Michel, De la guerre à la Commune, textes de 1870-1871, Anthropos, Paris, 1972

BIDOUZE René, Lissagaray, la plume et l’épée, Editions de l’Atelier, Paris, 1991

BLANQUI Auguste, Maintenant, il faut des armes, La Fabrique, Paris, 2008

BROCHER Victorine, Souvenirs d’une morte vivante, une femme dans la Commune de Paris, Libertalia, Paris, 2017

CHUZEVILLE Julien, Léo Frankel, Communard sans frontières, Libertalia, Paris, 2021

CLUSERET/ROSSEL, 1871. La Commune et la question militaire, UGE-10/18, Paris, 1971

CORDILLOT Michel, Eugène Varlin, internationaliste et communard, Spartacus, Paris, 2016

DITTMAR Gérard, Louise Michel (1830-1905), Editions Dittmar, Paris, 2004

DITTMAR Gérald, Histoire des femmes dans la Commune de Paris, Editions Dittmar, Paris, 2003

DOMMANGET Maurice, Edouard Vaillant, un grand socialiste, 1840-1915, La Table Ronde, Paris, 1956

GALLO Max, Jules Vallès ou la révolte d’une vie, Laffont, Paris, 1988

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GODINEAU Laure, La Commune de Paris par ceux qui l’ont vécue, Parigramme, Paris, 2010

GUERIN Daniel, Anthologie de l’anarchisme, Maspero, Paris, 1970

GUILLEMIN Henri, L’avènement de M. Thiers, Utovie, Bats, 2001

HUGO Victor, Choses vues 1849-1885, Gallimard (Folio), Paris, 2018

KERBAUL Eugène, Nathalie Le Mel, une Communarde bretonne révolutionnaire et féministe, Le Temps des cerises, Paris, 2021

LABRANDE Christian, La Première Internationale, UGE-10/18, Paris, 1976

LAFARGUE Paul, La légende de Victor Hugo, Editions Mille et Une Nuits, Paris, 2001

LE CONSEIL GENERAL DE LA PREMIERE INTERNATIONALE, Procès-verbaux, 1870-1871, Editions du Progrès, Moscou, 1975

LEFRANCAIS Gustave, Souvenirs d’un révolutionnaire, de juin 1848 à la Commune, La Fabrique, Paris, 2008

LEONARD Mathieu, L’émancipation des travailleurs, une histoire de la Première Internationale, La Fabrique, Paris, 2011

MAITRON Jean, Le mouvement anarchiste en France. Des origines à 1914, Gallimard (Tel), Paris, 2018

MARX Karl, La guerre civile en France 1871, Editions Sociales, Paris, 1972

MARX/BAKOUNINE, Socialisme autoritaire ou libertaire ?, UGE-10/18, Paris, 1975

MARX Karl et ENGELS Friedrich, Inventer l’inconnu, textes et correspondance autour de la Commune, La Fabrique, Paris, 2013

MARX/ENGELS, Correspondance Tome XI (juillet 1870-décembre 1871), Editions Sociales, Paris, 1985

MARX Karl, MARX Jenny, ENGELS Friedrich, Lettres à Kugelmann, Editions Sociales, Paris, 1971

MARX/ENGELS et la Troisième République, 1871-1895, Editions Sociales/Messidor, Paris, 1984

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PAYEN Alix, C’est la nuit surtout que le combat devient furieux, Libertalia, Paris, 2020

REVERZY Eléonore, Témoigner pour Paris. Récits du Siège et de la Commune (1870-1871). Anthologie, Kimé, Paris, 2021

ROUGERIE Jacques, Le procès des Communards, Gallimard-Julliard (Archives), Paris, 1978

SAMINADAYAR-PERRIN Corinne, Jules Vallès, Gallimard (Folio Biographies), Paris, 2013

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VUILLAUME Maxime, Mes cahiers rouges au temps de la Commune, Actes Sud (Babel), Paris, 1998

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La Commune, l’art, la littérature, l’imaginaire

 

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CHABROL Jean-Pierre, Le canon fraternité, Tallandier, 1970

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DAENINCKX Didier, Le banquet des affamés, Gallimard (Folio), Paris, 2013

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DURAND-LE GUERN Isabelle, Le roman de la révolution. L’écriture romanesque des révolutions de Victor Hugo à George Orwell, Presses Universitaires de Rennes, Rennes, 2012

EUROPE (Revue), La Commune de Paris, N°64-65, Paris, Avril-Mai 1951

EUROPE (Revue), La Commune de Paris, n°499-500, Paris, Novembre-Décembre 1970

FLAUBERT Gustave et SAND George, Tu aimes trop la littérature, elle te tuera. Correspondance, Le Passeur, Paris, 2018

GASCAR Pierre, Rimbaud et la Commune, Gallimard (Idées), Paris, 1971

GUILLEMIN Henri, Hugo, Seuil (Ecrivains de toujours), Paris, 1951

HUGO Victor, L’année terrible, Gallimard/Poésies, Paris, 1985

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LANOUX Armand, Bonjour Monsieur Zola, Livre de Poche, Paris, 1972

LE CORRE Hervé, Dans l’ombre du brasier, Rivages, Paris, 2020

LIDSKY Paul, Les écrivains contre la Commune, Maspero, Paris, 1970

LIDSKY Paul, Les écrivains contre la Commune suivi de Des artistes pour la Commune, La Découverte, Paris, 2021

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RAGON Michel, Histoire de la littérature prolétarienne de langue française, Albin Michel, Paris, 2012

RIMBAUD Arthur, Œuvres complètes, Garnier-Flammarion, Paris, 2016

ROSS Kristin, L’imaginaire de la Commune, La Fabrique, Paris, 2015

ROSS Kristin, Rimbaud, la Commune de Paris et l’invention de l’histoire spatiale, Editions Amsterdam/Les Prairies Ordinaires, Paris, 2020

TARDI Jacques et VAUTRIN Jean, Le cri du peuple, 1/ Les canons du 18 mars ; 2/ L’espoir assassiné ; 3/ Les heures sanglantes ; 4/ Le testament des ruines, Casterman, Bruxelles-Paris, 2001-2004

VAUTRIN Jean, Le Cri du peuple, Livre de Poche, Paris, 1999

VESQUE Bernard, [Présentation Madeleine REBERIOUX], La Commune de Paris en bandes dessinées, Savelli - Éditions librairie de la Jonquière, Paris, 1977

ZOLA Emile, La débâcle, Livre de Poche, Paris, 1985

ZOLA Emile, Jacques Damour, Livre de Poche, Paris, 2020

 

La Commune

 

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CESAR Marc et GODINEAU Laure (Dir.), La Commune de 1871, une relecture, Créaphis, Ivry, 2019

CORDILLOT Michel (Coord.), La Commune de Paris 1871. Les acteurs, l’événement, les lieux, Ed. de l’Atelier, Paris, 2021

DUCLOS Jacques, La Commune de Paris à l’assaut du ciel, Editions Sociales, Paris, 1970

LEFEBVRE Henri, La proclamation de la Commune, 26 mars 1871, La Fabrique, Paris, 2018

LENINE, L’Etat et la Révolution, Editions du Progrès, Moscou, 1972

LENINE/KAUTSKY, La révolution prolétarienne et le renégat Kautsky/La dictature du prolétariat, UGE 10-18, Paris, 1972

Les 31 séances officielles de la Commue de Paris, Réimpression en Fac-similé, Maspero, Paris, 1971

LE TREHONDAT Patrick, La Commune au jour le jour, Syllepse, Paris, 2021

LISSAGARAY Prosper-Olivier, Histoire de la Commune de 1871, Maspero, Paris, 1982

MANDEL Ernest, De la Commune à Mai 68, La Brèche, Paris, 1978

NOEL Bernard, Dictionnaire de la Commune, Mémoire du Livre, Paris, 2000

ROUGERIE Jacques, Paris libre 1871, Seuil (Points), Paris, 2004

ROUGERIE Jacques, La Commune de 1871, PUF (Que sais-je ?), Paris, 2009

ROUGERIE Jacques, La Commune et les Communards, Gallimard (Folio Histoire), Paris, 2018

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SERMAN William, La Commune de Paris, Fayard, Paris, 2003

TALES C (Lacoste Maurice), La Commune de 1871, Spartacus, Paris, 2008

TOMBS Robert, Paris, bivouac des révolutions, Libertalia, Paris, 2016

TROTSKY Léon, Terrorisme et communisme, UGE-10/18, Paris, 1963

ZWIRN Jacques (Coord.), La Commune de Paris aujourd’hui, Les Editions de l’Atelier, Paris, 1999

 

LA COMMUNE DE PARIS - 1871 [XII]

 

DITS ET ECRITS [1]

 

L’état de Paris est grave, surtout à cause des prussiens qui sont là, tenant la ville sous leur canon. Thiers, en voulant reprendre les canons de Belleville, a été fin là où il fallait être profond. Il a jeté l’étincelle sur la poudrière. Thiers, c’est l’étourderie préméditée. En voulant éteindre la lutte politique, il a allumé la guerre sociale. 

Victor Hugo, 24 mars 1871

 

Hier bataille sous les murs de Paris. Flourens a été tué. Très brave et un peu fou. Je le regrette. C’était le chevalier rouge. 

Victor Hugo, 4 avril 1871

 

Bref, cette Commune est aussi idiote que l’Assemblée est féroce. Des deux côtés, folie. Mais la France, Paris et la République s’en tireront. 

Victor Hugo, 9 avril 1871

 

J’ai écrit ma protestation contre le déni d’asile du gouvernement belge aux vaincus de la Commune. Elle sera demain dans l’Indépendance. 

Victor Hugo, 25 mai 1871

 

Les nouvelles continuent d’être hideuses. Terreur de plus en plus blanche.

Victor Hugo, 5 juin 1871

 

Une protestation pour le droit d’asile, et contre la réaction était nécessaire ; je l’eusse faite dans l’Assemblée, je l’ai faite hors de l’Assemblée ; je ne veux ni du crime rouge, ni du crime blanc ; vous vous êtes tus, j’ai parlé ; j’ai combattu le vae victis ; l’avenir jugera. 

Victor Hugo, 13 juin 1871

 

Il y a un an, je rentrais à Paris. Quelles acclamations, alors ! Quelle réaction aujourd’hui ! Et qu’ai-je fait ? Mon devoir. 

Victor Hugo, 5 septembre 1871

 

Ce matin, je sors et je vois chez un papetier une photographie de Louise Michel avec ces mots : ‘’condamnée à mort’’. Serait-ce possible ? En ce moment, on est capable de tout. J’ai acheté ce portrait qui est terrible. 

Victor Hugo, 27 septembre 1871

 

Ecrit à Louise Michel en prison à Versailles et en danger de condamnation de mort. 

Victor Hugo, 5 octobre 1871

 

Je n’abandonnerai pas ces pauvres condamnés.

Victor Hugo, 9 novembre 1871

 

J’apprends à l’instant que Rossel, Ferré et un sergent appelé Bourgeois, condamné dont on ne savait pas même le nom, ont été fusillés ce matin mardi à Satory. (…) Voilà la peine de mort politique rétablie. Crime. 

Victor Hugo, 28 novembre 1871

 

Je défends les vaincus. J’ai défendu la Commune vaincue contre l’Assemblée victorieuse. Si la chance eût été pour l’Hôtel de Ville de Paris contre le Palais de Versailles, j’eusse défendu l’Assemblée contre la Commune. 

Victor Hugo, 15 décembre 1871

 

Il m’a demandé ce que je pensais du 18 mars. Je lui ai répondu que c’est l’Assemblée qui l’a fait. J’ai ajouté : Paris avait la fièvre héroïque, Paris avait une sortie rentrée. L’Assemblée a commis le crime de provoquer Paris, et elle a eu le reste de la colère de Paris contre la Prusse. C’est la faute des gens de Versailles. 

Victor Hugo, 15 décembre 1871

 

Louise Michel a comparu devant un conseil de guerre présidé par un colonel Delaporte. Elle a été condamnée à la déportation dans une enceinte fortifiée. Elle a été intrépide. C’est bien elle qui signait Enjolras. 

Victor Hugo, 17 décembre 1871

 

La peine de Gustave Maroteau est commuée. Ils n’ont pas osé le tuer. Ils l’envoient au bagne pour la vie. Voilà leurs façons de faire grâce.

Victor Hugo, 11 janvier 1872

 

Que suis-je ? Seul je ne suis rien. Avec un principe je suis tout. Je suis la civilisation, je suis le progrès, je suis la Révolution française, je suis la révolution sociale. 

Victor Hugo, 1873

 

 

 

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[Toutes les citations sont reprises de : HUGO Victor, Choses vues 1849-1885, Gallimard (Folio classique), Paris, 2018]

 

 

 

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