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17 février 2019

"Dérèglement climatique" : changer de cap politique, vite !

 

Le «réchauffement climatique» de notre planète est irréversible. La seule question qui reste en suspens est celle du niveau de l'augmentation de la température moyenne de la terre d'ici la fin de ce siècle : + 2 ° ? + 3 ° ? + 4 ° ? + 5 ° ?

C'est dire l'importance des politiques qui doivent être mises en oeuvre pour limiter ce processus désastreux et l'ampleur des catastrophes qui en découleront inévitablement.

 

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Point positif  

 

La prise de conscience du danger augmente dans la population mondiale. Partout des mobilisations «pour le climat» se développent et la jeunesse -qui est l'avenir de l'humanité !- se mobilise dans de nombreux pays, notamment de manière remarquée et remarquable en Belgique !

 

Point négatif

 

L'inertie persistante des gouvernants qui refusent de traduire en actes leurs beaux discours dans les «sommets» régulièrement organisés pour débattre de cette inquiétante perspective ! Pas tellement parce qu'ils seraient complètement ignorants de la menace, mais surtout parce qu'ils sont d'abord au service du capital et d'une oligarchie financière qui refusent toute remise en cause fondamentale de leur modèle productiviste générateur de plantureux profits  !

 

 

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L'agenda politique, marqué entre autre par les élections européennes du 26 mai, contraint les différents partis à sortir un peu plus du bois et à se positionner sur les défis du «dérèglement climatique». D'autant que chez nous se dérouleront également des élections législatives et régionales !

Elecions.jpgLa mega campagne électorale ainsi engagée pousse chaque formation à présenter son programme en matière «écologique» et à décliner ses principales propositions pour changer la funeste trajectoire actuelle.

Un exercice d'autant plus obligé que les sondages -avec toutes les réserves d'usage qui s'imposent !- annoncent une «vague verte» !

Je ne discuterai pas, ici et maintenant, les mesures avancées par les uns et les autres, lesquelles par ailleurs restent parfois floues ou ambiguës. Sans doute que la phase de décantation n'a pas encore été menée à son terme dans tous les états-majors concernés...

J'y reviendrai donc prochainement.

Mais je veux souligner d'emblée un aspect important : l'adhésion d'une majorité populaire est indispensable pour marquer des points dans ce combat ; on ne pourra jamais inverser la funeste dérive actuelle sans l'appui et l'engagement du plus grand nombre.

Il est donc nécessaire de mettre en oeuvre des alternatives positives, à distance de toute «écologie punitive» !

 

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Pas question, par exemple, d'imposer de nouvelles «taxes carbone» ou une fiscalité injuste pour celles et ceux qui souffrent déjà ! Pas question d'ajouter de l'austérité à l'austérité ! Pas question d'aggraver les orientations socialement rétrogrades privilégiées par les différentes majorités fédérales depuis des décennies !

J'insiste, car il s'agit naturellement d'une ligne de démarcation politiquement décisive : l'illusion d'un «capitalisme vert» -avec sa poudre de perlimpinpin recommandée par les charlatans du «libéralisme vert»- nous conduit directement dans le mur. Seule une alternative «écosocialiste» -s'appuyant sur un dispositif cohérent en matière de «transition énergétique» et de «planification écologique»- peut rompre avec les turpitudes du mode de production/consommation dominant...

 

 

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Pour l'instant, sans entrer de manière trop approfondie et dans le détail de solutions de rechange, je voudrais insister sur quelques axes/pistes qui me paraissent essentiels.

[Je ne fixe aucune date pour ne pas enfermer le débat dans une question de calendrier. Il est évident que l'ensemble des mesures préconisées -ici et... ailleurs, car ce qui suit n'est pas un programme exhaustif!- doit être concrétisé le plus rapidement possible ; raison pour laquelle de meilleurs rapports de force doivent être construits dans les délais les plus brefs, ce qu'ont bien compris les jeunes qui descendent dans la rue semaine après semaine...]

 

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Ce qui est pressant :

 

} Sortie des énergies carbonées et du nucléaire. Objectif : 100 % d'énergies renouvelables.

} Socialisation du secteur de l'énergie ; mettre fin aux politiques de «libéralisation des marchés».

} Relance des transports publics : réouverture des lignes, points d'arrêt et gares supprimés au cours des dernières décennies ; augmentation significative de l'offre ; gratuité inconditionnelle.

} Mise en place d'infrastructures favorisant et sécurisant la mobilité douce (vélo...).

} Rénovation écologique du bâti/habitat, grand émetteur de gaz à effet de serre. Plan d'isolation public pour éliminer les «passoires thermiques».

} Contre l'agrobusiness, privilégier une agriculture paysanne écologique : produire qualitatif pour se nourrir qualitatif.

} Préserver la biodiversité. Refus des OGM, interdiction des pesticides.

} Eradication de la maltraitance animale. Protection des espèces en voie de disparition.

} Relocalisation de la production. Priorité aux circuits courts.

} Réduire le transport routier, développer le transport ferroviaire et maritime.

} Favoriser le rail au détriment du transport aérien.

} Sortie des industries nuisibles, comme l'industrie de l'armement. Avec reconversion garantie pour le personnel de ces secteurs.

} Interdiction de la publicité commerciale.

} En finir avec l'obsolescence programmée, notamment en allongeant la période de garantie des marchandises fabriquées aujourd'hui pour ne pas durer.

} Refuser le tout jetable.

} Décentralisation maximale des emplois décentralisables (administrations, services...) afin de limiter la mobilité professionnelle. Supprimer les véhicules de société (de confort).

} Réduction généralisée du temps de travail (sans pertes de revenus) : produire moins mais mieux.

} Justice climatique internationale : donner les moyens aux pays du Sud de se développer de manière soutenable ; mettre fin au pillage de leurs ressources et au commerce inéquitable.

} Abolir les «traités de libre échange» et stopper le déménagement permanent des marchandises au niveau mondial au profit des multinationales.

} Constitutionnaliser le principe d'une «règle verte» : ne plus prélever davantage que ce que la nature est capable de reconstituer, ni produire plus que ce qu'elle est en état de supporter.

 

 

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Clairement, tout ceci ne se fera pas sur un simple claquement de doigts !

Changer de modèle de production, de consommation et d'échange nécessite du temps et de la cohérence. C'est précisément aux «politiques», en connexion directe avec le(s) peuple(s), de relever ce défi et d'agir en conséquence.

Sans tarder, car les aiguilles du chrono tournent...chrono.jpg

 

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15 février 2019

Réchauffement climatique et mobilisation populaire

 

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La mobilisation continue, massive et auto-organisée des jeunes «pour le climat» constitue un fait inédit important. Elle secoue positivement l'inertie des gouvernants/décideurs. Elle a le mérite d'attirer spectaculairement l'attention sur la nécessité d'une indispensable et radicale «modification des lignes» en matière de protection de notre «écosystème» . Et elle favorise un vaste débat dans la société.

C'est d'ailleurs pourquoi elle inquiète tant les puissants, peu friands d'agitation réellement démocratique, toujours susceptible de créer de «l'instabilité» inopportune pour leur business  !

Ce n'est donc pas un hasard si des contre-feux ont d'ores et déjà été allumés pour préserver d'immuables privilèges de classe et de pouvoir.

Ainsi, d'aucuns s'efforcent d'infantiliser la population pour la convaincre qu'elle est la principale responsable de cette «crise écologique» qui ne peut plus être minimisée.

Cette manoeuvre, destinée à culpabiliser le plus grand nombre, n'est évidemment pas anodine. Le but est de faire accepter à chacun(e) de nouvelles mesures draconiennes d'austérité -repeintes en vert pour la circonstance !- au nom de la sauvegarde de la planète, «notre bien commun».

Nous présenter la facture de l'impasse environnementale actuelle afin d'épargner les véritables responsables de celle-ci, tel est le défi relevé par des «élites» qui ont les moyens de leurs ambitions !

Cette offensive idéologique ininterrompue exige une riposte.

Commençons par appeler un chat un chat, et une diversion une diversion ! Les grands coupables de l' «écocide» en cours ne sont pas les individus, et leurs efforts personnels de rédemption verte -aussi louables et pertinents soient-ils !- ne permettront pas, in fine, d'éradiquer le péril.

usines.jpgLa très lourde responsabilité du cul-de-sac actuel est bel et bien celle d'un mode de production/consommation qui a un nom : le capitalisme ! Lequel n'acceptera jamais une remise en cause inconditionnelle de sa nature profonde ! Car le principal mobile de ce système est l'accumulation illimitée d'argent ! Il n'a qu'une seule véritable obsession : la croissance... des profits ! Et peu lui importe le bien-être, l'épanouissement, le bonheur ou le futur des femmes et des hommes qu'il spolie !

Le cap doit donc être maintenu, sans fléchir. Il faut continuer à produire toujours plus, n'importe quand, n'importe comment et n'importe quoi. Il faut sans relâche inciter les «consommateurs» à acheter de manière compulsive un maximum de marchandises, afin que le pognon continue à couler à flots dans les coffres-forts de la classe possédante !

Tant qu'il n'y aura pas rupture anticapitaliste, l'humanité continuera à être sacrifiée sur l'autel de l'intangible finalité de la rentabilité financière à (très) court terme.

Or, le «capitalisme vert» est un fantasme qui semble bien durable !

Las, beaucoup continuent à le propager, même dans le «mouvement contre le réchauffement climatique». Beaucoup persistent à ignorer la responsabilité «systémique» décisive de la dérive mortifère accélérée de notre temps. Et beaucoup colportent une vision d'un monde désormais séparé en deux blocs. Mais attention, il ne s'agit plus de la «vieille» division entre bourgeoisie et prolétariat, ni celle plus récente entre oligarchie et peuple ! Non, il s'agit d'une opposition articulée autour de la priorité écologique (au demeurant incontestable), entre les informés et les ignorants (du dossier), entre les conscients et les insouciants (du danger), entre les éclairés (des effets nocifs de la surconsommation) et les obscurantistes (du consumérisme). Et comme il y a urgence -il est même sans doute déjà bien tard pour empêcher le basculement redouté...- le délai nécessaire pour convaincre est décrété épuisé !

Dès lors, ces belles âmes estiment qu'il va falloir agir vite pour protéger l'espèce humaine de ses propres turpitudes (recyclage de cette vieille antienne consistant à plante-pollue-36413668.jpgvouloir faire le bonheur des gens contre eux-mêmes!), en prenant d'autorité des mesures fortes et décomplexées contre «ceux-d'en bas» pour finalement épargner «ceux d'en haut» !

L'épisode de la «taxe carbone» sur le diesel automobile  -qui a servi de détonateur au mouvement des «gilets jaunes» en France- est illustratif de cette orientation austéritaire qui n'empêchera toutefois pas la catastrophe annoncée de se produire. N'en déplaise aux inconditionnels du libéralisme de toute obédience qui font obstinément confiance à ses recettes éculées pour résoudre les phases critiques d'une conjoncture.

Sans un changement de logiciel socio-économique et des choix énergétiques qui en découlent, aucune réponse crédible n'est envisageable, à terme.

Le capitalisme (vert) n'est pas un débouché au bouleversement climatique ! Il doit par conséquent être combattu pied à pied parce qu'il nourrit l'illusion d'être la solution alors qu'il est en réalité le problème !

Un mot concernant les théories d'un «effondrement» imminent et les prévisions d'une apocalypse incontournable pour l'espèce humaine.

Les tenants de cette conception catastrophiste considèrent qu'il est maintenant trop tard pour inverser le cours de notre destinée et qu'un «écroulement systémique global» est inéluctable ! Il ne s'agit donc plus de lutter contre le réchauffement climatique, il ne s'agit plus de tenter d'arrêter la course folle vers l'abîme, il s'agit de se préparer à la chute finale devenue inévitable (et même pour certains imminente !), afin d'en minorer les effets...

 

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Pour ce courant, il est aujourd'hui impossible de structurer une opinion majoritaire autour de l'exigence d'affronter les urgences écologiques, et les débats concernant une «transition énergétique» sont désormais incongrus car cette perspective sera trop longue à mettre en oeuvre !

L'action de masse, et sa traduction éventuelle dans le champ institutionnel, est jugée dépassée et les réponses collectives inopérantes. L'heure d'un Big Bang militant est arrivée, et il appartient maintenant à une minorité engagée (et parfois enragée ?) -qui elle a compris pleinement les enjeux vitaux de l'heure !- de promouvoir des actes de rébellion afin de montrer le chemin à suivre.

WWF-tigre-bengale-bengaalse-tijger-gallery2.jpgBref, au nom de la nécessité de renouveler l'approche du combat pour sauver la terre et les espèces qui la peuplent, voilà une bien ancienne «conception avant-gardiste» qui revient à la surface après avoir déjà été largement expérimentée sur d'autres terrains politiques, en particulier au vingtième siècle, avec des échecs retentissants à la clé !

Je ne sous-estime pas le risque d'une fin tragique [1], mais pour autant, je ne partage aucunement cette approche inspirée par l'effroi.

Il ne peut exister d'alternative que démocratique !

La société ne peut être transformée et le monde ne peut être changé si une majorité de la population mondiale ne le souhaite pas !

Sans une adhésion et une mobilisation massives, point d'issue défendable.

Car l'autre voie serait celle d'un projet totalitaire, celle d'une dictature d'un groupe restreint «détenteur de la vérité», qui serait seul autorisé à l'imposer à l'ensemble de la collectivité !

Ne pas permettre au plus grand nombre d'intervenir directement dans les domaines qui le concernent directement et qui déterminent son destin, conduira immanquablement à une déconvenue lourde de conséquences pour notre avenir ! Une minorité, aussi perspicace soit-elle, ne peut se substituer à l'immense majorité ! 

Il faut tirer à cet égard les enseignements du XXème siècle et de l'insuccès notoire des « projets émancipateurs ». Aucune dictature -brune, bleue, rouge ou... verte- ne peut répondre avec succès aux défis et aux enjeux d'une période historique ! Et aucune fin ne justifie les moyens, les moyens mobilisés devant toujours être en adéquation avec les fins visées [2] !

Une humanité différente, plus respectueuse des êtres humains et de la nature, débarrassée des affres du capital, de la lutte de tous contre tous et de la frénésie de l'enrichissement personnel, ne pourra être édifiée avec des méthodes autoritaires, brutales, despotiques !

Mais personne ne souhaite cela, me direz-vous ?

Pas sûr ! Ne fut-ce qu'inconsciemment...

Et puis des dynamiques nauséabondes peuvent se matérialiser à travers certains choix et certaines dérives d'une «écologie punitive», pour ne pas parler de «sectes vertes» prétextant savoir ce qui est bon pour la planète et pour les gens... à leur place !

Alors, de deux choses l'une : ou il est possible de construire des mobilisations et des majorités populaires capables de mener la lutte pour un sauvetage climatique efficient ; ou il est impossible de le faire dans les délais requis, et dans ce cas, désolé, l'avenir s'annonce encore plus sombre que ce que les porte-parole des théories catastrophistes appréhendent...

 

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Il n'existe aucun raccourci dans les confrontations politiques, ni aucune astuce permettant d'éviter un travail de construction «hégémonique» en faveur de projets de société «révolutionnaires» respectueux des êtres humains et de la nature, nécessairement en rupture avec les pratiques productivistes guidées par la recherche précipitée d'un maximum de gains financiers !

Bref, et ce sera ma conclusion stratégique provisoire : évitons le piège du «substitutisme» !

On ne remplacera pas le peuple comme acteur historique central par des minorités hardies qui s'octroieraient le droit de parler et d'agir à sa place !

Il n'existe pas de solution de rechange acceptable en dehors d'une dynamique de masse, et tout engagement (salutaire et stimulant) de groupes d'éclaireurs militants ne peut être fécond que dans un cadre mobilisateur plus ample...

Il serait dès lors contre-productif de refuser de s'investir encore  -au nom d'une hypothétique (proche) fin du (d'un) monde-  pour gagner l'hégémonie, idéologique, culturelle, politique... même si cet engagement est chronophage !

Ce n'est pas gagné ? Bien sûr ! C'est mal parti ? A l'évidence ! Mais la difficulté de réussir n'autorise pas l'enfermement dans un « avant-gardisme sui generis» synonyme d'impasse anti-démocratique...

 

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[1] En réalité, la principale menace pour l'espèce humaine n'est pas (seulement) «la crise du réchauffement climatique» ! Le danger numéro un reste une guerre nucléaire intégrale, car dans ce cas de figure, vu le stock d'armement accumulé depuis la fin du second conflit mondial, quelques minutes -au maximum quelques heures !- suffiront pour supprimer les conditions de toute vie sur terre ! Curieusement, ce péril semble de plus en plus négligé et ne suscite plus guère aujourd'hui de mobilisations significatives. Le temps des grandes manifestations du puissant «mouvement de la paix», que j'ai connues naguère, notamment dans les années 80 du siècle dernier, paraît ainsi révolu. Tout se passe comme si la chute du Mur de Berlin et l'évaporation de l'URSS avaient mis fin à toute menace militaire généralisée ! C'est gravement sous-estimer le caractère irrationnel du capitalisme globalisé et de ses dirigeants actuels ! Et penser que l'on peut accumuler des «armes de destruction massive» (pour reprendre le concept cyniquement popularisé par l'ineffable Colin Powell), sans qu'elles ne soient jamais utilisées, est un pari audacieux que je me garderai bien de tenir...

[2] Il n'est pas inutile de relire le vieux Trotsky concernant cette «dialectique de la fin et des moyens», souvent caricaturée par ses détracteurs ! Voir : TROTSKY Léon, Leur morale et la nôtre, Editions de la Passion, Paris, 2003. Ou, pour le dialogue à ce sujet avec le philosophe pragmatique Dewey : DEWEY John et TROTSKY Léon, Leur morale et la nôtre, La Découverte, Paris, 2014.

 

 

 

 

 

 

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12 février 2019

La campagne en folie (4)

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Information lue dans La Libre de ce mardi.

Depuis le 1er janvier 2015, le droit aux allocations d’insertion (versées aux chômeurs qui n’ont pas encore suffisamment travaillé pour bénéficier d’allocations de chômage) est limité, sauf exception, à un maximum de 36 mois.

Pour mémoire, cette infâme décision avait été prise par le gouvernement Di Rupo et a ensuite été renforcée par le gouvernement Michel !

En Wallonie, entre 2015 et août 2018, et conformément à cette législation socialement rétrograde, 29.495 personnes sont ainsi arrivées en «fin de droit» .

Sur les 19.000 personnes exclues en 2015, 26,3 % avaient trouvé du travail deux ans plus tard. C’est 5 % de moins qu’un «groupe de référence» de demandeurs d’emploi tirés au sort et présentant les mêmes caractéristiques en termes d’âge, de sexe et d’expérience professionnelle.

Plus de la moitié (53 %) n’était ni au travail, ni en formation, ni inscrite au Forem !

Bref, grâce à Elio et à Charles, fidèles relais de la doctrine néo-libérale, plus d'allocations, plus d'emplois, plus de perspectives professionnelles pour des milliers de personnes !

Et certains feignent de découvrir le «taux de pauvreté» particulièrement élevé dans ce pays...

 

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La campagne électorale bat son plein. Chaque jour apporte son lot de déclarations croquignolesques. Ce matin, à la RTBF, le vice-président du PS, Ahmed Laaouej, a apporté son soutien à la grève de ce 13 février et a estimé qu'il fallait rétablir la justice salariale. Fort bien.

Mais, nom d'un Schtroumpf, pourquoi son parti ignore-t-il cette légitime «justice salariale» lorsqu'il est au pouvoir ?

Petit rappel.

C'est le gouvernement Dehaene I (CVP-PS-SP-PSC) qui a traficoté notre système d'indexation, en instaurant par arrêté royal (24/12/1993) l' «indice santé lissé des prix à la consommation des quatre derniers mois» ! Une mesure combattue à l'époque par la FGTB, notamment dans le cadre de ses actions contre le tristement mémorable «plan global» !

C'est le gouvernement Dehaene II (même majorité CVP-PS-SP-PSC) qui a imposé une norme déterminant la marge d'augmentation des salaires («loi du 26 juillet 1996 relative à la promotion de l'emploi et à la sauvegarde préventive de la compétitivité» !), et qui enferme depuis lors toutes les négociations interprofessionnelles dans un carcan !

A moins de faire preuve d'un optimisme indécrottable, difficile d'accorder un semblant de crédibilité à une formation politique habituée aux gesticulations dans la période qui précède chaque élection, et sitôt oubliées dès l'entame de négociations pour une nouvelle participation gouvernementale (avec les droites, comme il se doit pour une «social-démocratie» fidèle gestionnaire du capitalisme) !

 

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Donc Kris Peeters a agité le spectre du «confédéralisme». Comme précisé précédemment dans cette rubrique, il s'agit juste d'un épouvantail brandi par un ministre aux abois, entièrement dévoué à la cause patronale, et soucieux de faire rentrer les syndicats dans le rang. La «paix sociale», plutôt que la «conflictualité sociale», afin de sauvegarder la «compétitivité» des entreprises, ou plus exactement pour leur garantir un maximum de profits...

Naturellement, les réactions scandalisées n'ont guère tardé, au nom de la défense de la sacro-sainte Belgique !

La «question nationale» reste un tabou pour beaucoup y compris au sein de «la gauche», à commencer par le PTB-PVdA !

Je ne partage pas cette frilosité.

Je suis favorable au droit (démocratique) des peuples à l'autodétermination et je n'ai donc pour ma part aucun problème avec la perspective d'une indépendance des peuples flamand et wallon.

Néanmoins, il faut être sérieux et ne pas se chatouiller pour se faire rire. Cette question n'est absolument pas à l'ordre du jour actuellement, ce qui devrait rassurer les passéistes de tous bords !

Mais c'est regrettable.

Car pousser un processus autonomiste jusqu'au bout contribuerait à affaiblir le «bloc bourgeois» hégémonique dans ce pays. Comment ne pas comprendre, en effet, qu'une Belgique unitaire (même «fédéralisée») sert les intérêts politiques d'une oligarchie qui a compris ce que ne veulent pas comprendre les «progressistes» : aucune majorité alternative n'est possible aujourd'hui, au niveau fédéral, tant le centre de gravité penche nettement à droite en Flandre et tant celle-ci est puissante dans le cadre étatique actuel !

Et « l'unité des travailleurs » s'inquiètent de bonne foi d'aucuns ? Mais en quoi l'existence d'Etats-nations empêche-t-elle la «coopération entre exploités» ? Si tel était le cas, nous ne pourrions jamais être solidaires des travailleurs ou des citoyens d'autres pays lorsqu'ils engagent le combat contre «leur» propre «classe dominante» !

En réalité, il est plus aisé de construire une solidarité entre des peuples souverains qu'entre des peuples soumis ou divisés par des «questions communautaires» !

Ce qui est surtout regrettable, pour ne prendre qu'un exemple, c'est le peu d'ardeur affiché par le mouvement syndical européen pour organiser des actions d'ampleur au niveau de l'Union européenne, et ainsi modifier des rapports de force pour l'instant défavorables !

Les jeunes, qui se mobilisent au niveau international contre le «dérèglement climatique», montrent la voie à suivre. Ils ne prétextent pas l'existence de frontières pour refuser d'agir...

 

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Les grèves du mercredi 13 février suscitent des lamentations du camp patronal qui annonce une «perte» de dizaines de millions € !

Voilà la preuve éclatante que les travailleurs produisent toute la richesse !

Dès qu'ils se mobilisent et mettent à l'arrêt la production, les chiffres d'affaire et les bénéfices sont menacés, les actionnaires sont affolés !

Les grands mouvements sociaux font très souvent tomber les masques...

 

 

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11 février 2019

La campagne en folie (3)

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A moins de débarquer de la planète Mercure, vous n'avez pu échapper au barnum médiatique autour de la campagne Sign for my future...

Celle-ci est portée par une vaste coalition, rassemblant des organisations non gouvernementales belges – WWF, Coalition climat, Inter-Environnement Wallonie, CNCD, Les Scouts…-, à côté de quelques «grands noms de l’économie belge» – Piet Colruyt, Thomas Leysen (Umicore), Nathalie Guillaume (Danone), Eric Domb (Pairi Daiza), Dominique Leroy (Proximus), Xavier Piesvaux (Delhaize), Grégoire Dallemagne (Luminus), Michel Croisé (Sodexo)…-, ainsi que quelques-unes des agences de presse les plus en vue de la place – Duval Guillaume, Publicis IPG Mediabrands… Et tout ce petit monde a embarqué tous les groupes de presse de Belgique afin de relayer leur message : il faut une politique climatique plus ambitieuse !

 

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Objectif : deux millions de signatures !

Des ONG qui s'associent avec des patrons -qui mènent quotidiennement des politiques antisociales-, des «communicants» et de grandes agences de presse ? Que signifie donc cette tendrement spontanée «union sacrée» ?

Simplement que cet étonnant (?) aréopage croit qu'il est possible de résoudre fondamentalement la «crise écologique» dans le cadre du mode de production/consommation actuel ! En d'autres termes, ils entonnent à l'unisson un refrain rabâché, celui du «capitalisme vert» ! Une illusion nocive.

Et pour la circonstance, menaçante ! Que penser, par exemple, de cette déclaration de l'un des initiateurs : «nous voulons montrer aux politiques que les citoyens, les entreprises et la société civile soutiennent cette ambition. Le monde politique sait ce qui se passe et sait ce qu’il faut faire. Mais ils ont peur des réactions de la population. Nous voulons les convaincre de manière positive». Mais bon sang, pourquoi devraient-ils craindre les citoyens et les citoyennes ? Si ce n'est parce qu'ils ont bien l'intention de leur présenter la facture de la lutte contre le réchauffement climatique, notamment en alourdissant la fiscalité et en multipliant des «taxes carbone» !

Répétons encore une fois que dans «capitalisme vert», le problème n'est pas la couleur mais le capitalisme ! Car celui-ci n'est ni écologiste ni social. Il est tout entier productiviste et obsédé par la course aux profits illimitée !

Dès lors, pour sortir de cette impasse mortifère, il faut rompre avec ce mode de production destructeur de la nature et de l'humain ! Ce qui nécessite la défense d'un programme d'actions et de mesures radicales, qui mettent à contribution les véritables responsables de la catastrophe actuelle, et pas «celles et ceux d'en-bas» qui prennent déjà tous les jours des coups, sur les plans économique, social, démocratique ou environnemental...

En attendant, je n'ai pas signé cet appel. Il en existe d'autres, plus convaincants. Plus fondamentalement, ce ne sont pas les appels et les pétitions qui changeront réellement la dangereuse trajectoire de l'humanité. Même -je le reconnais volontiers-, si ceux-ci peuvent jouer un rôle utile en matière de sensibilisation de l'opinion...

 

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A quelques mois du 26 mai, Elio Di Rupo et son parti entament un «virage (verbal) à gauche», qui semble donner la chair de poule à quelques nantis et effrayer ses adversaires politiques de droite : «le PS court après le PTB !» peut-on entendre, ici ou là. Il s'agit évidemment de postures théâtrales propres à tout période proche d'une élection.

Car il y a les campagnes électorales et les promesses des campagnes électorales ; puis il y a la réalité historique des partis qui vont soudainement mettre en oeuvre des mesures qu'ils n'ont jamais concrétisées jusqu'ici, alors qu'ils sont abonnés de longue date à l'occupation du pouvoir !

Le PS dirige la Fédération Wallonie-Bruxelles. Avant le coup de poignard de Benoit Lutgen, le PS était la force principale du gouvernement wallon. Au Fédéral, il a gouverné un quart de siècle consécutivement avant d'être dégagé par la «coalition suédoise». Et il détient de confortables majorités dans nombre de (grandes) villes wallonnes !

Or, il n'a jamais réalisé la moitié du quart des «annonces» fanfaronnes qu'il multiplie aujourd'hui ! Au contraire, il a impulsé des politiques de nature libérale partout où il siégeait dans des exécutifs : « plan global », « pacte des générations », privatisations, ratification des traités européens, chasse aux chômeurs, ... Et en matière d'enseignement, les profs se souviennent encore de la période de tutelle de Madame Onkelinx et des milliers de pertes d'emplois qu'ils ont dus subir. Ce qui avait d'ailleurs provoqué de nombreuses grèves à l'époque !

Certes, tout le monde peut commettre des erreurs et devant ce triste constat «avoir (tardivement !) le coeur qui saigne» ! Certes tout le monde peut changer et faire demain le contraire de tout ce qu'il a fait hier et avant-hier !

Mais l'on est en droit d'avoir des doutes et de ne pas partager l'optimisme béat de la clientèle social-démocrate. Personne n'est obligé de rejoindre les rangs des poissons rouges et aucune fatalité ne pousse à l'amnésie...

 

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La ministre flamande des Affaires intérieures, Liesbeth Homans (NVA), a annoncé lundi matin dans De Ochtend  (sur la VRT radio) son refus de nommer les bourgmestres de quatre communes à facilités de la périphérie bruxelloise (Drogenbos, Rhode Saint-Genèse, Linkebeek et Wezembeek-Oppem), parce que ces communes ont elles-mêmes envoyé les convocations électorales à la place du gouverneur !

Quelques tours de carrousel en vue ?

A l'évidence, le parti nationaliste flamand se recentre sur son core business.

Sans doute un principe de précaution à proximité de la mère de toutes les batailles électorales...

 

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Kris Peeters, Ministre de l'Emploi (?) et vice-premier ministre en «affaires courantes», n'apprécie pas la grève générale de ce mercredi 13 février. Il demande aux syndicats et au patronat de reprendre rapidement les négociations pour conclure un accord interprofessionnel.

En effet, l'heure est à la dramatisation, car CSC et FGTB n'apprécient pas l'aumône proposée (0,8 % d'augmentation salariale sur... 2 ans !) et remettent  -notamment-  en cause la funeste loi de 1996 qui encadre strictement l'évolution des salaires.

Or, rappelle-t-il, cette loi «comporte l’indexation automatique. La faire voler en éclats, cela rouvrirait la discussion sur tout, notamment le mécanisme de l’indexation et ça, c’est dangereux. Vous connaissez les revendications de la NVA et de certaines organisations… ».

Il ajoute que revenir avec cette problématique risquerait également de remettre en cause l’existence même du «Groupe des dix», cet organe de négociations entre patronat et organisations syndicales.

Et de menacer : «un blocage total entre syndicats et patronat donnerait de sérieux arguments aux confédéralistes

Kris Peeters, pilier de l'ex-pilier de l'Etat Belgique, le CVP (rebaptisé CD&V), et champion du «communautaire» en son temps, qui s'érige en défenseur de l'unité (fut-elle «fédérale») du pays, c'est un peu l'hôpital qui se moque de la charité. D'autant que son parti s'associe régulièrement, et sans beaucoup sourciller, à celui de Bart De Wever, à différents niveaux de pouvoir !

Il s'agit surtout d'une tentative de chantage grossier pour faire rentrer un mouvement social dans le rang, et assurer ainsi la «compétitivité» (lisez : les profits !) des entreprises dont il défend les intérêts depuis si longtemps.

Pourquoi tout ce monde distingué -PS y compris !- avait-il d'ailleurs mis en oeuvre cette mesure législative en 1996 ? Poser la question, c'est y répondre...



 

 

 

 

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05 février 2019

La campagne en folie (2)

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Peter Timmermans, administrateur de la FEB, repart en croisade contre notre système d'indexation. Cette fois-ci, au nom du... climat ! Il explique tranquilou que la lutte contre le réchauffement climatique a(ura) un coût, que de nouvelles taxes pour la population sont dès lors inévitables, que celles-ci vont probablement être répercutées dans les prix de certaines marchandises, et qu'il y aura par conséquent un impact sur l'index qui (re-)partira plus vite à la hausse ! Conclusion : il est temps de s'en débarrasser !

 

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Les travailleurs et allocataires sociaux, les personnes les plus fragiles de la société, sont ainsi conviés à régler la facture de la crise climatique alors que leur implication dans cette crise climatique est faible.

Ce ne sont pas eux qui déterminent les choix du système productif mais ce sont eux qui sont confrontés quotidiennement au matraquage publicitaire pour consommer toujours plus au nom de la «croissance» réputée indispensable.

En réalité, 300 multinationales sont responsables de 40 % des émissions de gaz à effet de serre ! En réalité, le secteur industriel est responsable de 90 % des déchets ! En réalité, un seul panneau dédicacé à la sacro-sainte publicité consomme autant que trois ménages !

A l'évidence, les représentants de la bourgeoisie gardent toujours le même cap, celui du cynisme de classe... durable !

Gardons donc le nôtre et rappelons sans cesse que le capitalisme n'est ni vert ni social. Il est tout entier productiviste et obsédé par la course aux profits illimitée !

Pour sortir de la crise du réchauffement climatique, il faudra rompre avec ce mode de production destructeur de la nature et de l'humain !

 

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Devant la mauvaise volonté des employeurs dans le cadre des négociations pour un accord interprofessionnel, le front commun syndical a décidé de partir en grève (générale) le mercredi 13 février.

Parmi les revendications avancées :

  • Une augmentation significative de nos salaires

  • Une réforme profonde de la nouvelle loi salariale

  • Une augmentation du salaire minimum à 14€/heure ou 2.300€/mois

  • Un salaire pour les jeunes qui permet de démarrer dans la vie

  • Moins de pression et un travail réalisable, plus de contrats à durée indéterminée et un meilleur équilibre entre vie privée et vie professionnelle

  • Une pension décente (minimum de 1.500 € net ; pension correspondante à 75% du salaire moyen du travailleur)

  • Une fin de carrière en douceur via le maintien des régimes de RCC (ex-prépension) et des emplois de fin de carrières à partir de 55 ans

  • Le relèvement des allocations de 10% au-dessus du seuil de pauvreté

  • L’égalité salariale : « À travail égal, salaire égal ! »

  • Le renforcement des services publics et la création de conditions de travail respectueuses des travailleurs

  • Des factures de biens et services essentiels (eaux, gaz, électricité) raisonnables

  • Une plus grande justice fiscale. Via un social shift qui déplacera la pression fiscale des épaules les plus faibles vers les plus fortunés, le capital et les grandes entreprises.

 

Mais suffira-t-il d'une seule action pour imposer un recul à un patronat arrogant et qui peut compter sur l'appui d'un gouvernement, même «minoritaire» ? Le mouvement syndical est-il prêt à renoncer à la mauvaise stratégie des mobilisations discontinues et est-il prêt, pour une fois, à poursuivre l'épreuve de force jusqu'à la victoire ?

A moins de 100 jours du méga scrutin du 26 mai, une défaite enfin infligée à cette coalition des droites, entièrement au service de la FEB et de ses succursales, serait la bienvenue !

Et un encouragement pour celles et ceux qui vont tenter de modifier les rapports de force sur le terrain institutionnel à l'occasion de ces élections...

 

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Maria Vindevoghel, ouvrière et ancienne déléguée à l’aéroport de Zaventem sera tête de liste du PTB à Bruxelles pour le Parlement fédéral.

Morceaux choisis : «Les travailleurs et travailleuses ont aussi le droit de voir enfin l'une des leurs au Parlement. Aujourd'hui, les politiciens votent des mesures pour nous faire travailler plus longtemps... Ils ne se rendent pas compte de l'impact de ce genre de mesures sur la vie des gens. Charger et décharger un avion, le nettoyer… faire cela à temps plein toute sa carrière est impossible. J'ai vu cela toute ma carrière. La plupart de mes collègues demandent de prendre un crédit temps à 55 ans. Cela risque d'être bientôt impossible. Il faut des travailleurs au Parlement, qui connaissent ces réalités, pour porter la voix de ceux et celles qui subissent les conséquences de ce genre de mesures et empêcher que des politiques de casse sociale passent facilement sans faire de bruit. Par ailleurs, je suis très fière, comme femme, d'être tête de liste pour le PTB. Dans ma carrière, j'ai travaillé dans des secteurs très féminins, et j'ai vu à quel point toutes les mesures antisociales du gouvernement touchaient particulièrement les femmes. Mais j'ai aussi vu de plus en plus de femmes se lever : qu'on pense au mouvement 'MeToo', aux nombreuses femmes actives chez les Gilets jaunes, les jeunes filles qui sont à la tête du mouvement climatique ou encore les actions prévues le 8 mars, pour la Journée internationale pour les droits des femmes. Ça ne peut que donner espoir!».

En effet.

L'arrivée d'une militante de cet acabit à la Chambre contribuerait à perturber un peu plus la quiétude de député(e)s acquis à la défense de l'ordre inégalitaire existant.

Si vous votez à Bruxelles, vous savez donc ce qu'il vous reste à faire...

 

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Rétropédalage pour la Ministre (flamande) de l'Environnement, Joke Schauvliege (CD&V).

Après avoir affirmé le week-end dernier que les manifestations et marches pour le climat n'avaient rien de spontané et étaient manipulées de l'extérieur, après avoir prétendu qu'elle tenait ses informations de la Sûreté de l'Etat, elle reconnaît maintenant ne pas avoir eu de contact avec celle-ci !

«Je m'excuse d'avoir tenu ces propos», a-t-elle déclaré dans l'émission De Ochtend sur Radio 1. «Je n'ai pas voulu travestir la vérité mais je suis allée trop loin», a-t-elle ajouté.

Des regrets qui ne sont manifestement pas acceptés par Groen qui déposera une motion de méfiance au Parlement régional. Non sans arrières pensées politiciennes vu l'échéance électorale qui approche à grands pas...

En attendant, le «complotisme» a le vent en poupe dans les milieux dirigeants des pays européens (voir par exemple les déclarations d'un Macron concernant le mouvement des Gilets jaunes).

Pourquoi cette fébrilité ? L'effet Trump ? Ou la peur des «élites» face au développement de mobilisations de masse qui remettent en cause leurs privilèges et leurs politiques...

 

 

 

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04 février 2019

La campagne en folie (1)

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Le PTB annonce «10 propositions pour une révolution climatique sociale».

Pour l'essentiel, la bonne direction est prise. Mais néanmoins ce qui est revendiqué est parfois interpellant.

 

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« Un seul ministre fédéral du climat » ? Si on suivait le parti de Raoul Hedebouw, nous aurions donc actuellement la seule Marie-Christine Marghem au poste de commande ! Je ne vois vraiment pas où se trouve la «valeur ajoutée» de cette perspective ? Il semble surtout que le PTB doive toujours apporter la preuve de son «belgicanisme» !

Plus sérieusement, ce n'est évidemment pas le nombre de ministres de l'environnement en Belgique, en Europe ou dans le monde qui peut avoir un impact sur le réchauffement climatique. Seules les politiques et les actions concrètes mises en oeuvre seront déterminantes. Et sans de puissantes mobilisations, comme celles organisées par les jeunes depuis quelques semaines, les «décideurs» tarderont à décider ce qui doit l'être !

Et à ce propos, ce qui est mis en avant ici est certes intéressant, mais il y a quand même quelques points d'interrogation. Rien par exemple concernant l'interdiction de la publicité commerciale ou des productions nuisibles comme les armements ; et rien d'explicite sur le nucléaire !

Même si cela figurera certainement dans le programme d'ensemble du PTB, cela aurait peut-être mérité d'être mis en avant comme priorités...

 

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Ecolo propose d’octroyer aux jeunes de 18 à 26 ans un «revenu de base» de 460 à 600 euros/mois. Celui-ci ne remplacerait pas les aides sociales préexistantes, mais supprimerait les allocations familiales et le crédit d’impôt pour enfant à charge ! Le coût de la mesure est estimé entre 3,2 et 4,8 milliards €/an, selon une étude du parti.

En d'autres termes, cette mesure phare sera essentiellement financée par les familles elles-même ! Typiquement Ecolo, parti parfaitement intégré au capitalisme. Ne lui viendrait-il jamais à l'idée de financer ses mesures «sociales» ou «environnementales» par un impôt sur la fortune ou par une lutte conséquente contre la fraude fiscale et la fuite des capitaux vers des paradis fiscaux (plusieurs dizaines de milliards € chaque année !) ?


La meilleure manière de lutter contre la misère des jeunes reste encore la création d'emplois de qualité pour toutes et tous, ce qui passe notamment par une réduction généralisée du temps de travail ! Et sur les salaires ainsi versés -contrairement à une «
allocation universelle»-, il y aura paiement de cotisations sociales et donc financement de la Sécu ! Décidément, cette campagne électorale nous promet au moins une fausse bonne idée par jour...

 

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C'est entendu, il y a urgence pour le climat. Des milliers de jeunes le rappellent chaque semaine dans la rue. Et toujours les politiciens de différents horizons prétendent les avoir compris.

Mais voilà qu'une mesure destinée à favoriser l'utilisation plus massive des transports collectifs   -la gratuité de ceux-ci !- ne leur plaît pas du tout ! Et François Bellot, MR et Ministre fédéral de la Mobilité, de monter en première ligne pour tirer à vue sur cette proposition. Figurez vous que «rien est gratuit» dans ce bas monde capitaliste et qu'il faudrait donc que la population paie d'une manière ou d'une autre, de préférence par une nouvelle augmentation de la fiscalité indirecte !

Pas d'argent, vraiment ? Et les dizaines de milliards € qui disparaissent annuellement dans la fuite des capitaux et la fraude fiscale ? Et les réductions d'impôts accordées généreusement aux multinationales et aux grandes entreprises ? Et le manque à gagner découlant du refus de taxer les grosses fortunes ? Sans oublier, évidemment, le pognon de dingue consacré à l'achat de chars ou d'avions de combat ! Et puis, il omet de mentionner que le recul de l'utilisation de la bagnole amènerait des économies : pour la Sécu, en diminuant -par exemple- le nombre de maladies pulmonaires, ou dans le budget des frais d'entretien des routes.

Bref, le discours geignard sur le «coût de la gratuité des transports publics» est une belle escroquerie. Tout est une question de choix... politiques. C'est ballot, non, Monsieur le Ministre ?

 

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Bart De Wever se dit «climato-réaliste» et veut prolonger le maintien en activité de Doel 4 et de Tihange 3 ! Pour lui, l'objectif de passer à 40 % d'énergies vertes dans les 7 prochaines années est «irréaliste» !

Par ailleurs, la N-VA veut la fin des négociations interprofessionnelles. Son modèle confédéral mise en effet sur des négociations à l’échelon des entreprises et sur la suppression de l’indexation automatique des salaires !

À 100 jours des élections du 26 mai, le ton des nationalistes flamands est ainsi donné : toujours plus à droite, toujours moins écologiste, suivant un chemin déjà emprunté ailleurs et par un modèle peu recommandable : celui des Etats-Unis de Donald Trump...

 

 

 

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15 janvier 2019

Pensées intempestives (XV)

 

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« Nous voilà déjà arrivés au "mécanisme des institutions démocratiques" en général. À cela on peut objecter tout d'abord que cette appréciation des institutions représentatives exprime une conception quelque peu schématique et rigide, que contredit expressément l'expérience de toutes les époques révolutionnaires du passé. D'après la théorie de Trotsky, toute assemblée élue ne reflète une fois pour toutes les idées, la maturité politique et l'état d'esprit du corps électoral que juste au moment où il se rend aux urnes. Ainsi l'assemblée démocratique serait toujours le reflet de la masse à l'époque des élections, tout comme, d'après Herschel, le ciel étoilé nous montre les astres, non pas tels qu'ils sont au moment ou nous les contemplons, mais tels qu'ils étaient au moment ou ils envoyaient leurs rayons d'une distance incommensurable sur la Terre. Ce qui revient à nier complètement tout lieu vivant entre les élus et leurs électeurs, toute influence réciproque des uns sur les autres.

 Cette conception est en contradiction complète avec toute l'expérience de l'histoire. Celle-ci nous montre, au contraire, que le fluide vivant de l'opinion populaire baigne constamment les corps représentatifs, les pénètre, les dirige. Sinon comment expliquer que, dans tous les parlements bourgeois, nous assistons de temps à autre aux plus réjouissantes cabrioles des "représentants du peuple", qui, animés soudain d'un "esprit nouveau", font entendre des accents tout à fait inattendus, que, de temps à autre, les momies les plus desséchées prennent des airs de jeunesse, et que les Scheidemann de tout acabit trouvent tout à coup dans leur poitrine des accents révolutionnaires, quand la colère gronde dans les usines, dans les ateliers et dans les rues ?

 Et cette action vivante et permanente des masses sur les corps élus devrait s'arrêter juste en période de révolution devant le schéma figé des enseignes de partis et des listes de candidats ? Tout au contraire ! La révolution crée précisément, par la flamme qui ranime, cette atmosphère politique vibrante, impressionnable, où les vagues de l'opinion publique, le pouls de la vie populaire, agissent instantanément et de la façon la plus admirable sur les corps représentatifs. C'est ce qui explique les scènes émouvantes bien connues au début de toutes les révolutions, où l'on voit des parlements réactionnaires ou très modérés, élus sous l'ancien régime par un suffrage restreint, se transformer soudain en porte-parole héroïques de la révolution, en organes de l'insurrection. L'exemple classique, c'est le fameux "Long parlement" en Angleterre, qui, élu et réuni en 1642, resta sept ans en fonctions, et refléta successivement tous les changements de l'opinion publique, des rapports des classes, du développement de la révolution, jusqu'à son point culminant, depuis la timide escarmouche du début avec la Couronne sous le contrôle d'un speaker "à genoux", jusqu'à la suppression de la Chambre des Lords, l'exécution de Charles Ier et la proclamation de la république !

 Et cette même transformation merveilleuse ne s'est-elle pas reproduite dans les états généraux de France, dans le parlement censitaire de Louis-Philippe, et même - le dernier exemple, le plus frappant, que Trotsky avait à sa portée - dans la quatrième Douma, qui, élue en l'an de grâce 1909, sous la domination la plus figée de la contre-révolution, se sentit animée soudain, en 1917, du souffle ardent de l'insurrection et devint le point de départ de la révolution !

 Tout cela montre que "le lourd mécanisme des institutions démocratiques" trouve un correctif puissant précisément dans le mouvement vivant des masses, dans leur pression continue. Et plus l'institution est démocratique, plus le pouls de la vie politique des masses est vivant et fort, et plus directe et précise est l'action exercée par elles, en dépit du caractère figé des programmes des partis et du caractère périmé des listes de candidats, etc. Assurément toute institution démocratique, comme toute les institutions humaines d'ailleurs, a ses limites et ses défauts. Mais le remède inventé par Lénine et Trotsky, qui consiste à supprimer la démocratie en général, est pire que le mal qu'il est censé guérir : il obstrue en effet la seule source vivante d'où peuvent sortir les moyens de corriger les insuffisances congénitales des institutions sociales, à savoir la vie politique active, libre, énergique, de larges masses populaires.

 Prenons un autre exemple frappant : le suffrage élaboré par le gouvernement des soviets. On ne voit pas très bien quelle portée pratique on lui attribue. De la critique que font Trotsky et Lénine des institutions démocratiques, il ressort qu'ils repoussent en principe les représentations nationales émanant d'élections générales et ne veulent s'appuyer que sur les soviets. Mais alors pourquoi a-t-on proclamé le suffrage universel ? C'est ce qu'on ne voit pas très bien. D'ailleurs, autant que nous sachions, ce suffrage universel n'a jamais été appliqué : on n'a jamais entendu parler d'élections à aucune sorte de représentation populaire faite sur cette base. Il est plus probable qu'il n'est resté qu'un droit théorique, existant uniquement sur le papier, mais, tel qu'il est, il n'en constitue pas moins un produit très remarquable de la théorie bolcheviste de la dictature. Tout droit de vote, comme d'ailleurs tout droit politique, doit être mesuré, non pas d'après des schémas abstraits de justice et autres mots d'ordre tirés de la phraséologie bourgeoise-démocratique, mais d'après les conditions économiques et sociales, pour lesquelles il est fait. Le suffrage élaboré par le gouvernement des soviets est précisément calculé en vue de la période de transition de la forme de société bourgeoise-capitaliste à la forme de société socialiste, en vue de la période de dictature du prolétariat. Conformément à l'interprétation de cette dictature, que représentent Lénine et Trotsky, ce droit n'est accordé qu'à ceux qui vivent de leur propre travail, et refusé aux autres.

 Or il est clair qu'un pareil système électoral n'a de sens que dans une société qui est aussi, économiquement, en état de permettre à tous ceux qui veulent travailler de vivre d'une façon digne et convenable de leur propre travail. Est-ce le cas de la Russie actuelle ? Etant donné les difficultés énormes contre lesquelles a à lutter la Russie, séparée du marché mondial et coupée de ses principales sources de matières premières, étant donnés la désorganisation épouvantable de la vie économique, le bouleversement total des rapports de production, par suite des transformations des rapports de propriété dans l'agriculture comme dans l'industrie et le commerce, il est évident qu'un nombre considérable d'existences sont tout à coup déracinées, jetées hors de leur voie, sans aucune possibilité matérielle de trouver dans le mécanisme économique quelque emploi que ce soit pour leur force de travail. Cela ne s'applique pas seulement à la classe des capitalistes et des propriétaires fonciers, mais encore aux larges couches de la classe moyenne et à la classe ouvrière elle-même. Car c'est un fait que l'effondrement de l'industrie a provoqué un reflux en masse du prolétariat des villes à la campagne, où il cherche à s'employer dans l'agriculture. Dans de telles conditions, un suffrage politique qui a pour condition économique l'obligation pour tous de travailler est une mesure absolument incompréhensible. Elle a pour but, dit-on, d'enlever les droits politiques aux seuls exploiteurs. Et tandis que des forces de travail productives sont déracinées en masse, le gouvernement des soviets se voit obligé, au contraire, dans un grand nombre de cas, de remettre pour ainsi dire en ferme l'industrie nationale aux anciens propriétaires capitalistes. De même, en avril 1918, il s'est vu contraint de conclure un compromis avec les coopératives de consommation bourgeoises. En outre, l'utilisation des techniciens bourgeois s'est révélée indispensable. Une autre conséquence de ce phénomène est que des couches croissantes du prolétariat, telles que les gardes rouges, etc., sont entretenues par l'Etat à l'aide des fonds publics. En réalité, ce système prive de leurs droits des couches croissantes de la petite-bourgeoise et du prolétariat, pour lesquelles l'organisation économique ne prévoit aucun moyen d'exercer l'obligation au travail.

 Un système électoral, qui fait du droit de vote un produit utopique de l'imagination, sans aucun lien avec la réalité sociale, est une pure absurdité. Et c'est pourquoi ce n'est pas un instrument sérieux de la dictature prolétarienne. C'est un anachronisme, une anticipation de la situation juridique qui pourrait se concevoir dans une économie socialiste déjà réalisée, mais non pas dans la période transitoire de la dictature prolétarienne.

Lorsque toute la classe moyenne, les intellectuels bourgeois et petits-bourgeois, au lendemain de la Révolution d'octobre, boycottaient pendant des mois le gouvernement des soviets paralysaient les communications par chemins de fer, par postes et télégraphes, l'enseignement, l'appareil administratif, se révoltant ainsi contre le gouvernement ouvrier, alors toutes les mesures de pression contre eux, retrait des droits politiques, de moyens d'existence économique, etc., s'imposaient bien entendu pour briser leur résistance avec un poing de fer. C'est en cela que se manifestait justement la dictature socialiste, laquelle ne doit reculer devant aucun moyen de contrainte pour imposer certaines mesures dans l'intérêt de la collectivité. Par contre, un système électoral qui prononce contre de vastes couches de la société une privation générale de droits, qui les met politiquement hors des cadres de la société, alors qu'il est lui-même hors d'état de leur faire économiquement une place à l'intérieur de ces cadres, une privation de droits qui n'est pas une mesure concrète en vue d'un but concret, mais une règle générale d'effet durable, ce n'est pas une nécessité de la dictature, mais une improvisation non viable.

 Mais avec cela la question est loin d'être épuisée : nous n'avons pas fait entrer en ligne de compte la suppression des principales garanties démocratiques d'une vie publique saine et de l'activité politique des masses ouvrières : libertés de la presse, d'association et de réunion, qui ont été entièrement supprimées pour tous les adversaires du gouvernement des soviets. Pour justifier la suppression de ces droits, l'argumentation de Trotsky sur la lourdeur des corps élus démocratiques est tout à fait insuffisante. Par contre, c'est un fait absolument incontestable que, sans une liberté illimitée de la presse, sans une liberté absolue de réunion et d'association, la domination des larges masses populaires est inconcevable.

Lénine dit : l'Etat bourgeois est un instrument d'oppression de la classe ouvrière, l'Etat socialiste un instrument d'oppression de la bourgeoisie. C'est en quelque sorte l'Etat capitaliste renversé sur la tête. Cette conception simpliste oublie l'essentiel : c'est que si la domination de classe de la bourgeoisie n'avait pas besoin d'une éducation politique des masses populaires, tout au moins au-delà de certaines limites assez étroites, pour la dictature prolétarienne, au contraire, elle est l'élément vital, l'air sans lequel elle ne peut vivre.

 "Grâce à la lutte ouverte et directe pour le pouvoir, les masses laborieuses accumulent en peu de temps une expérience politique considérable, et montent rapidement, dans leur évolution, d'un degré à l'autre."

 Ici, Trotsky se réfute lui-même, et réfute en même temps ses propres amis. C'est justement parce que cela est vrai qu'ils ont, en supprimant toute vie publique, obstrué eux-mêmes la source de l'expérience politique et des progrès du développement. Ou faut-il admettre que l'expérience et le développement étaient nécessaires jusqu'à la prise du pouvoir par les bolcheviks, mais qu'à ce moment-là ils avaient atteint leur apogée et devenaient désormais superflus ?(Discours de Lénine : La Russie est plus que mûre pour le socialisme ! ! !)

 En réalité, c'est tout le contraire. Précisément les tâches gigantesques auxquelles les bolcheviks se sont attelés avec courage et résolution nécessitaient l'éducation politique des masses la plus intense et une accumulation d'expérience qui n'est pas possible sans liberté politique.

La liberté seulement pour les partisans du gouvernement, pour les membres d'un parti, aussi nombreux soient-ils, ce n'est pas la liberté. La liberté, c'est toujours la liberté de celui qui pense autrement. Non pas par fanatisme de la "justice", mais parce que tout ce qu'il y a d'instructif, de salutaire et de purifiant dans la liberté politique tient à cela et perd de son efficacité quand la"liberté" devient un privilège.

 La condition que suppose tacitement la théorie de la dictature selon Lénine et Trotsky, c'est que la transformation socialiste est une chose pour laquelle le parti de la révolution a en poche une recette toute prête, qu'il ne s'agit plus que d'appliquer avec énergie. Par malheur- ou, si l'on veut, par bonheur -, il n'en est pas ainsi. Bien loin d'être une somme de prescriptions toutes faites qu'on n'aurait plus qu'à appliquer, la réalisation pratique du socialisme en tant que système économique, juridique et social, est une chose qui reste complètement enveloppée dans les brouillards de l'avenir. Ce que nous possédons dans notre programme, ce ne sont que quelques grands poteaux indicateurs qui montrent la direction générale dans laquelle il faut s'engager, indications d'ailleurs d'un caractère surtout négatif. Nous savons à peu près ce que nous aurons à supprimer tout d'abord pour rendre la voie libre à l'économie socialiste. Par contre, de quelle sorte seront les mille grandes et petites mesures concrètes en vue d'introduire les principes socialistes dans l'économie, dans le droit, dans tous les rapports sociaux, là, aucun programme de parti, aucun manuel de socialisme ne peut fournir de renseignement. Ce n'est pas une infériorité, mais précisément une supériorité du socialisme scientifique sur le socialisme utopique, que le socialisme ne doit et ne peut être qu'un produit historique, né de l'école même de l'expérience, à l'heure des réalisations, de la marche vivante de l'histoire, laquelle. tout comme la nature organique dont elle est en fin de compte une partie, a la bonne habitude de faire naître toujours. avec un besoin social véritable, les moyens de le satisfaire, avec le problème sa solution. Mais s'il en est ainsi, il est clair que le socialisme, d'après son essence même, ne peut être octroyé, introduit par décret. Il suppose toute une série de mesures violentes, contre la propriété, etc. Ce qui est négatif, la destruction, on peut le décréter, ce qui est positif, la construction, on ne le peut pas. Terres vierges. Problèmes par milliers. Seule l'expérience est capable d'apporter les correctifs nécessaires et d'ouvrir des voies nouvelles. Seule une vie bouillonnante, absolument libre, s'engage dans mille formes et improvisations nouvelles, reçoit une force créatrice, corrige elle-même ses propres fautes. Si la vie publique des Etats à liberté limitée est si pauvre, si schématique, si inféconde, c'est précisément parce qu'en excluant la démocratie elle ferme les sources vives de toute richesse et de tout progrès intellectuels. (A preuve les années 1905 et suivantes et les mois de février-octobre 1917.) Ce qui vaut pour le domaine politique vaut également pour le domaine économique et social. Le peuple tout entier doit y prendre part. Autrement le socialisme est décrété, octroyé, par une douzaine d'intellectuels réunis autour d'un tapis vert.

 Un contrôle public est absolument nécessaire. Sinon l'échange des expériences n'est possible que dans le cercle fermé des fonctionnaires du nouveau gouvernement. La corruption est inévitable (paroles de Lénine, Bulletin d'informations n°29). La pratique du socialisme exige toute une transformation intellectuelle dans les masses dégradées par des siècles de domination bourgeoise. Instincts sociaux à la place des instincts égoïstes, initiative des masses à la place de l'inertie, idéalisme, qui fait passer par-dessus toutes les souffrances, etc. Personne ne le sait mieux, ne le montre avec plus de force, ne le répète avec plus d'obstination que Lénine. Seulement il se trompe complètement sur les moyens : décrets, puissance dictatoriale des directeurs d'usines, punitions draconiennes, règne de la terreur, autant de moyens qui empêchent cette renaissance. La seule voie qui y conduise, c'est l'école même de la vie publique, la démocratie la plus large et la plus illimitée, l'opinion publique. C'est justement la terreur qui démoralise.

 Tout cela ôté, que reste-t-il ? Lénine et Trotsky ont mis à la place des corps représentatifs issus d'élections générales les soviets comme la seule représentation véritable des masses ouvrières. Mais en étouffant la vie politique dans tout le pays, il est fatal que la vie dans les soviets eux-mêmes soit de plus en plus paralysée. Sans élections générales, sans liberté illimitée de la presse et de réunion, sans lutte libre entre les opinions, la vie se meurt dans toutes les institutions publiques, elle devient une vie apparente, où la bureaucratie reste le seul élément actif. C'est une loi à laquelle nul ne peut se soustraire. La vie publique entre peu à peu en sommeil. Quelques douzaines de chefs d'une énergie inlassable et d'un idéalisme sans borne dirigent le gouvernement, et, parmi eux, ceux qui gouvernent en réalité, ce sont une douzaine de têtes éminentes, tandis qu'une élite de la classe ouvrière est convoquée de temps à autre à des réunions, pour applaudir aux discours des chefs, voter à l'unanimité les résolutions qu'on lui présente, au fond par conséquent un gouvernement de coterie - une dictature, il est vrai, non celle du prolétariat, mais celle d'une poignée de politiciens, c'est-à-dire une dictature au sens bourgeois, au sens de la domination jacobine (le recul des congrès des soviets de trois mois à six mois !). Et il y a plus : un tel état de choses doit provoquer nécessairement un ensauvagement de la vie publique : attentats, fusillades d'otages, etc.

 L'erreur fondamentale de la théorie Lénine-Trotsky est précisément que, tout comme Kautsky, ils opposent la démocratie à la dictature. "Dictature ou démocratie", ainsi se pose la question pour les bolcheviks comme pour Kautsky. Ce dernier se prononce bien entendu pour la démocratie, et même pour la démocratie bourgeoise, puisqu'il l'oppose à la transformation socialiste Lénine-Trotsky se prononcent au contraire pour la dictature d'une poignée de personnes, c'est-à-dire pour la dictature selon le modèle bourgeois. Ce sont là deux pôles opposés, tout aussi éloignés l'un et l'autre de la véritable politique socialiste. Le prolétariat, une fois au pouvoir, ne peut, suivant le bon conseil de Kautsky, renoncer à la transformation socialiste sous prétexte que "le pays n'est pas mûr" et se vouer à la seule démocratie, sans se trahir lui-même et sans trahir en même temps l'Internationale et la révolution. Il a le devoir et l'obligation, justement, de se mettre immédiatement, de la façon la plus énergique, la plus inexorable, la plus brutale, à l'application des mesures socialistes, et, par conséquent, d'exercer la dictature, mais une dictature de classe, non celle d'un parti ou d'une clique, dictature de classe, c'est-à-dire avec la publicité la plus large, la participation la plus active, la plus illimitée, des masse populaires, dans une démocratie complète. "En tant que marxistes, nous n'avons jamais été idolâtres de la démocratie formelle", écrit Trotsky. Assurément, nous n'avons jamais été idolâtres de la démocratie formelle. Mais du socialisme et du marxisme non plus, nous n'avons jamais été idolâtres. S'ensuit-il pour cela que nous ayons le droit, à la façon de Cunow-Lensch-Parvus de jeter au rancart le socialisme ou le marxisme quand ils nous gênent?  Trotsky et Lénine sont la négation vivante de cette question. Nous n'avons jamais été idolâtres de la démocratie formelle, cela ne veut dire qu'une chose : nous avons toujours distingué le noyau social de la forme politique de la démocratie bourgeoise, nous avons toujours démasqué le dur noyau d'inégalité et de servitude sociales qui se cache sous la douce enveloppe de l'égalité et de la liberté formelles, non pour la rejeter, mais pour inciter la classe ouvrière à ne pas se contenter de l'enveloppe, tout au contraire à conquérir le pouvoir politique pour la remplir d'un contenu social nouveau. La tâche historique qui incombe au prolétariat, une fois au pouvoir, c'est de créer, à la place de la démocratie bourgeoise, la démocratie socialiste, et non pas de supprimer toute démocratie. Mais la démocratie socialiste ne commence pas seulement en terre promise, quand aura été créée l'infrastructure de l'économie socialiste, à titre de cadeau de Noël pour le bon peuple qui aura entre-temps fidèlement soutenu la poignée de dictateurs socialistes. La démocratie socialiste commence avec la destruction de l'hégémonie de classe et la construction du socialisme. Elle n'est pas autre chose que la dictature du prolétariat.

 Parfaitement : dictature ! Mais cette dictature consiste dans la manière d'appliquer la démocratie, non dans son abolition, dans des interventions énergiques, résolues, dans les droits acquis et les rapports économiques de la société bourgeoise, sans lesquelles la transformation socialiste ne peut être réalisée. Mais cette dictature doit être l'œuvre de la classe et non d'une petite minorité dirigeante, au nom de la classe, autrement dit, elle doit sortir pas à pas de la participation active des masses, être sous leur influence directe, soumise au contrôle de l'opinion publique, produit de l'éducation politique croissante des masses populaires.

 Et c'est certainement ainsi que procéderaient les bolcheviks, s'ils ne subissaient pas l'effroyable pression de la guerre mondiale, de l'occupation allemande, de toutes les difficultés énormes qui s'y rattachent, qui doivent nécessairement défigurer toute politique socialiste animée des meilleures intentions et s'inspirant des plus beaux principes.

 Un argument très net en ce sens est fourni par l'emploi si abondant de la terreur par le gouvernement des soviets, et notamment au cours de la période qui a commencé après l'attentat contre l'ambassadeur allemand. Cette vérité banale que les révolutions ne sont pas baptisées à l'eau de rose est en soi assez insuffisante.

 Tout ce qui se passe en Russie s'explique parfaitement : c'est une chaîne inévitable de causes et d'effets dont les points de départ et d'arrivée sont la carence du prolétariat allemand et l'occupation de la Russie par l'impérialisme allemand. Ce serait exiger de Lénine et de ses amis une chose surhumaine que de leur demander encore, dans des conditions pareilles, de créer, par une sorte de magie, la plus belle des démocraties, la dictature du prolétariat la plus exemplaire et une économie socialiste florissante. Par leur attitude résolument révolutionnaire, leur énergie sans exemple et leur fidélité inébranlable au socialisme international, ils ont vraiment fait tout ce qu'il était possible de faire dans des conditions si terriblement difficiles. Le danger commence là où, faisant de nécessité vertu, ils créent une théorie de la tactique que leur ont imposée ces conditions fatales, et veulent la recommander au prolétariat international comme le modèle de la tactique socialiste. De même que, par là, ils s'exposent eux-mêmes tout à fait inutilement et placent leur véritable et incontestable mérite historique sous le boisseau de fautes imposées par la nécessité, ils rendent aussi au socialisme international, pour l'amour duquel ils ont lutté et souffert, un mauvais service quand ils prétendent lui apporter comme des idées nouvelles toutes les erreurs commises en Russie sous la contrainte de la nécessité, qui ne furent au bout du compte que des conséquences de la faillite du socialisme international dans cette guerre mondiale.

 Les socialistes gouvernementaux d'Allemagne peuvent bien crier que la domination des bolcheviks en Russie n'est qu'une caricature de dictature du prolétariat. Qu'elle l'ait été ou non, ce ne fut précisément que parce qu'elle était une conséquence de l'attitude du prolétariat allemand, laquelle n'était pas autre chose qu'une caricature de lutte de classes. Nous vivons tous sous la loi de l'histoire, et l'ordre socialiste ne peut précisément s'établir qu'internationalement. Les bolcheviks ont montré qu'ils peuvent faire tout ce qu'un parti vraiment révolutionnaire peut faire dans les limites des possibilités historiques. Qu'ils ne cherchent pas à faire des miracles. Car une révolution prolétarienne modèle et impeccable dans un pays isolé, épuisé par la guerre, étranglé par l'impérialisme, trahi par le prolétariat international, serait un miracle. Ce qui importe, c'est de distinguer dans la politique des bolcheviks l'essentiel de l'accessoire, la substance de l'accident. Dans cette dernière période, où nous sommes à la veille des luttes décisives dans le monde entier, le problème le plus important du socialisme est précisément la question brûlante du moment : non pas telle ou telle question de détail de la tactique, mais la capacité d'action du prolétariat, la combativité des masses, la volonté de réaliser le socialisme. Sous ce rapport, Lénine, Trotsky et leurs amis ont été les premiers qui aient montré l'exemple au prolétariat mondial; ils sont jusqu'ici encore les seuls qui puisent s'écrier avec Hutten : "J'ai osé !"

 C'est là ce qui est essentiel, ce qui est durable dans la politique des bolcheviks. En ce sens, il leur reste le mérite impérissable d'avoir, en conquérant le pouvoir et en posant pratiquement le problème de la réalisation du socialisme, montré l'exemple au prolétariat international, et fait faire un pas énorme dans la voie du règlement de comptes final entre le Capital et le Travail dans le monde entier. En Russie, le problème ne pouvait être que posé. Et c'est dans ce sens que l'avenir appartient partout au "bolchevisme". »

 

[Rosa Luxemburg, La révolution russe, 1918]

 

 

 

 

LE CENTENAIRE D'UN CRIME

 

Il y a 100 ans, Rosa Luxemburg, Karl Liebknecht et d'autres «Spartakistes» étaient assassinés par des militaires au service de la contre-révolution, les «Corps-Francs».

Cela se passait dans le cadre d'une «démocratie (bourgeoise) constitutionnelle», sous l'égide d'un gouvernement dirigé par le SPD -le Parti Social-Démocrate Allemand, fondé en 1875 du vivant de Karl Marx et Friedrich Engels !-.

Rosa Luxemburg fut une militante éminente de ce parti avant la première guerre mondiale, et était à cette époque la principale figure de son aile gauche.

L'écrasement de la «Révolution allemande», tant attendue par les Bochéviks qui voulaient briser leur isolement et attendaient d'autres victoires révolutionnaires en Europe et dans le monde, fut un moment tragique dans l'histoire du Mouvement ouvrier. Et ce revers sanglant favorisa la victoire ultérieure du nazisme, avec toutes les conséquences terribles qui en découlèrent...

Il existe naturellement une vaste bibliographie concernant Rosa, qu'il serait fastidieux de détailler ici.

Signalons, parmi les ouvrages les plus récents, le livre de Michael Löwy (Rosa Luxemburg, L'étincelle incendiaire, Le Temps des Cerises, Montreuil, 2018) qui regroupe quelques uns des principaux essais qu'il lui a consacrés au cours des dernières décennies...

 

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11 janvier 2019

Emploi : 2019 commence sur une fausse note !

 

téléphone rouge.pngNouvelle vague de départs chez Proximus (ex-Belgacom) !

Ce n'est pas la première et l'on doute que ce soit la dernière !

Cette fois, 1.900 membres du personnel devraient perdre leur job dans les prochains mois, alors que le niveau de l'emploi n'a cessé de dégringoler depuis 3 décennies : fin des années 80, l'ancienne RTT employait près de 30.000 personnes ; aujourd'hui, il en reste un peu plus de 13.000 !

Cette tendance lourde, connue de tous, n'a toutefois pas empêché l'expression de réactions incrédules de nombreux «acteurs politiques» qui répètent en boucle, dans les médias, n'avoir «rien vu venir», alors que l'Etat est toujours l'actionnaire majoritaire de l'opérateur historique des télécommunications ! Bien entendu, la menace de «licenciements secs» dans une société anonyme «de droit public», en pleine année électorale, n'est vraiment pas un timing idéal pour les partis qui se sont succédé au pouvoir et qui portent une responsabilité dans la «libéralisation» du secteur et le processus de privatisation de l'entreprise !

Et dans la galaxie syndicale ? Pas mieux ! CSC-Transcom et CGSP-Telecoms ont d'abord affiché leur surprise, avant d'exiger des «éclaircissements» du top management de Proximus dans le cadre de l'ouverture d'une «concertation». Sous la pression de leurs affiliés mécontents, les «organisations syndicales représentatives» appellent finalement à la grève ce mardi 15 janvier, le jour même où ils devraient rencontrer la direction pour déterminer... un calendrier de négociations !

Du côté patronal, on a eu droit aux couplets traditionnels sur les «évolutions technologiques» (en l'occurrence ici, le «digital»), la «concurrence de plus en fibre.jpegplus rude», ou les contraintes économiques de la globalisation financière, toutes «réalités» qui rendraient indispensables une restructuration supplémentaire, rebaptisée pour la circonstance «transformation» ! La créativité des «communicants» n'a décidément pas de limites...

Bref, chaque intervenant connaît sa partition, et au delà d'une phase transitoire nécessaire à la gestion du choc social, surtout pour les principaux intéressés, tous espèrent sans doute engager une discussion afin de pouvoir adopter un «plan social» qui permettra de dégager sans trop de remous le personnel ciblé : les agents statutaires, âgés et qui n'ont pas les qualifications suffisantes pour affronter les métamorphoses du monde numérisé ! Gageons que l'accent sera mis sur le «volontariat», tant en matière de reconversions internes que de départs, sous une forme ou une autre : congé préalable à la retraite, pré-pension ou pension, voire réorientation vers d'autres entreprises ou administrations. Mais il n'est toutefois pas assuré que cet exercice suffise à éviter la distribution de C4. De toutes les façons, quelles que soient les modalités négociées, il y aura des pertes d'emplois !

Ce scénario-catastrophe s'inscrit sans surprise dans une triste continuité, que d'aucuns feignent d'ignorer ou d'oublier.

L'occasion de rafraîchir les éventuelles mémoires défaillantes.

  • 21 Mars 1991 : la «loi sur l’autonomie de gestion des entreprises publiques» est adoptée. Le ver de la libéralisation et de la privatisation entre alors dans le fruit des «entreprises publiques autonomes» ainsi créées. Elle répond aux directives d'une l'Union européenne désireuse de briser les «monopoles du secteur public». Les dirigeants syndicaux de l’époque réagissent de manière timorée, quand ils ne se réjouissent pas de cette modification législative qui, à leurs yeux, ne peut que renforcer ces entreprises qui seront confrontées à une concurrence impitoyable.

  • 1992-1994 : Belgacom voit officiellement le jour et les premiers changements internes importants ne tardent pas. Un système d’évaluation des agents est notamment introduit dans le cadre d’un statut administratif aménagé, qui favorise un processus «d’individualisation» pénalisant pour la solidarité entre membres du personnel. Cette «réforme» passe également comme une lettre à la poste, sans réelle opposition syndicale.

  • 1994-1995 : la fameuse opération de « consolidation stratégique », c'est-à-dire la demi-privatisation de Belgacom ! Les trois syndicats publient l’un ou l’autre communiqué de presse, leurs porte-parole livrent quelques commentaires dubitatifs aux journalistes, mais ils ne mobilisent pas contre ce coup de force. Cette attitude passéiste va laisser des traces : la brèche est désormais ouverte pour une privatisation plus vaste de l’entreprise. Les travailleurs ont subi un revers décisif, sans combattre.

  • 1996 : le plan «Turbo».  Belgacom est découpée en « business unit »  et en « centres de profit » ;  la « culture d’entreprise » privée devient hégémonique. Ce découpage, et la dispersion du personnel qui en découle, annoncent des restructurations majeures. Ici aussi le sommet des organisations syndicales ne réagit pas. Au contraire : il est confirmé, avec son accord tacite, l'arrêt du recrutement de travailleurs statutaires (il n’y a jamais eu la moindre action précise pour s’opposer à cette décision, même pas une pétition ou une «minute de silence»…) !

  • 1997 : le plan PTS (People, Teams and Skills – «des personnes, des équipes et des compétences» !)  est avalisé et se solde par 6.000 pertes d’emplois et 6.000 réaffectations internes des désormais «collaborateurs». Avec l’appui unanime du front commun syndical, alors que l’entreprise accumule de plantureux bénéfices et ne connaît aucune difficulté financière ! La mesure est décrétée «socialement acceptable», même si 6.000 suppressions de postes de travail représentent la disparition de 6.000 possibilités de trouver un débouché professionnel pour les nombreux chômeurs. La rhétorique syndicale sur la «priorité absolue à l’emploi»  perd beaucoup de sa crédibilité ! D'autant qu'accepter un recul massif du volume des effectifs revient à accepter la conception mortifère de l'emploi comme « variable d'ajustement » pour des entreprises exclusivement en quête de rentabilité financière !

  • 1999 : un nouveau statut syndical est ratifié par le SLFP et la CGSP, le syndicat majoritaire de l'époque. Pourtant, ce statut brade l’autonomie des syndicalistes, limite leur liberté d’action, et renforce les possibilités d’ingérence du management  de l’entreprise dans la vie des organisations syndicales. La CSC, pour sa part, ne cautionne pas. Mais, concrètement, elle n’entreprend rien pour mettre en échec la manœuvre.

  • 2001 : encore un nouveau plan, baptisé en toute simplicité… BeST.  Le couvert est remis et les syndicats acceptent 4.000 nouvelles pertes d’emplois et 3.000 reconversions forcées supplémentaires, lesquelles vont encore générer un peu plus de souffrance au travail, et beaucoup de désarroi parmi le personnel de l’entreprise. Une diminution des «coûts salariaux» qui dopera encore plus les résultats financiers de Belgacom.

  • 2004 : boum badaboum, voici l’entrée en Bourse de Belgacom, une opération qui bénéficie du plein soutien du gouvernement à participation socialiste. Les syndicats prennent acte, se limitant à critiquer certains aspects de cette décision, et en prenant soin de ne pas décréter la moindre action ! Les boursicoteurs, eux, se réjouissent sans retenue de cette décision (attendue de longue date !), censée renforcer la «bonne santé  financière» du Bel 20

  • 2005 : l’état-major du front commun syndical,  une nouvelle fois uni pour la circonstance, fréquente assidûment le cabinet du ministre des entreprises publiques, Johan Vanden Lanotte, pour négocier un … enième plan de départs ! Il est notamment prévu de mettre en «disponibilité structurelle» des agents statutaires, alors en difficulté, et de licencier purement et simplement leurs collègues contractuels placés en «réaffectation de longue durée». Seule la CSC  finira par s’y opposer, suite au veto massif de ses militants. Après plusieurs journées de grève, elle introduira une série de recours devant le Conseil d’Etat, et elle obtiendra tardivement gain de cause. Belgacom devra donc réintégrer le personnel statutaire banni, mais pas les contractuels qui auront bel et bien perdu leur emploi !

  • 2006-2010 : des conventions collectives, qui ne rencontrent pourtant pas les exigences  syndicales énumérées dans les différents cahiers revendicatifs, entre autre en matière d’augmentations salariales substantielles, sont néanmoins signées. Par ailleurs, la politique de dégagement de l’emploi se poursuit avec l’adoption de nouveaux «projets» :  le «tutorat»,  qui a pour ambition  «d’encourager»  3.000 salariés à mettre prématurément un point final à leur carrière (dès l’âge de 58 ans !) ; et la promotion tapageuse de la «mobilité fédérale» (départ définitif vers la fonction publique) destinée à séduire quelques centaines d’autres agents fatigués d’être en permanence malmenés. Toutes celles et tous ceux qui partent ne sont pas remplacés. Un principe admis sans difficulté par les trois syndicats qui, pour montrer leur bonne volonté, marquent par la suite leur accord sur un nouveau statut régressif pour l’activité syndicale !

  • 2011-2016 : de nouvelles CCT au rabais qui confirment le blocage de facto des salaires, accordent des « avantages» qui ne coûtent guère à l’entreprise, planifient de nouveaux reculs des droits syndicaux et, cerise sur le gâteau, en mars-avril 2016 la signature d'un nouveau «plan de départs», sans aucune exigence en terme de compensation des personnes optant pour un «congé préalable à la retraite».

On le constate, la déflagration de cette semaine s'inscrit dans une longue trajectoire socialement régressive. Laquelle n'a cessé d'affaiblir les travailleurs et leurs organisations tout au long de cette période.

Malgré un rapport de force dégradé, il n'existe cependant d'autre choix que de lutter, car un nouveau recul entraînerait immanquablement la préparation de nouvelles mesures d'économies sur les «coûts du travail» et, dès lors, sur le dos de travailleurs qui ne cessent pourtant d'être bousculés depuis un gros quart de siècle !

achille.pngQuelles devraient être les revendications prioritaires ?

Quelques suggestions :

  • L'emploi ne peut plus être une «variable d'ajustement» pour des actionnaires avides de dividendes élevés, en ce y compris l'actionnaire «Etat» ; il ne peut plus être sacrifié sur l'autel de la course au profit maximal et il doit maintenant être entièrement préservé.

  • Par conséquent, chaque départ «naturel» (pension, décès, ...), -ou, le cas échéant, dans le cadre de dispositions complémentaires pour un départ anticipé du personnel âgé-, doit être compensé par l'embauche d'un(e) chômeur(se).

  • Les gains de productivité, acquis notamment grâce aux avancées technologiques, doivent permettre une réduction généralisée du temps de travail, sans perte de revenu. La semaine de 32 heures pour toutes et tous !

  • Une formation continue et de qualité pour tous les membres du personnel, sans exception.

  • Pour contrer les risques de division entre salariés, il faut en revenir au recrutement d'agents statutaires et accorder à tous les contractuels ce statut plus protecteur. Il ne peut y avoir d'entreprises publiques sans personnel sous statut public !

  • Un meilleur partage de la richesse produite par les travailleurs, par le biais de conventions collectives axées -entre autre- sur une revalorisation salariale structurelle.



Mais naturellement, il appartient maintenant aux membres du personnel concerné -et à eux seuls- de prendre position et de définir une ligne de conduite pour l'avenir.

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