31 décembre 2022
"BOUQUINAGE" - 104
"Ce que la nature a mis un million d’années à construire, nous sommes capables de le détruire en un seul jour."
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29 décembre 2022
"BOUQUINAGE" - 102
"Il s'apprêtait à remonter l'escalier lorsque l'oncle Vernon se mit à parler.
- Drôle de façon d'aller dans une école de sorciers, le train. Les tapis volants sont en panne ?
Harry ne répondit rien.
- D'ailleurs, où se trouve-t-elle cette école ?
- Je ne sais pas, dit Harry en prenant conscience pour la première fois de son ignorance à ce sujet. Je dois prendre le train à la gare de King's Cross à onze heures, sur la voie 9¾, ajouta-t-il en regardant le billet que Hagrid lui avait donné.
Son oncle et sa tante l'observèrent avec des yeux ronds.
- La voie combien ?
- 9¾
- Ne dis pas de bêtises, dit l'oncle Vernon. La voie 9¾ n'existe pas.
- C'est écrit sur mon billet.
- Ils sont tous fous ! décréta l'oncle Vernon. Enfin, tu as de la chance, je devais de toute façon aller à Londres demain matin.
- Pour le travail ? demanda Harry, essayant d'être aimable.
- Non, j'emmène Dudley à l'hôpital. Il faut lui faire enlever cette queue en tire-bouchon avant qu'il entre au collège."
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27 décembre 2022
"BOUQUINAGE" - 100
"Tel que nous le définissons plus précisément, le romantisme est une critique culturelle, ou une révolte, contre la modernité capitaliste-industrielle au nom de valeurs passées, prémodernes ou précapitalistes. En tant que vision du monde, il est présent dans toute une série de créations culturelles: littérature et art, religion et philosophie, théorie politique, historiographie, anthropologie, et même économie politique. Il perçoit dans l'avènement de la société bourgeoise moderne une perte décisive de valeurs humaines, sociales et spirituelles qui existaient dans un passé réel ou imaginaire - le Moyen Âge, la Grèce homérique, le communisme primitif, et autres.
La contestation romantique s'inspire toujours de valeurs précapitalistes -sociales, culturelles ou religieuses- et se caractérise par la nostalgie d'un paradis perdu, d'un âge d'or du passé. Mais cela ne signifie pas qu'elle soit toujours réactionnaire et rétrograde. Le romantisme peut prendre des formes régressives, rêvant d'un retour imaginaire au passé, mais aussi des formes révolutionnaires qui aspirent à une utopie future faisant un détour par le passé.
(...)
La perspective romantique est donc en contradiction directe avec ce que l'on a appelé “le régime moderne d'historicité”, fondé sur la croyance que le “Progrès” est inévitable et sur le rejet du passé prémoderne comme “archaïque”.
(...)
Comme nous l'avons déjà suggéré, le romantisme ne conteste pas toujours le système capitaliste dans son ensemble, mais réagit souvent à un certain nombre de traits de la modernité qu'il trouve particulièrement odieux et insupportables. Voici quelques exemples marquants -dans une liste qui est loin d'être exhaustive- de composantes caractéristiques et interdépendantes de la civilisation moderne fréquemment déplorées ou dénoncées dans les œuvres romantiques :
1) Le désenchantement du monde. (...)
2) La quantification du monde. (...)
3) La mécanisation du monde. (...)
4) La dissolution des liens sociaux. (...)
À cette liste de thèmes romantiques prédominants, il convient d'ajouter celui qui est au centre de cette étude : la destruction de la nature. Le gaspillage, la dévastation et la désolation infligées à l'environnement naturel par la civilisation industrielle sont souvent un motif profond de tristesse et de colère romantique. Elle est intimement liée aux quatre objets précédents de la protestation romantique. Nostalgiques de l'harmonie perdue entre l'homme et la nature, consacrant parfois la nature comme l'objet d'un culte mystique, de nombreux romantiques ont observé avec mélancolie et désespoir les progrès de la mécanisation et de l'industrialisation, la conquête moderne de l'environnement qui a conduit à la disparition des espaces sauvages et à la défiguration de beaux paysages. L'empoisonnement de la vie sociale par l'argent et l'empoisonnement de l'air par la fumée industrielle sont compris par certains romantiques comme des phénomènes parallèles, issus de la même racine perverse - la domination impitoyable de l'utilitarisme et du mercantilisme, le pouvoir dissolvant du calcul quantitatif. Dans le monde capitaliste désenchanté, la nature cesse d'être un royaume magique et spirituel, une création divine ou la splendeur sacrée de la beauté. Les forêts, les rivières et les paysages sont réduits à l'état de matières premières, exploitées jusqu'à épuisement."
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26 décembre 2022
"BOUQUINAGE" - 99
"Hari Seldon n’avait rien d’impressionnant à l’époque. Comme l’empereur Cléon Ier, il avait trente-deux ans, mais ne mesurait qu’un mètre soixante-treize. Le visage lisse, les traits avenants, il avait les cheveux bruns, presque noirs, et ses habits trahissaient une touche de provincialisme.
Pour quiconque, dans les siècles futurs, connaîtrait Hari Seldon uniquement comme un demi-dieu de légende, il semblerait quasiment sacrilège de ne pas le voir assis dans un fauteuil roulant, arborer des cheveux blancs, un visage âgé et ridé, un calme sourire irradiant la sagesse. Cependant, même à cet âge fort avancé, son regard resterait chaleureux. Cela au moins ne changerait pas.
Et son regard était particulièrement chaleureux, pour l’heure, car son article venait d’être présenté au Congrès décennal. Il y avait même soulevé un certain intérêt et le vieil Osterfith lui avait dit, en hochant la tête: ‘’Ingénieux, jeune homme ; fort ingénieux.’’ Ce qui, venant d’Osterfith, pouvait être considéré comme satisfaisant. Fort satisfaisant.
Mais voilà que survenait un développement nouveau –autant qu’inattendu– et Seldon se demandait s’il était ou non de nature à renforcer son allégresse et accroître sa satisfaction.
Il fixait le jeune homme en uniforme – l’emblème au Soleil et à l’Astronef bien en évidence sur le côté gauche de sa tunique.
‘’Lieutenant Alban Wellis, dit l’officier de la garde impériale avant de ranger sa carte. Voulez-vous bien me suivre, monsieur ?’’
Wellis était armé, bien sûr. Et deux autres gardes attendaient devant sa porte. Seldon savait qu’il n’avait pas le choix, nonobstant les circonlocutions polies de l’autre, mais rien ne lui interdisait de chercher à en savoir plus : ‘’Pour voir l’Empereur ?
— Pour être conduit au Palais, monsieur. Tels sont les ordres que j’ai reçus.
— Mais pourquoi ?
— On ne me l’a pas dit. Et mes ordres sont stricts : vous devez me suivre… d’une manière ou de l’autre.
— Mais cela ressemble fort à une arrestation. Je n’ai pourtant rien commis de répréhensible.
— Disons plutôt, monsieur, que l’on vous fournit une garde d’honneur, si vous ne tardez pas davantage.‘’
Seldon ne tarda pas plus. Il pinça les lèvres, comme pour retenir de nouvelles questions, hocha la tête, avança d’un pas. Même si c’était pour être présenté à l’Empereur et recevoir ses félicitations, il n’y trouvait aucun plaisir. Il était pour l’Empire –enfin, pour la paix et l’unité des mondes formant l’humanité–, mais il n’était pas pour l’Empereur.
Le lieutenant le précéda, les deux autres fermant la marche. Seldon sourit aux passants qu’il croisait, essayant de prendre un air dégagé. Une fois sortis de l’hôtel, ils montèrent dans un véhicule terrestre officiel (Seldon caressa de la main les garnitures intérieures : jamais il n’avait vu quelque chose d’aussi ouvragé).
Ils se trouvaient dans un des secteurs les plus opulents de Trantor : ici, le dôme était assez haut pour vous donner l’impression d’être à l’air libre et l’on aurait pu jurer –même quelqu’un comme Hari Seldon qui était né et avait grandi dans un monde ouvert– qu’on était à la lumière naturelle. Certes, il n’y avait ni ombre ni soleil, mais l’air était léger et parfumé.
Et puis l’impression se dissipa, la courbure du dôme s’accentua, les parois se rétrécirent et bientôt ils s’enfonçaient dans un tunnel confiné, balisé à intervalles réguliers par l’emblème au Soleil et à l’Astronef et donc réservé (de l’avis de Seldon) aux véhicules officiels.
Une porte s’ouvrit et le véhicule s’y engouffra. Lorsqu’elle se referma derrière eux, ils se retrouvèrent à l’extérieur, pour de bon. Il n’y avait en tout et pour tout que deux cent cinquante kilomètres carrés de terres à l’air libre sur Trantor, et sur ces terres se dressait le Palais impérial. Seldon aurait aimé avoir l’occasion de parcourir ce domaine – moins parce qu’il abritait le Palais que parce qu’il hébergeait l’Université et, détail plus intrigant encore, la Bibliothèque Galactique. Et pourtant, en passant du monde clos de Trantor à cette enclave à l’air libre, envahie par les bois et les forêts, il était passé dans un monde où les nuages obscurcissaient le ciel et où un vent frais s’engouffrait dans sa chemise. Il pressa le contact qui refermait la vitre du véhicule.
A l’extérieur, le temps était maussade."
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25 décembre 2022
"BOUQUINAGE" - 98
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24 décembre 2022
"BOUQUINAGE" - 97
"Le fou, le prophète, Karl Glogauer, le voyageur temporel, le psychiatre névrosé manqué, qui voulait que les choses aient un sens, le masochiste, l'homme au désir de mort et au complexe messianique, l'anachronisme, se frayait un chemin à travers la place du marché, haletant.
Il avait vu l'homme qu'il cherchait. Il avait vu Jésus, le fils de Marie et de Joseph.
Il avait vu un homme en qui il reconnaissait, sans le moindre doute, un idiot congénital."
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23 décembre 2022
"BOUQUINAGE" - 96
"Une révolution, cela ne veut pas dire des drapeaux rouges et des barricades dans les rues, mais une refonte totale de l'exercice du pouvoir.
(...)
L'initiative doit venir d'en bas. Ce qui implique le surgissement de quelque chose qui n'a jamais existé en Angleterre, à savoir un mouvement socialiste activement soutenu par la grande masse de la population."
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22 décembre 2022
"BOUQUINAGE" - 95
"Il n'avait jamais auparavant existé un cinéma comparable à celui qui vit le jour en Russie après la Révolution d'Octobre: un cinéma nationalisé, financé par l’État, entièrement consacré à la subversion. Une prise de conscience nouvelle, la destruction des valeurs réactionnaires, l'anéantissement des mythes touchant l’Église, l’État et le Capital : ces objectifs allaient déterminer la structure idéologique de l’État prolétarien, son art, sa pédagogie. Le cinéma –considéré par Lénine comme le plus important des arts– devait assumer un rôle essentiel dans cette lutte, étant le mode d'expression artistique le plus accessible aux masses populaires dispersées et analphabètes.
Plusieurs facteurs contribuèrent au jaillissement sans précédent d'énergie créatrice qui marqua à jamais les accomplissements monumentaux du cinéma soviétique à ses débuts. Parmi ceux-ci, on trouve des tendances profondément libératrices et innovatrices délivrées du joug de l'ancien régime, les espoirs enthousiastes que suscitaient la création de la première société égalitaire et libre, et la décision prise par Lénine, Trotsky et Lunacharsky, en dépit de leur volonté bien affirmée de dictature du prolétariat, d'accorder toute liberté d'expression aux divers courants artistiques qui commençaient à se manifester alors. Cette attitude est particulièrement significative, étant donné que les opinions artistiques de Lénine étaient conservatrices et marquées de ce puritanisme ascétique que l'on trouve si souvent dans les milieux révolutionnaires.
Le résultat en fut une floraison sans précédent d'avant-gardes diverses et de mouvements intellectuels dans le théâtre, la peinture, la littérature, la musique et le cinéma –sans précédent, aussi du fait qu'elle était financée par l’État. Cette prolifération culturelle fut témoin du développement du constructivisme et du futurisme ainsi que de l'assimilation par l'expérience soviétique de l'expressionnisme et du surréalisme. De 1917 jusqu'au début des années 1920, la conformité de vue de l'art d'avant-garde et de l'idéologie extrémiste, la fusion de la forme et du fond (sujet âprement débattu depuis lors dans les pays de l'Ouest, et qui est par ailleurs, ne nous en cachons pas, celui de cet ouvrage) a réellement existé et a été mise en action. Durant un bref et éclatant instant de cette époque historique, l'engagement de l'artiste d'avant-garde a presque parfaitement coïncidé avec celui de la société dans laquelle il se trouvait. C'est là un des succès de la Révolution d'Octobre qui ne pourra jamais être effacé ; cependant, de même que les promesses d'une nouvelle société s'évanouirent pour céder la place au capitalisme d'État révoltant du totalitarisme stalinien, de même les noces de l'avant-garde et de l’État s'avérèrent transitoires. L'éternelle tension qui règne entre toute société organisée et l'artiste créateur se manifesta à nouveau de façon particulièrement brutale, sous forme de suicides, d'assassinats secrets, d'exils, d'émigration ou de reniements abjects. Le prix payé par Staline, dans le domaine de l'art, en vue d'obtenir la consolidation interne d'un régime de terreur –de même que dans l'Allemagne hitlérienne– fut l'anéantissement de toute modernité et la création d'un “art” perversement kitsch, d'un art de carte postale, baptisé honteusement “réalisme socialiste”. Étant donné que toute libération sur le plan social est impossible sans liberté personnelle (qui comprend la liberté pour l'art de se manifester sous toutes ses formes), Staline est la seule personne qui ait réellement mené une action “subversive” contre les valeurs de la Révolution d'Octobre."
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